samedi 20 avril 2024

Liège. Opéra Royal de Wallonie, le 30 avril 2008. Gaetano Donizetti: Maria Stuarda. Patricia Ciofi, Marianna Pizzolato.

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Après la légende bretonne, « Le roi d’Ys », l’Opéra Royal de Wallonie nous offre un mythe anglais. Pour cette narration du conflit entre Élisabeth 1ère et sa cousine, Marie Stuart, la performance présentée par la scène liégeoise exhauce largement nos attentes. Un orchestre vif, dirigé par Luciano Acocella, plein d’enthousiasme et de conviction, aux cordes émouvantes, touchantes et troublantes, aux percussions intenses (quelques dérapages et épaisseurs cependant, soulignant les coups de théâtre), aux vents angoissants et inquiétants. La fosse n’a quasiment jamais manqué à son rôle d’accompagnement et de soutien de la tension dramatique.
Et quelle tension ! Soulignée par des décors justes, simples mais pas simplistes, restituant parfaitement l’atmosphère, ici d’une salle d’un palais, là d’un havre de paix sylvestre, là encore d’une geôle austère, tel un tunnel menant à la mort… Autres arguments à cet accomplissement visuel, les costumes: hauts en couleurs, en diversité et en nuances. Ils conviennent à toute situation, et soulignent la majesté d’Elisabeth, et la chute de Marie.


Le feu incandescent et l’intensité dramatique de Patrizia Ciofi
, suffisent à la réussite entière de la production. Son incarnation de Marie Stuart laisse l’âme nouée, le cœur transporté, par les notes extraordinaires, la présence scénique, la force d’expression et l’aisance avec laquelle la fière jeune femme s’exprime face à sa cousine, Elisabetta, interprétée par Marianna Pizzolato. Celle-ci n’est pas en reste. Le jeu et le style rehaussent encore l’excellence de la prestation de ce duo irrésistible: aux intonations tantôt fermes et puissantes, tantôt sensibles et nuancées, répond l’instinct d’une femme qui oublie parfois la réserve et la mesure qu’exige son rang de souveraine. Chaque soprano convainc dans la rondeur et la violence contrastée, autant dans les mots projetés que dans les intonations ciselées. Ajoutons que l’accompagnatrice de Marie, Diana Axentii, à la voix intense, dont la force s’est développée au fur et à mesure de l’intrigue et des airs entonnés avec une superbe sensibilité, n’était pas non plus en retrait.
Et les hommes? Leur prestation préserve le niveau général: chacun à sa manière – la spontanéité et la fluidité du ténor Danilo Formagia, en comte de Leicester; la roideur et la solennité de la basse Mario Cassi en Lord Cecil, infrangible soutien à Élisabeth; le beau et doué baryton Federico Sacchi en Talbot… – a pu offrir de splendides ensembles. Si les voix, au début, étaient un peu hésitantes, le jeu était déjà remarquable d’expression mesurée.

Les chœurs – dirigés pour la dernière fois par Édouard Rasquin –
se font un très bel écho de la situation, souligné par la mise en scène vive et efficace de Francesco Esposito qui le fait intervenir à bon escient et dans des déplacements adéquats. Mis à part le plancher grinçant, dont on ne peut rien arranger, il faut se demander l’importance et la signification des figurants. Très nombreux, mais pas toujours très ordonnés, ils ont parfois causé une curieuse impression d’amas grégaire, sans vraie vocation. Nonobstant, dans maints tableaux, le mouvement des figurants accentue souvent la passion conflictuelle des héroïnes, la poussant à l’extrême dans l’exacerbation des sentiments.
Saisis par la prestation des solistes, nous n’allons pas bouder notre plaisir – notre joie, même, en dépit du caractère tragique de la partition. Mis à part, les petites réserves énoncées, la production s’inscrit de façon mémorable: quelques uns, parmi le public, parlaient « du meilleur opéra de la saison ». Court, efficace, plein de caractère, de beauté et de personnalité, l’ouvrage ainsi dévoilé n’est pas loin de leur donner raison. A voir jusqu’au 11 mai 2008.

Liège. Opéra Royal de Wallonie. Le 30 avril 2008. Gaetano Donizetti: Maria Stuarda. Avec Maria Stuarda: Patrizia Ciofi, Elisabetta: Marianna Pizzolato, Anna Kennedy: Diana Axentii, Roberto Conte di Leicester: Danilo Formaggia, Giorgio Talbot: Federico Sacchi, Lord Guglielmo: CecilMario Cassi. Choeur et orchestre de l’Opéra Royal de Wallonie. Luciano Acocella, direction. Francesco Esposito, Mise en scène et costumes.

Consulter les informations et les dates disponibles sur le site de l’Opéra Royal de Wallonie.

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