Mini-résidence vivifiante au Conservatoire Royal de Bruxelles les 12, 13 et 14 avril 2007, autour de la rayonnante altiste allemande Tabea Zimmermann et de ses non moins éblouissants complices, avec lesquels elle forme le tout jeune Arcanto Quartett. Tous les quatre musiciens de premier plan, Antje Weithaas (premier violon), Daniel Sepec (deuxième violon), Tabea Zimmermann (alto) et Jean-Guihen Queyras (violoncelle), présentèrent, au cours des deux soirées auxquelles nous avons assisté, un véritable condensé de la musique de chambre, nous faisant parcourir avec enthousiasme et conviction les formes, les climats et les époques, déambulant du classicisme mozartien (le Trio « Kegelstatt » et le Quintette à cordes K. 516) à la fébrilité contemporaine de George Benjamin (Viola, viola, pour deux altos, interprété par Tabea Zimmermann et son disciple Antoine Tamestit, récemment récompensé aux Victoires de la musique classique 2007 comme soliste instrumental de l’année).
Le Trio « Kegelstatt » est élégant, raffiné, empreint dans la clarinette de Chen Halevi, d’un voile mystérieux et prémonitoire, annonciateur de la lumineuse douceur du Quintette et surtout du Concerto pour clarinette de Wolfgang.
Carmen à l’alto, Florestan au violoncelle
N’hésitant pas à aborder des répertoires peu pratiqués (Hindemith, dont la musique de chambre est souvent injustement ignorée des salles de concerts), le programme fait tout naturellement la part belle à l’alto d’une Tabea Zimmermann aux multiples personnalités, qui se transmue, dans le pittoresque sextuor Escena Andaluza de Joaquin Turina, en une fascinante Carmen de l’archet, tour à tour flamboyante, sensuelle, langoureuse.
Vitalité, fraîcheur et équilibre marquent les ombres et lumières du Quatuor à cordes de Ravel. Le deuxième mouvement (Assez vif, très rythmé) révèle la beauté sonore pure et limpide de quatre archets à l’unisson qui, proches de la perfection, atteindront l’état de grâce dans le mouvement Très lent. Le violon d’Antje Weithaas, à la fois racé et gracieux, parfois impétueux, mérite une mention particulière (thème principal de l’Allegro moderato introductif), mais il serait injuste de ne pas saluer aussi le talent de Daniel Sepec et l’ample violoncelle de Jean-Guihen Queyras, concentré, maîtrisé et par ailleurs presqu’entièrement dépourvu de vibrato, modulant d’admirables sonorités, sombres et profondes.
Avec le Quatuor pour piano de Schumann, c’est un autre témoignage de raffinement et de spontanéité qu’offre le Quatuor Arcanto, rejoint par la pianiste Silke Avenhaus, modèle de subtilité et de finesse. Florestan au violoncelle, Jean-Guihen Queyras donne le ton dans le Scherzo ensorcelant puis dans l’admirable cantilène de l’Andante. Deux concerts emplis de plénitude, applaudis avec chaleur par un public électrisé.
Approfondir
Lire notre présentation de la Résidence de Tabea Zimmermann et du Quatuor Arcanto au Conservatoire de Bruxelles
Bruxelles. Conservatoire Royal, les 13 et 14 avril 2007. Paul Hindemith (1895-1963): Quatuor à cordes n° 5 Op. 32, Sonate pour alto et piano Op. 11/4. Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791): Trio pour piano, clarinette et alto « Kegelstatt » K. 498, Quintette à cordes K. 516. George Benjamin (né en 1960): Viola, viola, pour deux altos. Robert Schumann (1810-1856): Quatuor pour piano et cordes Op. 47. Maurice Ravel (1875-1937): Quatuor à cordes. Joaquin Turina (1882-1949): Escena Andaluza, pour alto, piano et quatuor à cordes. Arcanto Quartett, Tabea Zimmermann, alto. Silke Avenhaus, piano. Antoine Tamestit, alto. Chen Halevi, clarinette.
Crédit photographique
Le Quatuor Arcanto (DR/Christoph Fein)