TOURS, OpĂ©ra. Cycle Beethoven: Symph. 5 et 6, 23 et 24 avril 2016. Jean-Yves Ossonce. Adieux beethovĂ©niens pour le chef et directeur de la maison tourangelle : Jean-Yves Ossonce conclut son activitĂ© symphonique comme directeur des lieux avec ce superbe programme symphonique beethovĂ©nien comprenant les sommets orchestraux : Symphonies 5 et 6 couplĂ©es avec l’ouverture Ăąpre et vertigineuse Coriolan opus 62, laquelle ouvre le cycle, les 23 puis 24 avril 2016. InspirĂ© non pas de Shakespeare mais de la tragĂ©die de Von Collin, Beethoven aborde un thĂšme qui lui est cher : la libertĂ© du hĂ©ros aliĂ©nĂ© par son entourage. Ecrite en 1807, entre la 5Ăšme et la 6Ăšme Symphonies, l’ouverture Coriolan reste l’une des pages romantiques les plus jouĂ©es par les orchestres du monde entier, vrai dĂ©fi d’intĂ©rioritĂ© et d’expressivitĂ© canalisĂ©e. TraĂźtre Ă sa patrie romaine, le gĂ©nĂ©ral Coriolan, portĂ© par l’esprit de vengeance et d’Ă©mancipation individuelle, parvient Ă humilier le SĂ©nat, et conduit l’armĂ©e barbares des Volsques contre Rome. La fiertĂ© du militaire insoumis, l’ambition du hĂ©ros insatisfait s’expriment idĂ©alement dans une construction symphonique qui Ă©claire surtout les vertiges et les dĂ©sirs de la psychĂ© humaine : un ocĂ©an de sentiments conquĂ©rants, autodĂ©terminĂ©s. Puis surgit la force du destin contraire : l’appel de sa mĂšre et de son Ă©pouse l’exhortant Ă expier sa faute et sa trahison : Coriolan meurt en traĂźtre dĂ©noncĂ© sous le joug des rebelles qu’il avait lui-mĂȘme pilotĂ©. En moins de 10 mn, Beethoven brosse le portrait du gĂ©nĂ©ral romain, vrai nature impĂ©tueuse, figure Ă©clatante de son ambition musicale (l’orchestration comprend les bois par 2 ; 2 cors et 2 trombones…). Figure du cynisme ou du rĂ©alisme affĂ»tĂ©, Coriolan a ce mot grandiose sur la vanitĂ© du pouvoir : refusant d’ĂȘtre Consul, le gĂ©nĂ©ral dĂ©clare non sans raison : “j’aime mieux les servir Ă ma guise, que les gouverner Ă la leur”. Jamais on eut mieux exprimer la rĂ©alitĂ© du pouvoir personnel.
Symphonie n°6 “Pastorale” de Beethoven
Vienne, 1808
La SixiĂšme Symphonie dite Pastorale fut composĂ©e et créée au mĂȘme moment que la CinquiĂšme, le 22 dĂ©cembre 1808, Ă Vienne. Outre son gĂ©nie de symphoniste, Beethoven, ĂągĂ© de 38 ans, rĂ©vĂ©lait une aptitude exceptionnelle Ă renouveler son inspiration : difficile de concevoir Ćuvres aussi diffĂ©rentes et cohĂ©rentes, en un mĂȘme moment ! Le compositeur prĂ©cise lâesprit de lâĆuvre : davantage « expression » que « peinture » de lâĂ©lĂ©ment pastoral. Dâailleurs, au moment de sa publication, en 1826, la partition indique : « Symphonie Pastorale ou souvenir de la campagne ». Il sâagit moins dâune Ă©vocation descriptive que suggestive du motif rural, sylvestre, naturel. Pour conduire lâauditeur dans ce cycle de paysages plus brossĂ©s que dessinĂ©s, il a lui-mĂȘme indiquĂ© pour chacun des mouvements, un titre indicatif.âšBeethoven privilĂ©gie la sensation sur le rĂ©alisme. En cela, il serait le prĂ©curseur des impressionnistes, tout au moins un modĂšle pour tous les symphonistes Ă venir, de Mendelssohn et Schumann, Ă Brahms et Mahler. Toujours lâĂ©lement naturel, vĂ©cu sur le motif, en plein air, sâil est ensuite sublimĂ© par le filtre du souvenir, inspire au plus haut point, lâesprit des compositeurs. Lâaccueil fut mitigĂ©, et le public resta sur lâennui suscitĂ© par la longueur du deuxiĂšme mouvement !
