PARIS, Palais Garnier. 21 janv – 18 fĂ©v 22. MOZART : Noces de Figaro. Pilier du rĂ©pertoire lyrique, Les Noces de Figaro, non prĂ©sentĂ© Ă lâOpĂ©ra national de Paris depuis 10 ans, revient sur scĂšne Ă Paris, du 21 janvier au 18 fĂ©vrier 2022 (Palais Garnier) dans une nouvelle production mise en scĂšne par Netia Jones (dĂ©buts Ă lâOpĂ©ra). Lâartiste britannique aborde lâessence europĂ©enne de la piĂšce de Beaumarchais Ă laquelle Mozart et Da Ponte apportent le trouble, lâinquiĂ©tude, la fragilitĂ© des personnages et des situations.
Premier opus de la trilogie Mozart/Da Ponte, Les Noces de Figaro sont dirigĂ©es par le directeur musical Gustavo Dudamel, avec Peter Mattei (Comte Almaviva), Maria Bengtsson en alternance avec Miah Persson dans le rĂŽle de la Comtesse Almaviva, Ying Fang (dĂ©buts Ă lâOpĂ©ra national de Paris) dans celui de Suzanne, Adam Palka dans celui de Figaro et Lea Desandre (dĂ©buts Ă lâOpĂ©ra national de Paris) dans le rĂŽle de ChĂ©rubin.
Les Noces de Figaro sont pour Brahms un « miracle » ; et au dĂ©but du II, la plainte de la Comtesse, femme dĂ©laissĂ©e, y rĂ©sonne encore comme lâune des pages musicales les plus dĂ©chirantes. Mozart choisit la comĂ©die scandaleuse de Beaumarchais. Interdite mĂȘme par lâEmpereur Joseph II Ă Vienne en 1785, la piĂšce avait mĂȘme Ă©tĂ© interdite par Joseph II: trop sĂ©ditieuse, trop subversive, semant les germes dâune contestation sociale et la critique ouverte Ă lâautoritĂ© aristocratique⊠Ici faisant fi des convenances sociales, Figaro le valet et sa promise Suzanna, se liguent avec la Comtesse contre le Comte, vrai tyran domestique⊠La nouvelle production de Netia Jones entend « questionner avec humour mais non sans espiĂšglerie les rapports humains, dans une production qui vient confondre rĂ©alitĂ© et fiction au point de se demander, comme le Comte : « Jouons-nous une comĂ©die ? ».
MOZART : Les Noces de Figaro / Le Nozze di Figaro
Nouvelle production : Dudamel / Netia Jones.
11 représentations du 21 janvier au 18 février 2022
Durée : 3h40 (1 entracte)
OPERA BUFFA EN QUATRE ACTES, 1786
Musique : Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Livret : Lorenzo Da Ponte
DâaprĂšs la piĂšce de Pierre Augustin Caron de Beaumarchais :
Le Mariage de Figaro
Retransmissions
En direct le jeudi 3 février 2022 à 19h30 sur France.tv / Culturebox et dans les cinémas UGC, CGR et indépendants
Diffusion ultérieure sur une chaßne de France télévisions
Diffusion sur France Musique le samedi 26 février 2022 à 20h
VOIR lâentretien avec la metteure en scĂšne Netia Jones
https://www.youtube.com/watch?v=POscajeiiAE
LIRE aussi notre DOSSIER Mozart, Les Noces de Figaro / partition des LumĂšres et lâopĂ©ra des femmes : https://www.classiquenews.com/mozart-les-noces-de-figaro-partition-des-lumieres-opera-des-femmes/
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PROCHAINES PRODUCTIONS Ă lâOpĂ©ra de Paris
La Khovantchina du 26 janvier au 18 fĂ©vrier 2022 Ă lâOpĂ©ra Bastille
https://www.youtube.com/watch?v=kCjR-N2j1KA
Don Giovanni du 1er fĂ©vrier au 11 mars 2022 Ă lâOpĂ©ra Bastille
https://www.youtube.com/watch?v=ncg-QLEW9F4
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Les Noces de Figaro : l’opĂ©ra des femmes / la vision de CLASSIQUENEWS
Le couple des LumiĂšres
Et pourtant, sa claire conscience ne peut empĂȘcher aussi de constater lâoubli des hommes Ă ce quâils doivent ĂȘtre : la folie, le dĂ©sir, lâagitation ont tĂŽt fait de ruiner tout Ă©quilibre, et lâon sent bien quâau terme de cette aventure lyrique, câest le dieu théùtre qui triomphe : sa flamme et son flux incontrĂŽlable, sa tentation perpĂ©tuelle du chaos.
Acte I : Les serviteurs se rebiffent. Figaro dĂ©couvre que Le Comte ne cesse de harceler sexuellement sa future Ă©pouse, Suzanne. Câest lâenjeu de la premiĂšre scĂšne et du duo entre les deux serviteurs : Mozart et Da Ponte militent donc pour lâĂ©galitĂ© de tous et dĂ©noncent le droit de cuissage (droit du seigneur sur ses servantes) que veut appliquer le Comte, leur maĂźtre. Contre leur Ă©mancipation et leur union, se dressent ensuite le couple des intrigants : la vieille Marcelline et le docteur Bartolo venus se venger de Figaro⊠Puis quand surgit Cherubino, câest Cupidon qui sâinvite au banquet social : plus de serviteurs ni de maĂźtres, lâamour vainc tout et rend Ă©gaux tous devant la force du dĂ©sir. Ainsi si le Comte sâĂ©prend de Suzanne, si le jeune Cherubino dĂ©vore des yeux la Comtesse, câest dans la fable, pour mieux souligner le pouvoir de lâamour. En espĂ©rant baillonner lâattrait de ce Cupidon dangeureux Ă sa cour, le Comte lâenvoie dans lâun de ses rĂ©giments, sur un autre front, hors des antichambres du chĂąteau.
