Emile Naoumoff, piano. Récital Dupont, Fauré, JC Bach Paris, L’Archipel. Le 24 juin 2009 à 20h30

Son récent disque chez Saphir révèle l’âme solitaire, profondément tragique mais ô combien poétique et nostalgique, tendre et contemplative de Gabriel Dupont (intégrale de l’oeuvre pour piano, 1 cd Saphir), décédé prématurément, le jour de la déclaration de la Première Guerre en 1914. Emile Naoumoff, d’origine bulgare aime les voyages intérieurs: ceux qui ne se mesurent pas en kilomètres parcourus mais en sentiments et souvenirs vécus dans l’intimité et le recueillement. Le propre du pianiste après les Nocturnes de Fauré, se concentre avec une éloquence rare, sur la portée des champs introspectif qui dans le cas de Dupont, compositeur reclus, secret voire énigmatique a laissé surtout un opéra, Antar (créé à l’opéra Garnier en 1921 puis 1946).
En poète défricheur des paysages sonores au bord du précipice, flottants et suspendus en liaison avec son esprit mélancolique, Emile Naoumoff, dévoile l’oeuvre pour piano seul, ivre et éperdue mais désespérée comme a pu l’être avant lui celle de Schumann. Langueur romantique mais aussi ciselure impressionniste et questionnement à la Scriabine tout autant, richesse des atmosphères diffuses (jeu subtil de la pédale qui produit cette diffraction de la matière, cette perspective en résonance…), à laquelle le pianiste sait réserver une délicatesse suggestive idéalement expressive. Autant de partitions méconnues désormais dévoilées qu’il joue pour le récital de l’Archipel, ce 24 juin 2009, aux côtés d’autres compositeurs avec lesquels il cultive d’évidentes et captivantes affinités. Fauré, Dupont… EMile Naoumoff ne serait-il pas en définitive un passeur et un ambassadeur désigné pour la magie et le rêve porté par les compositeurs Français au carrefour du XIXè et du XXè, comme pour ceux de la première moitié du XXème siècle?
L’interprète ajoute en contrepoint plusieurs pièces de Jean-Chrétien Bach dont il prépare un nouvel enregistrement à paraître également chez Saphir Productions.

Biographie d’Emile Naoumoff

Né à Sofia, en Bulgarie en 1962, Emile Naoumoff débute le piano à l’âge de 5 ans et compose ses premières pièces un an plus tard. A huit ans, sa rencontre avec Nadia Boulanger est décisive, il devient son dernier disciple. Il travaillera avec elle jusqu’à sa mort en 1979. Pendant cette période d’apprentissage très enrichissante, Nadia Boulanger donne à Emile l’opportunité de travailler avec Cliffard Corzon, Igor Markevitch, Robert et Gaby Casadesus, Nikita Magaloff, Jean Francaix, Leonard Bernstein et Yehudi Menuhin. C’est d’ailleurs Lord Menuhin qui dirigera la Première de son premier concerto pour piano, avec, en soliste, le compositeur âgé alors de 10 ans seulement.

Parallèlement, Emile Naoumoff poursuit ses études au Conservatoire de Paris avec Lelia Gousseau, Pierre Sancan, Geneviève Joy-Dutilleux, ainsi qu’à l’Ecole Normale de Musique de Paris avec Pierre Dervaux.
Après la mort de Nadia Boulanger, Emile Naoumoff participe à l’enseignement dans quelques unes de ses classes durant les sessions d’été au Conservatoire d’Art Américain de Fontainebleau dont elle fut la cofondatrice en 1921. Il mène alors une carrière de compositeur (édité chez Schott, Mayence, Allemagne) et de pianiste soliste tandis qu’il enseigne au Conservatoire de Paris.
Juste quand Mlle Boulanger, dernière disciple de Gabriel Fauré, éprouve le besoin de passer le flambeau à Emile Naoumoff, il se sent appelé à partager avec la génération suivante ce qu’il a appris d’elle. En 1996 il ouvre sa propre Académie d’été au Château de Rangiport à Gargenville en France. En 1998 il accepte un poste de professeur associé de piano à l’Université d’Indiana à Bloomington où il vit actuellement.