Souvenir pastoral⊠Symphonie « Pastorale » n°6 en fa majeur, opus 68. Cinq mouvements dont les trois derniers sont enchaĂźnĂ©s. Lâallegro ma non troppo (1) intitulĂ© « Ă©veil dâimpressions joyeuses » dont le premier thĂšme reprend la mĂ©lodie dâun air populaire de BohĂȘme oĂč sĂ©journa le compositeur Ă lâĂ©tĂ© 1806 chez les Brunswick. Lâandante molto mosso (2) Ă©voque « une scĂšne au bord du ruisseau » oĂč le chant des oiseaux dĂ©taillĂ©s par Beetoven (rossignol, caille et coucou) permet aux bois de se dĂ©tacher, respectivement : flĂ»te, hautbois et clarinette. Lâallegro qui suit (3) intitulĂ© « rĂ©union joyeuse de paysans » est un scherzo structurĂ© sur le thĂšme descendant ( sur huit mesures) exposĂ© pianissimo par les cordes. Puis, se dĂ©veloppe une mĂ©lodie rustique brusquement interrompu par un tutti fracassant : câest lâannonce de lâorage (allegro en fa mineur, 4). Fulgurance de lâĂ©clair puis descente, apaisement. Enfin, lâallegretto final (5) exprime le « chant des pĂątres, sentiment de contentement aprĂšs la fin de lâorage ».
Hymne Ă la nature souveraine, cĂ©lĂ©brĂ©e par une humanitĂ© joyeuse tel serait le programme Ă©noncĂ© sans plus de prĂ©cision par un Beethoven, plus impressionniste que nĂ©ticuleusement naturaliste. Beaucoup dâamateurs voire de musiciens et non des moindres ont tenu « la Pastorale » pour une Ćuvre rĂ©duite du fait de son intention descriptive, inscrite dans son titre. CâĂ©tait faire bien peu de cas des prĂ©cisions pourtant sans ambiguĂŻtĂ© de son auteur. Claude Debussy, dans « Monsieur Croche » nâa pas Ă©pargnĂ© Beethoven : il voit dans la SixiĂšme Symphonie, une Ćuvre plus faible que les autres opus symphoniques. Un ratĂ© « inutilement imitatif ». LâĂ©coute objective de lâĆuvre rĂ©vĂšle quâil sâagit dâune partition dense et sauvage, dont la force Ă©nergique et la vitalitĂ© affirment le gĂ©nie beethovĂ©nien, Ă©vocatoire et sensitif, d’une puissance Ă©vocatoire Ă l’Ă©chelle de la Nature…
Concert symphonique Beethoven Ă l’OpĂ©ra de Tours
Ludwig van Beethoven
Coriolan, ouverture symphonique en do mineur, op. 62
Symphonie n°6 en fa majeur, op. 68, “Pastorale”
Symphonie n°5 en ut mineur, op. 67, “Symphonie du Destin”
Orchestre Symphonique Région Centre-Val de Loire / Tours
Jean-Yves Ossonce, direction musicale
Samedi 23 avril 2016, 20h
Dimanche 24 avril 2016, 17h
Grand Théùtre de Tours
34 rue de la Scellerie
37000 Tours
Billetterie
Ouverture du mardi au samedi
10h00 Ă 12h00 / 13h00 Ă 17h45
02.47.60.20.20
theatre-billetterie@ville-tours.fr
Conférences présentant le programme Beethoven des 23 et 24 avril 2016 :
Samedi 23 avril 2016, 19h
Dimanche 24 avril 2016, 16h
Grand Théùtre, Salle Jean Vilar / entrée gratuite dans la limite des places disponibles
Adieux lyriques. L’ultime production lyrique dirigĂ©e par Jean-Yves Ossonce comme directeur de l’OpĂ©ra de Tours aura lieu les 11, 13 et 15 mai 2016 : EugĂšne OnĂ©guine de Tchaikovski dans la mise en scĂšne dĂ©pouillĂ©e, tendue, Ăąpre conçue par l’excellent Alain Garichot.