dimanche, juin 4, 2023

CRITIQUE, opéra. PARIS, TCE, le 14 nov 2022. OFFENBACH : La Périchole. Marc Minkowski / Laurent Pelly

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Pas moins de 10 dates pour aller applaudir l’une des productions les plus réjouissantes de l’année au Théâtre des Champs-Elysées : avec cette Périchole de haut vol, cela faisait longtemps que l’on avait entendu pareil public aussi enthousiaste au moment des saluts ! Il faut dire que la distribution réunie – en réalité une double distribution pour deux des trois interprètes principaux – se montre proche de l’idéal, jusque dans les moindres seconds rôles. Ainsi des excellents personnages de caractère, essentiellement parlés, tenus par les impayables Rodolphe Briand (Panatellas) et Lionel Lhote (Hinoyosa), de même que les trois cousines hautes en couleur, plus sollicitées au niveau chant, d’un niveau global superlatif. On aime aussi la prestation délirante d’Alexandre Duhamel (en alternance avec Laurent Naouri), méconnaissable en dictateur d’opérette d’une République bananière, qui offre un confort sonore gourmand à son rôle, à l’instar du choeur de l’Opéra national de Bordeaux, très bon connaisseur de l’ouvrage (voir notamment la production donnée à Bordeaux en 2018, dans la mise en scène de Romain Gilbert, ainsi que le disque enregistré dans la foulée par le Palazzetto Bru Zane).

Grande triomphatrice de la soirée, la Périchole de Marina Viotti (en alternance avec Antoinette Dennefeld) impressionne par son aisance scénique et sa prononciation parfaite, elle qui maitrise parfaitement la langue de Molière, malgré ses origines italophones. Moins connue dans nos contrées que son père Marcello et son frère Lorenzo, tous deux chefs d’orchestre, la Suissesse a remporté en 2015 le Prix international du Belcanto au festival Rossini de Bad Wildbad, avant d’être accueillie sur les plus grandes scènes, de Barcelone à Strasbourg, en passant par Lausanne, Genève et Milan. De quoi se délecter de ses intentions gorgées de couleurs, son émission souple et naturelle, sans parler de son timbre grave splendide. On espère la retrouver très vite dans ce répertoire, à l’instar de Stanislas de Barbeyrac (Piquillo), qui donne une leçon de classe vocale à force de précision dans l’articulation et les nuances de phrasés, toujours en lien avec les intentions de la mise en scène. Son talent comique explose ici avec une énergie parfaitement maitrisée, tant le ténor français semble prendre un plaisir communicatif à jouer les naïfs bourrus, ne forçant jamais le trait dans l’accent populaire des passages parlés.

L’attention à la prononciation est louable pour tous les interprètes, très à l’aise dans les parties théâtrales parlées : c’est là un grand atout pour faire vivre cette version aux dialogues raccourcis et modernisés par rapport à la version originale de 1874, grâce au travail réalisé par Agathe Mélinand (codirectrice, avec Laurent Pelly, du Théâtre national de Toulouse de 2008 à 2017). On retrouve précisément aux manettes de ce spectacle un couple phare de ce répertoire, en la personne de Laurent Pelly et Marc Minkowski, ce dernier donnant à l’ouvrage toute la vitalité de sa baguette, tour à tour tranchante et cinglante dans les parties endiablées, plus narratives et délicates dans les passages apaisés.

 

De quoi mettre en relief la transposition contemporaine de Pelly, qui insiste sur le fossé entre les masses populaires désargentées et débraillées avec l’élite manipulatrice : le renversement scénique n’est que plus spectaculaire au II, lorsqu’on passe des HLM déglingués aux salons venimeux, dont les velours chics et tocs évoquent une sauterie à venir. La farce, volontairement sombre, moque le comportement prédateur du Vice-Roi, tout autant que ses affidés, chiens de garde aussi superficiels que ridicules. Comme à son habitude, Laurent Pelly porte son attention sur le moindre protagoniste, aussi mineur soit-il, pour en développer le caractère par une gestuelle aux détails très travaillés : ainsi du choeur, très présent dans ses interactions avec les personnages principaux, mais aussi des rôles secondaires aux mimiques savoureuses, telles que les cousines délurées au I ou les courtisanes maniérées au II. Un grand spectacle à savourer jusqu’au 27 novembre prochain : courrez-y !

