dimanche 27 avril 2025

Les Boréades: « La Battue des Fées » La Bâtie d’Urfé, Forez (42). Du 22 juin au 14 septembre 2008

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Les Boréades
« La Battue des Fées »

Château de la Bâtie d’Urfé, Forez (42)
Les 22 juin, 13 juillet, 3 et 31 août, 14 septembre 2008

Le Château de la Bâtie d’Urfé, en Loire forézienne, est un haut-lieu de l’architecture remaissante. Les Boréades et leur directeur artistique, Pierre-Alain Four, ont imaginé une suite moderne au roman pastoral d’Honoré d’Urfé, Astrée et Céladon, « La Battue des Fées », qu’ils musicalisent vocalement et instrumentalement.

Les Tables de la Loi amoureuse en Forez

« Qu’il ne puisse jamais penser que son amour doive passer ; qui d’autre sorte le conseille soit pour ennemi réputé, car c’est de lui prêter l’oreille crime de lèse-majesté »
: voilà une 12e Loi d’amour, déposée sur les Tables par le berger Céladon dans le temple de la déesse Astrée. En somme, on ne saurait badiner avec l’amour, du côté de chez Honoré (d’Urfé), au point que, chante la belle Bergère des bords du Lignon forézien : « Peut-on mourir pour trop aimer ? Si l’on mourait, je serais morte, car jamais une amour si forte n’a pu dans un cœur s’allumer. » Question subsidiaire : étant donné que ce Lignon n’est tout de même pas – tant s’en faut – un vrai fleuve, vous y croyez, vous, que Céladon au désespoir d’être condamné à l’abandon par son Astrée, ait pu se noyer dans ce modeste affluent de la Loire en son parcours initial ? Et qu’il ait fallu un sauvetage par les Nymphes pour ramener le Berger à son ardent désir de reconquérir sa Belle ? Oh, mais après tout les histoires peopolo-présidentielles de France, Navarre et ailleurs vous en feraient bien pleurer pour moins aventuré, et puis c’est de la poésie XVIe, cette Astrée qui fit battre tant de cœurs et provoqua même des parodies baroquissimes et irrévérencieuses.

Un récit revisité
Ce que propose Pierre-Alain Four avec son groupe des Boréades – récit revisité du chef-d’œuvre précieux d’Honoré d’Urfé, musiques en écho – est une « Battue des Fées », menée autour du merveilleux château Renaissant de la Bâtie. « L’idée générale est de travailler sur les mythologies locales – histoires, légendes, représentations, images. » En se situant au cœur de l’architecture imaginée par Claude d’Urfé, le bâtisseur, et du « temple des amours » rimé par son petit-fils Claude dans le plus célèbre des romans pastoraux, le dramaturge-conteur d’aujourd’hui veut mélanger l’Astrée et les légendes locales, en les inscrivant dans les pièces du château de la Bâtie (appartements, grotte, chapelle) et le jardin. Des thèmes entrelacés surgissent et « modernisent » la galanterie renaissante : fontaine de vérité amoureux et labyrinthe, paradis perdu et Arcadie, roman d’éducation et à clés, amours précoces et sophistiquées avec échange de prénoms à double sens, exposition d’un monde idéal (une nouvelle Enéide), fantastique autour de la grotte…

Les douces rêveries au fil de l’eau
Plus prosaïquement et en tout cas réalistement, les Boréades, pour leur création musicalo-romanesque, se mettent (filons la métaphore) sous la houlette d’un Bon Berger des Pouvoirs Publics, le Conseil Général de la Loire qui mène depuis longtemps ici une politique de restauration du patrimoine et une action culturelle, avec ses Nuits de la Bâtie (théâtre, expositions, cinéma, concerts). Voici donc le groupe lyonnais en « résidence de création » : cela a commencé fin mai avec une Nuit des Musées (ballade musicale à la lampe-torche dans le château) et un parcours de Jardins et Merveilles (de Lewis Carroll à John Dowland). Le couronnement sera donc la Battue des Fées, inaugurée fin juin et redonnée à quatre reprises durant l’été. Les musiques seront évidemment franco-renaissantes ( Janequin, Sermisy, Costeley, Attaingnant) mais aussi italiennes en hommage à l’influence d’outre-montagnes qui guida les Urfé, le bâtisseur et le poète. Ecrite en français du début XXIe, avec clins d’œil et d’oreille à d’autres niveaux de récits et de langues, cette Battue ne veut pourtant pas abandonner l’esprit enchanteur et si musicien du poète : « Après s’y être assise, et que sans dire mot elle eut longuement regardé le courant de la rivière, sans autre action qui donnât connaissance de vie, que celle de respirer, ainsi , dit-elle, vont courant dans le sein de l’oubli toutes les choses mortelles. Depuis que je suis sur ce rivage, l’eau que je vois couler n’est pas la même que quand je suis arrivée, mais hélas je ne suis pas la même Diane que j’étais quand je suis venue ici… » Et pourtant, cet Honoré n’était pas qu’un doux rêveur, puisqu’en catholique ultra il fut partisan de la Sainte Ligue (la famille des Guise), pas un refuge pour pacifistes et tolérants pendant les guerres de Religion…. Un paradoxe de plus au doux pays du Lignon ! Mais le groupe lyonnais aime bien les actions culturelles en plein air, les réflexions sur plusieurs niveaux de l’art et les arrière-plans un brin ironiques ou tendres. Voilà en tout cas un bon conseil de promenade en Loire forézienne pour un soir d’été, sans oublier que récemment Eric Rohmer a confié au septième art ses rêveries urféennes en son « Amours d’Astrée et de Céladon »…

La Battue des Fées, conte et musique au château de la Bâtie d’Urfé (42). Texte de Pierre-Alain Four. Ensemble vocal et instrumental Les Boréades (œuvres françaises et italiennes renaissantes et baroques). Les dimanches à 16h : 22 juin (création) ; 13 juillet ; 3 et 31 août ; 14 septembre.
Renseignements et réservation : Téléphone: 04 77 97 54 68 ou [email protected]

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