mardi 19 mars 2024

Opéra de Tours : Le Barbier de Séville par Pelly et Pionnier

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rossini-portrait-gioachino-rossini-bigTOURS, Opéra. 29 janv – 2 fév 2020. ROSSINI : Le Barbier de Séville. Rossini, après avoir traité le genre seria, s’affirme réellement dans la veine du melodramma buffo (et en deux actes) comme l’atteste la réussite triomphale de son Barbier de Séville, d’après Beaumarchais, créé au Teatro Argentina de Rome, en février 1816. Fin lui aussi, mordant et d’une facétie irrésistible par sa verve toute en subtilité, le compositeur se montre à la hauteur du drame de Beaumarchais : il réussit musicalement dans les ensembles (fin d’actes) et aussi dans le profil racé, plein de caractère de la jeune séquestrée, Rosine : piquante, déterminée, une beauté pleine de charme… Comment le jeune comte Almaviva réusira-t-il à libérer la belle Rosina des griffes de son tuteur âgé (Bartolo) qui a décidé de séquestrer la jeune femme pour mieux l’asservir puis l’épouser ? Grâce à la complicité du factotum de Séville, Figaro, jeune âme aussi conquérante et positive… leur duo, tout en facétie et ingéniosité, est l’agent de libération. Rossini… féministe ? Deux hommes redoublent de saine entente, de jubilante inventivité pour émanciper la prisonnière. Leurs talents qui allie grâce, jeunesse, astuces s’entend dans la musique du jeune Rossini (24 ans), dont l’orchestration et le génie mélodique exprime une même pétillance. Ici c’est l’insolence et l’esprit de conquête d’une jeunesse sûre d’elle qui s’affirme contre le vieil ordre. Rossini met en musique l’épisode inspiré de Beaumarchais et qui précède ce que Mozart avant lui avait mis en musique avec la complicité de Da Ponte, Les Noces de Figaro : après l’élan du désir naissant lié à la libération de la belle séquestrée, Almaviva, tyran domestique harcèle la servante Suzanne et délaisse Rosina, devenue comtesse négligée… Pour l’heure en 1816, retentit la formidable rire et la finesse d’un Rossini d’une précoce maturité.

Avec le Figaro de Guillaume Andrieu, la Rosina d’Anna Bonitatibus… Direction musicale : Benjamin Pionnier / mise en scène : Laurent Pelly.
3 représentations événements à l’Opéra de Tours, les 29, 31 janvier puis 2 février 2020.

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Opéra de Toursboutonreservation
Mercredi 29 janvier 2020 – 20h00
Vendredi 31 janvier – 20h
Dimanche 2 février – 15h

RÉSERVEZ :
http://www.operadetours.fr/le-barbier-de-seville

 

 

 

 

Direction musicale : Benjamin Pionnier

Mise en scène, décors et costumes : Laurent Pelly
Lumières : Joël Adam

Figaro : Guillaume Andrieux
Rosina : Anna Bonitatibus
Comte Almaviva : Patrick Kabongo
Bartolo : Michele Govi
Basilio : Guilhem Worms
Berta : Aurelia Legay
Fiorello : Nicholas Merryweather
Ambrogio et Notaire : Thomas Lonchampt

Choeur de l’Opéra de Tours
Orchestre Symphonique Région Centre-Val de Loire / Tours

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Melodramma buffo en deux actes
Livret de Cesare Sterbini d’après Le Barbier de Séville de Beaumarchais
Créé au Teatro Argentina de Rome le 20 février 1816

Coproduction Théâtre des Champs-Elysées – Opéra National de Bordeaux –
Opéra de Marseille – Théâtres de la Ville de Luxembourg – Opéra de Tours – Stattheater Klagenfurt

Durée : environ 2h30 avec entracte

Conférence gratuite
Samedi 25 janvier – 14h30
Grand Théâtre – Salle Jean Vilar
Entrée gratuite – réservation recommandée
places limitées

Grand Théâtre de Tours
34 rue de la Scellerie
37000 Tours

02.47.60.20.00

Billetterie
Ouverture du mardi au samedi
10h30 à 13h00 / 14h00 à 17h45

02.47.60.20.20
[email protected]

 

 

 


