CRITIQUE, concert. ROQUE DâANTHERON, le 1er aout 2022. RĂ©cital Quatuor MODIGLIANI, Bertrand CHAMAYOU – Jâai eu la chance en 2008 de rencontrer le Quatuor Modigliani et de pouvoir suivre rĂ©guliĂšrement leur merveilleuse aventure musicale avec une carriĂšre fulgurante. Les retrouver est toujours une grande joie. Ce soir avec Bertrand Chamayou, autre artiste que je connais bien, ils ont donnĂ© une somptueuse interprĂ©tation du Quintette avec piano de Schumann. Cette Ćuvre si heureuse, celle dâun jeune Ă©poux enfin comblĂ©, est dâune lumiĂšre radieuse tout du long. Certainement lâĆuvre la plus proche du bonheur parfait pour le si complexe Robert Schumann.
La Roque dâAnthĂ©ron 2022
Splendeur dans la Nuit provençale
Le Quatuor Modigliani et Bertrand Chamayou jouent Schumann
Ćuvre lumineuse et heureuse qui est parfaitement honorĂ©e par les jeunes interprĂštes de ce soir. La fusion entre les interprĂštes sâest créée sur une Ă©nergie toujours renouvelĂ©e. Bertrand Chamayou, trĂšs impliquĂ©, a chaque fois relancĂ© lâaventure avec panache. Le jeu des Modigliani est une pure merveille de fusion-dĂ©fusion en mouvement perpĂ©tuel. Sons unifiĂ©s et diffĂ©renciĂ©s, nuances subtiles entre « piano » dĂ©licats et « forte » bouleversants de beautĂ©. Concert a Ă©tĂ© enregistrĂ© par France Musique, ici : https://www.radiofrance.fr/francemusique/podcasts/le-concert-du-soir/bertrand-chamayou-et-le-quatuor-modigliani-en-direct-de-la-roque-d-antheron-8276140.
Je dois reconnaĂźtre que dans un premier temps je nâai pas compris lâordre du programme car comment imaginer fin de concert plus enthousiasmante que le final de ce brillant Quintette de Schumann dans cette interprĂ©tation si aboutie. Le si douloureux quatuor de la jeune fille et la mort de Schubert qui lui suivait me paraissant moins appropriĂ©. Mal mâen a pris car jâai dĂ» rendre les armes, lâordre du concert Ă©tait parfait. Plus rassemblĂ© au centre de la scĂšne le Quatuor Modigliani a su entrainer le public trĂšs loin dans une musicalitĂ© Ă©mue hors sol. Ce Quatuor D.810 est connu de beaucoup. Je dois reconnaĂźtre que je lâĂ©coute souvent et dans plusieurs interprĂ©tations historiques sans jamais me lasser de cet ineffable deuxiĂšme mouvement. Les Modigliani ont approfondi leur connaissance des quatuors de Schubert. Ils viennent dâen enregistrer lâintĂ©grale. Je pense que nous le devons un peu au temps imposĂ© par les consĂ©quences du Coronavirus. Dâune subtile interprĂ©tation, saluons entre autres, lâart absolument souverain des nuances, des phrasĂ©s incroyablement dĂ©veloppĂ©s, des soli de toute beautĂ© Ă vous couper le souffle.
Câest attendu du premier violon dans lâandante et Amaury Coeytaux est parfait de dĂ©licatesse, câest moins frĂ©quent avec le violoncelle. François Kieffer qui nous offre le lamento inconsolable de la jeune fille Ă la mort avec des Ă©lans de vĂ©hĂ©mence dĂ©chirants. Lâentente entre les 4 musiciens est toujours aussi perceptible mais plus discrĂšte quâil y a quelques annĂ©es. Comme un vieux couple rassurĂ© par sa parfaite connivence qui se comprend sans paroles. Ainsi leur entente musicale est sidĂ©rante dâĂ©vidence. Ils jouent superbement chacun leur somptueux instrument car ils ont la chance de compter sur un mĂ©cĂ©nat dâune grande intelligence leur permettant de faire vivre 4 instruments italiens dâexception.
Ce qui restera peut-ĂȘtre le plus inoubliable, câest lâĂ©motion qui nait uniquement par des moyens musicaux, sans pathos surajoutĂ©. Câest la beautĂ© des sons, lâalchimie de leur intrication, la fulgurance des nuances « piani » avec un son plein et rond, la rudesse des accords rĂ©pĂ©tĂ©s qui portent cette Ă©motion insondable. Du trĂšs, trĂšs grand ART. Sans oublier de signaler leurs longs phrasĂ©s si sensibles et si prĂ©cis ! Le public a exultĂ© aprĂšs cette musicalitĂ© si sublime qui sâest accordĂ©e si parfaitement au lieu magique du Parc aux arbres pluricentenaires. Un bis calme et doux, extrait du 4Ăšme quatuor de Schubert, ferme cette soirĂ©e si dĂ©licate et forte.
Certes il est dommage que Bertrand Chamayou ne vienne pas aux saluts mais câest la soirĂ©e des Modigliani et Bertrand Chamayou aura dâautres grands moments comme le lendemain avec du Messiaen dans lequel il excelle. Je ne dĂ©taillerai pas son interprĂ©tation soignĂ©e et dĂ©licate des variations de Haydn qui ont dĂ©butĂ© le concert et ne reprĂ©sentait quâune aimable mise en bouche avant ce festin de haute musicalitĂ©. La Roque dâAnthĂ©ron nâest pas seulement un festival dĂ©diĂ© au seul piano, la musique de chambre y rĂšgne ainsi que la musique baroque et le Jazz. Ce soir la subtilitĂ© des cordes a enchantĂ© le public. Merci aux Modigliani !
___________________________________
CRITIQUE, concert. ROQUE DâANTHERON, le 1er aout 2022. Auditorium du Parc. RĂ©cital Bertrand CHAMAYOU, piano et Quatuor MODIGLIANI (Amaury Coeytaux, LoĂŻc Rio : violons ; Laurent Marfaing : alto ; François Kieffer : violoncelle). Joseph Haydn (1732-1809) : Variations en fa mineur Hob. XVII.6 ; Robert Schumann (1810-1856) : Quintette pour piano et cordes en mi bĂ©mol majeur op.44 ; Frantz Schubert (1797-188) : Quatuor Ă cordes n°14 en rĂ© mineur D.810 « La jeune fille et la mort ». Photo : © Valentine Chauvin.