 

 

 

 

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CRITIQUE, opéra. PARIS, Théâtre des Champs-Elysées, le 14 novembre 2022. Offenbach : La Périchole. Marina Viotti, Antoinette Dennefeld (La Périchole), Stanislas de Barbeyrac (Piquillo), Laurent Naouri, Alexandre Duhamel (Don Andrès de Ribeira), Rodolphe Briand (Le Comte Miguel de Panatellas), Lionel Lhote (Don Pedro de Hinoyosa), Chloé Briot (Guadalena, Manuelita), Alix Le Saux (Berginella, Ninetta), Eléonore Pancrazi (Mastrilla, Brambilla), Natalie Pérez (Frasquinella), Chœur de l’Opéra National de Bordeaux, Salvatore Caputo (chef de choeur), Les Musiciens du Louvre, Marc Minkowski (direction musicale) / Laurent Pelly (mise en scène). A l’affiche du Théâtre des Champs-Elysées jusqu’au 27 novembre 2022. Photos : Vincent Pontet

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Précédente production élue « CLIC de CLASSIQUENEWS » :

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Tours, Opéra. Puccini : Madama Butterfly. Les 7,9,11,13 octobre 2015. Familier de l’Opéra de Tours, le metteur en scène Alain Garichot s’empare de la tragédie amoureuse qui met en scène la jeune japonaise Cio-Cio-San, abandonnée par son époux récemment rencontré, l’officier américain (Pinkerton), mais la jeune femme désoeuvree se voit contrainte au suicide par son sens de l’honneur, car le bel étranger qui l’avait épousée sans y croire, reparaît à Nagazaki mais au bras de sa véritable épouse américaine … Madama Butterfly est un drame exotique qui passionna Puccini. La force du sentiment exprimé dépasse le fait divers.  Après l’extase amoureuse et l’ivresse sensorielle d’un mariage de pacotille auquelle est seule à croire sincèrement, Cio Cio San bientôt enceinte, est condamnée à l’abandon et à l’attente… solitude, désespoir, trahison, humiliation sont les étapes d’un cœur juvénile et tendre qui avait cru à la sincérité des sentiments échangés avec l’époux étranger…

Exotique, l’opéra de Puccini écarte les ficelles et les clichés d’un orientalisme anecdotique ou simplement décoratif : comme Turandot, autre drame extrême oriental (qui se déroule en Chine et qu’il laissera inachevé), Puccini élabore un langage orchestral inouï par son raffinement instrumental et ses harmonies imprévues, aussi moderne et coloré que les partitions de Ravel et Debussy.

La force poignante de Butterfly, tragédie intime dessine une géographie personnelle et pudique que Puccini exprime avec une sensibilité inédite à l’opéra. De sorte que grâce à la musique, l’épisode devient drame universel. Les vertiges de la jeune japonaise atteignent convulsions et grandeur des héroïnes du grand opéra. Opéra événement à Tours et qui inaugure la nouvelle saison lyrique 2015-2016 du théâtre tourangeau.

Tours, Opéra. Puccini : Madama Butterfly

4 représentations à ne pas manquer

Mercredi 7 octobre 2015 – 20h00

Vendredi 9 octobre – 20h00

Dimanche 11 octobre – 15h00

Mardi 13 octobre – 20h00

Billetterie, ouverte du mardi au samedi : 10h-12h, 13h-17h45

02 47 60 20 20

theatre-billetterie@ville-tours.fr

Production Opéra de Tours

Décors, costumes et accessoires réalisés dans les ateliers de l’Opéra de Tours

Tragédia giapponese en trois actes

Livret de Luigi Illica et Giuseppe Giacosa

Création le 17 février 1904 à Milan

Editions Ricordi

Direction : Jean-Yves Ossonce

Mise en scène : Alain Garichot

Décors : Denis Fruchaud

Costumes : Claude Masson

Lumières : Marc Delamézière

Cio-Cio-San : Anne-Sophie Duprels

Suzuki : Delphine Haidan

Kate Pinkerton : Pascale Sicaud Beauchesnais

F. B. Pinkerton : Avi Klemberg *

Sharpless : Jean-Sébastien Bou

Goro : Antoine Normand

Oncle Bonze : Luc Bertin-Hugault *

Commissaire : Ronan Nédélec

Orchestre Symphonique Région Centre-Val de Loire / Tours

Choeurs de l’Opéra de Tours et Choeurs Supplémentaires

Présenté en italien, surtitré en français

* débuts à l’Opéra de Tours

Conférence Madama Butterfly de Puccini

Samedi 3 octobre 2015,  14h30

Grand Théâtre – Salle Jean Vilar

Entrée gratuite

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