samedi 20 avril 2024

Stravaganza: Schmelzer, Biber, Walther,Froberger,…1 cd Aparté

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Stravaganza (2011)

Concert à la Cour des Habsbourg
Biber, Froberger, Schmelzer, Walther

S’agirait-il d’un nouvel ensemble baroque à suivre ? Le programme défendu par les musiciens est déjà digne d’intérêt: Froberger, Schmelzer, Biber et Walther recomposent ici une généaolgie d’auteurs du premier baroque germanique qui ont façonné un certain goût musical à l’honneur à la cour des Habsbourg, politiques impérialistes et comme leur appétit de pouvoir, d’un faste déployé: la musique fait partie d’une propagande habilement favorisée.
A partir de Ferdinand III (couronné en 1637)-, chaque nouvel empereur est particulièrement mélomane, ce phénomène atteignant un degré optimal avec l’empereur Leopold Ier, autocrate éclairé avant l’heure et surtout compositeur, comme très amateur d’italianità (les fameux sepolcri, genre d’oratorios spécialement écrit pour lui à Vienne par les auteurs ultramontains).


le chant des instruments

La superbe Sonate Terzia de Schmelzer (figure majeure à Vienne à l’époque de Léopold Ier qui l’anoblit en 1673) indique le tempérament du maître de Biber, vrai prédécesseur de Mozart à Salzbourg au XVIIème siècle.
Biber quant à lui paraît évidemment avec un extrait des Sonates du Rosaire de 1678 (Crucifixion: le point culminant du cycle instrumental qui fait la synthèse de toute la pratique pour violon à son époque). Le lien entre politique et musicien est d’autant plus avéré et justifie la présent programme avec Froberger, protégé et estimé de Ferdinand III lequel finance ses déplacements formateurs en Europe, auprès de Frescobaldi en Italie ou Louis Couperin en France… rien de moins. La pièce de Froberger rend d’ailleurs hommage à la protection du souverain: la lamentation pour clavecin de 1678 a été composée par le compositeur à la mort de son royal mécène; c’est le miroir des vanités, grandeurs et fragilité d’une dynastie impériale à la fois, vaniteuse et humble…

Virtuosité et intériorité… telle serait aussi la magique alliance portant le jeu de Walther, mort en 1717 et qui contemporain de Biber, aurait été à son époque le Paganini du XVIIè: l’éloquence de Walther s’exprime et se réalise dans l’imitation du chant des animaux, et des autres instruments que le violon. La Suite n°8 de 1688 fait entendre ce geste libre et fantaisiste d’une liberté inouïe capable de faire évoluer, comme Biber, le jeu baroque du violon.

Schmelzer, Biber, Walther… ne serait ce que ces trois noms, la ligne artistique du programme exige le meilleur des interprètes tant les trois compositeurs concernés furent aussi des violonistes hors normes: singuliers, uniques, inclassables…

Sous l’impulsion du claveciniste Thomas Soltani (entre autres), le jeune ensemble français Stravaganza éblouit littéralement dans ce programme audacieux, exigeant, musicalement virtuose. La sureté du geste mis en accord avec l’ambition et les difficultés du programme sont outre un hommage aux maîtres compositeurs allemands du XVIIè, surtout la confirmation d’un collectif saisissant par son engagement, son tempérament, une évidente complicité lumineuse à l’esprit tranchant voire frondeur (il en faut pour aborder ce fantasque tout azimut d’un Biber par exemple, ou l’humeur délirante d’un Froberger). Le jeu collectif est homogène et individualisé ; gageons que leur exploration des répertoires se réalise toujours avec autant de justesse musicale comme d’intelligence interprétative. On croirait revivre les années fastes où les premiers baroqueux s’appropriaient les oeuvres inédites de la constellation baroque, – les défaillances techniques et les écarts sonores comme les aspérités hurlantes… en moins. C’est dire toutes les promesses que laissent envisager ce jeune et superbe nouveau cercle de musiciens à la sensibilité vive et contagieuse. A suivre.

Ensemble Stravaganza: Concert à la Cour des Habsbourg. Biber, Froberger, Schmalzer, Walther… 1 cd Aparté AP041, enregistré en avril 2011 et 2012.

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