Acte II : PiĂ©ger le Comte. Lâun des airs les plus mĂ©lancoliques et sombres de Mozart (âPorgi amorâ : La Comtesse y exprime ses illusions et ses rĂȘves perdus, quand jeune fille, Rosina, elle Ă©tait aimĂ©e du Comte) ouvre le II. Pour se venger du Comte libidineux, Figaro propose de le piĂ©ger, dĂ©noncer son inconstance dĂ©loyale, le surprendre en sĂ©ducteur Ă©hontĂ© de Suzanne. Sommet de ce jeu de dupes, le trio âSusanna or via sortite !â, entre le Comte, la Comtesse et Suzanne), une scĂšne qui exploite au mieux le dĂ©roulement dramatique conçu par Beaumarchais dans sa piĂšce originelle : Ă son terme, le duo des femmes triomphent car le Comte doit reconnaĂźtre sa violence tyrannique et prĂ©senter ses excuses. Mais rebondissement contre le couple Figaro et Suzanne, le trio des intrigants, Marcelline et Bartolo rejoint par Basilio (sublime rĂŽle de tĂ©nor comico hĂ©roĂŻque) reparaĂźt exigeant que Figaro honore ses promesses (et Ă©pouse la vieille Marcelline!). La confusion qui conclut le II, est une synthĂšse de tous les ensembles buffas dâune trĂ©pidante vitalitĂ©.
Acte III. Le procĂšs de Figaro a lieu. Rebondissement : Marcelline qui devait lâĂ©pouser illico devant le juge Curzio, reconnaĂźt en Figaro son propre fils, quâelle eut avecâŠ. Bartolo. La Comtesse et Suzanne plus remontĂ©es que jamais, rĂ©dige la lettre dans laquelle Suzanne donne rendez vous le soir mĂȘme au Comte (pour le piĂ©ger et dĂ©noncer sa dĂ©loyautĂ© devant tous). Le Comte rĂ©ceptionne le billet et sâen rĂ©jouit.
LâActe IV sâouvre avec un nouveau solo fĂ©minin (Les Noces sont bien lâopĂ©ra des femmes) : sublime air de dĂ©ploration tendre de Barbarina qui pleure de ne pouvoir retrouver lâĂ©pingle quâelle devait remettre Ă Suzanne (âLâho perdutaâ). Profond et allusivement trĂšs juste, lâopĂ©ra dĂ©voile aussi lâamertume et le dĂ©sarroi de ses hĂ©ros : ainsi Figaro qui mĂȘme sâil sait le piĂšge tendu au Comte, doute un moment de la sincĂ©ritĂ© de Suzanne (superbe rĂ©citatif et lâair qui suit : âTutto Ăš dispotoâ⊠âAprite un poâ queglâocchiâŠâ). Lâouvrage de Mozart est ainsi ponctuĂ© de miroitement psychique dâune infinie vĂ©ritĂ© dont la sincĂ©ritĂ© nous touche particuliĂšrement. La nuit est propice aux travestissements et troubles de toute sorte : chacun croyant voir ce quâil redoutait, redouble de rage amĂšre Ă peine voilĂ©e (La Comtesse habillĂ©e en Suzanne est courtisĂ©e par ChĂ©rubin) : Suzanne, dĂ©guisĂ©e en Comtesse est abordĂ©e par Le Comte. Puis Figaro dĂ©masquant Suzanne en Comtesse, la courtise sans mĂ©nagement au grand dam du Comte qui surgit et criant au scandale face Ă son Ă©pouse indigne, sâagenouille finalement⊠reconnaissant sous le voile,⊠Suzanne quâil venait de courtisĂ©e. La Comtesse obtient alors le pardon du Comte, Ă dĂ©faut de la promesse de son amour. Car le lendemain, tout ce qui vient dâĂȘtre rĂ©tabli ne va-t-il pas se dĂ©faire Ă nouveau ? Lâinconstance rĂšgne dans le cĆur des hommesâŠ
Remarque : Rosina, Suzanna, mĂȘme gĂ©nĂ©ration. la tradition hĂ©ritĂ©e du XIXĂš remodĂšle (dĂ©nature) les rapports entre les personnages a contrario des tessitures dâorigine. Soulignons dans la partition voulue par Mozart, la gemmĂ©litĂ© des timbres des deux sopranos : la Comtesse et Suzanne. Les deux rĂŽles doivent en rĂ©alitĂ© ĂȘtre chantĂ©s par deux voix claires, peut-ĂȘtre plus sombre pour Suzanne. EpousĂ©e adolescente par Almavivva, Rosina devenue Comtesse est Ă peine plus ĂągĂ©e que sa camĂ©riste, Suzanne.