Après PAISIELLO, Le Barbier de ROSSINI…

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barbier-de-seville-rossini-opera-de-tours-pelly-pionnier-classiquenews-opera-annonce-critique-classiquenews34 ans avant l’opéra de Rossini, en sept 1782, Paisiello, alors auteurs en vogue, crée au Théâtre de l’Ermitage de Saint-Pétersbourg et à la demande de sa protectrice Catherine II, Il barbiere di Siviglia, ovvero La precauzione inutile. Inspiré de Beaumarchais, le dramma giocoso suscite un succès immédiat. Car Paisiello trouve l’écho musical juste à la verve et l’impertinence de l’écrivain français. C’était compté sans le Barbier du jeune Rossini, de 1816. A peine âgé de 25 ans, Rossini baptise d’abord sa partition « Almaviva » du nom du Comte, complice de Figaro, – précaution respectueuse pour Paisiello pour ne pas créer de confusion entre les deux ouvrages. La première le 20 février 1816 au Teatro Argentina de Rome, est un fiasco.
Tout dans la musique de Rossini indique a volonté de rompre avec l’ancien monde et le style ancien : quand Rosina, belle séquestrée par son tuteur Bartolo qui veut l’épouser, chante le rondo de l’opéra factice, L’Inutil precauzione, la jeune femme revendique à la barbe de son géolier, et en présence d’Almaviva déguié en prof de musique, sa liberté et son désir d’émancipation (leçon de chant à l’acte II, scène 3). Ridiculisé le vieux barbon, use de stratagèmes éculés (inutiles précautions comme le clame Rosina de facto) : il ne peut empêcher les deux amants, Rosina et Almaviva, de se marier, grâce aussi à l’intervention de l’astucieux Figaro. Le Comte Almaviva, d’abord déguisé sous son nom de Lindoro, et aussi du professeur de musique comme on l’a vu, peut dérober à Bartolo, la fiancée qu’il s’est choisie.
La séquestration qu’impose Bartolo est bien celle d’un monde autoritaire et phalo, voire misogyne que Rossini exacerbe par sa musique pétillante. La puissance et l’imagination de l’écriture montrent l’audace d’un Rossini qui synthétise alors tous les opéras buffas napolitains précédents; en extrait l’essence de liberté et de sédition, sans omettre le miel d’une séduction irrésistible qui passe par l’amplification de la partie dévolue au chœur, comme le raffinement de son orchestration.
Héros de cette énergie révolutionnaire, Figaro chante dès le début son Largo al factotum… air démesuré, libre, délirant, … inouï en vérité, car jamais entendu auparavant. Figaro c’est Bacchus ou Mercure : un être hors normes, un génie de l’action intelligente dont les malices et les astuces emportent toute l’action, et la précipitent même pour le dénouement de la situation qui contraint Rosina. Le jeune comte Almaviva s’allie à ce personnage haut en couleurs, et profite de l’intelligence de Figaro. De son côté, la vielle servante Berta, du fait de son âge, est prête à « crever » hors de ce mouvement libertaire : un beau contraste avec le Figaro libre et brillant. Elle fustige le danger de la liberté, agent du chaos : le final du Ier acte est dans ce sens aussi orgiaque et frénétique que l’opéra précédent L’Italienne à Alger (1813 : présentée en février 2019 à l’Opéra de Tours). Comme dans les Noces de Figaro de Mozart, Rossini imagine alors dans un tutti assourdissant par son brio, chaque personnage réfléchissant à haute voix sur sa situation personnelle, empêchée, contrainte, atteinte…

 

LAURENT PELLY
La musique pilote l’action…

Mais ici les plus délurés et les plus fantaisistes sont vocalement les mieux caractérisés ; cette passion de la virtuosité porte l’intelligence et l’impertinence de Rossini lui-même, alors maître de son art. Dans cette émulation d’une jeunesse volubile : où perce l’acuité savoureuse du trio Rosina / Landoro,Almaviva / Figaro, soit le futur trio romantique principal chez Verdi (soprano, ténor, baryton)-, se distingue d’autant mieux la vieillesse bilieuse de l’infect Bartolo.

Le metteur en scène Laurent Pelly aime les ressources théâtrales des partitions lyriques : il sait en extraire les rebonds, la drôlerie, l’intelligence active. Ce discernement fait la saveur de ses lectures des opéras des faiseurs de comédies, génies reconnus tels Offenbach, Rossini… La verve et l’imagination l’inspirent. C’est le cas des ouvrages giocosos de Rossini. Pelly suit la tempête musicale qui imprime à l’action ses accents et ses jalons dramatiques.
Il imagine alors un décor fait de partitions où les acteurs habillés de noir incarnent les notes sur les mesures… pour autant la musique n’inféode pas le théâtre car le metteur en scène recherche un équilibre entre les deux. Derrière la virtuosité, Pelly traque et révèle la facétie voire le poésie des situations. Chaque profil est affiné selon sa sensibilité propre : FIgaro est un gangster sympathique qui tire les ficelles de chaque rencontre / confrontation ; Almaviva, un doux amoureux ; … Souvent Pelly revient à la source du livret et préfère tel aria plutôt qu’un autre, surtout si l’habitude est de le couper. Ainsi l’air terrible de la vieille Berta. La virtuosité des airs dans les finales en particulier dévoile en réalité un drame intime que Pelly entend rendre manifeste. Il y a donc de la profondeur et de l’intime dans ce qui paraît ailleurs bien souvent comme agile et artificiel.
Première vertu, et si appréciée chez lui : le respect de la partition originale « Je suis un artisan au service de l’œuvre. Je n’ai pas de concept à faire entrer au forceps, c’est l’œuvre qui commande «  rappelle-t-il. Toujours dans le respect de l’œuvre, faciliter et expliciter le jeu de l’acteur chanteur. Année buffa assoluta en 2017 pour Pelly qui cette année là, livre sa vision de Viva la mamma de Donizetti à Lyon et met en scène Le Barbier de Séville de Rossini au TCE Paris. L’Opéra de Tours a bien raison de présenter aux tourangeaux, l’une des mises en scène de Laurent Pelly les plus astucieuses et les plus rythmées.

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