vendredi 29 mars 2024

Abbaye Royale de Fontevraud. Réfectoire, le 6 avril 2012. Marc-Antoine Charpentier… Céline Scheen (soprano); Maïlys de Villoutreys (soprano)… Ricercar Consort, Philippe Pierlot, viole de gambe et direction

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Comptre rendu de concert, Fontevraud
Marc Antoine Charpentier par Ricercar consort, Philippe Pierlot
Par notre envoyée spéciale, Hélène Biard


Pendant longtemps Marc-Antoine Charpentier (1643-1704), qui n’a jamais cotoyé les cercles les plus puissants du Grand Siècle (qu’il s’agisse de la cour de Louis XIV à Versailles ou de celle de Monsieur, frère du roi, à Saint Cloud), est resté dans l’ombre gigantesque de Jean-Baptiste Lully; il est néanmoins revenu sur le devant de la scène musicale au milieu du XXe siècle grâce à son Te Deum dont le prélude est devenu célébrissime grâce aux télédiffusions en eurovision. Depuis quelques années le public, néophyte ou averti (re)découvre l’impressionnant corpus de musique de Charpentier qui nous a laissé plus de cinq cent oeuvres de musique sacrée ou profane. En cette semaine sainte, l’Abbaye Royale de Fontevraud, cité des Plantagenêts située au coeur de l’Anjou, a invité l’ensemble Ricercar Consort et son chef, qui en est aussi le fondateur, Philippe Pierlot avec un programme d’oeuvres dédiées à la sainte Mère de Jésus, superbement interprété par six chanteurs en grande forme accompagnés par cinq instrumentistes non moins inspirés.


Marc-Antoine Charpentier enflamme Fontevraud

Dès les premières notes de l’Hymne pour toutes les festes de la Vierge nous sommes plongés dans un univers intimiste, parfois serein, souvent plein de tendresse; tout dans la musique à la Vierge de Charpentier incite à la méditation et quand elle est servie par des artistes qui connaissent et maitrisent parfaitement leur sujet, on ne peut qu’être sensible à une musique aussi belle et bien pensée.

Superbes et convaincantes, les deux sopranos Céline Scheen et Maïlys de Villoutreys. C’est surtout dans le Stabat Mater pour les religieuses que les deux artistes, qui chantent hors scène, font montre d’un talent et d’une forçe de caractère peu communs; les deux voix se fondent parfaitement, elles passent sans aucun effort dans le réfectoire dont l’accoustique est par ailleurs excellente. Parmi les trois artistes masculins, le ténor David Munderloh et la basse Matthias Viewig n’ont guère de mal à s’imposer et à passer le « mur du son » tant les voix sont solides, rondes, puissantes, chaleureuses; si la mezzo Lidia Vinyes Curtis semble plus réservée, il ne s’agit là que d’une façade tant l’artiste prend ses marques avec une fermeté et une autorité bienvenues.

Seul l’alto José Hernandez Pastor peine à trouver sa place quand il chante à découvert et, même s’il est plus à son aise dans les ensembles, la voix passe difficilement dans la salle … à moitié remplie; nous apprécions néanmoins l’investissement du chanteur qui met tout son coeur à la défense de l’oeuvre vocale de Charpentier; nous regrettons un peu un manque d’autorité là ou ses collègue font montre d’une assurance à toute épreuve.

Quoi qu’il en soit la cohérence et l’harmonie entre les voix étonne et séduit avec d’autant plus d’éclat et de force que les artistes sont soutenus par cinq instrumentistes talentueux et attentifs aux voix qu’ils accompagnent. Notons au passage que Philippe Pierlot dirige ses musiciens avec maestria et fermeté; en outre, il manie avec beaucoup de talent deux instruments dans la même soirée (une viole de dessus et une viole basse). Tout dans le concert de ce Vendredi Saint nous invite au recueillement et à la prière et d’ailleurs, même si le public manifestait son enthousiasme dès qu’il en avait l’occasion, la salle était très attentive et a réservé aux artistes une ovation très largement méritée en fin de soirée.

Hors de tout esprit partisan, nous avons régulièrement l’occasion d’écouter de la musique sacrée en dehors des fêtes religieuses (qu’il s’agisse de Noël ou de Pâques), nous ne pouvons que saluer la volonté de programmer des concerts d’une telle qualité artistique et musicale. Et lorsqu’il s’agit de mettre à l’honneur un compositeur comme Marc Antoine Charpentier trop lontemps oublié, voire négligé, l’initiative de l’Abbaye Royale de Fontevraud est tout à fait méritoire et bienvenue; nous regrettons d’ailleurs que le concert de l’ensemble Ricercar Consort n’est pas été plus largement annoncé tant le talent des artistes et la musique de Charpentier méritent très largement le déplacement.

Abbaye Royale de Fontevraud. Réfectoire, le 6 avril 2012. Marc Antoine Charpentier (1643-1704) : Hymne pour toutes les festes de la Vierge, Salve Regina, Magnificat, Jesu Corona Virginum (hymne), Regina Caeli, Supplicatio pro defunctis ad Beatam Verginem, Stabat Mater pour les religieuses, Pour la passion de Notre Seigneur, Litanies de la Vierge. Avec Céline Scheen (soprano); Maïlys de Villoutreys (soprano); Lidia Vinyes Curtis (mezzo-soprano); José Hernandez Pastor (alto); David Munderloh (ténor); Matthias Viewig (basse); ensemble Ricercar Consort, Philippe Pierlot, viole de gambe et direction.Compte rendu rédigé par notre envoyée spéciale, Hélène Biard.

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