jeudi 28 mars 2024

Ibert,Honegger: L’Aiglon, 1937. Jean-Yves OssonceLausanne, Opéra. Du 21 au 28 avril 2013Tours, Opéra. Les 17,19, 21 mai 2013

A lire aussi
Ibert, Honegger
L’Aiglon
1937

Lausanne, Opéra
Dimanche 21 avril 2013, 17h
Mercredi 24 avril 2013, 19h
Vendredi 26 avril 2013, 20h
Dimanche 28 avril 2013, 15h

Tours, Grand Théâtre Opéra
Vendredi 17 mai 2013, 20h
Dimanche 19 mai 2013, 15h
Mardi 21 mai 2013, 20h

Un Duc de 20 ans, aux ailes brisées…
Créé en 1937, l’opéra L’Aiglon évoque la carrière dérisoire du fils de Napoléon. Proclamé roi de Rome à sa naissance en 1811, Napoléon II « régna » quelques jours de 1815 ; mais si son père abdique en sa faveur, les Alliés préfèrent Louis XVIII. Après l’Empire, et ses aspirations décevantes, retour de la monarchie. A Vienne, le jeune héritier encombrant, devient le duc de Reichstadt, et vit cloîtré au Palais de Schönbrunn, auprès de son grand-père maternel François II, empereur d’Autriche, sous la surveillance étroite voire obsessionnelle du ministre Metternich…
Le texte de Rostang brosse son portrait en 1831, lorsque les révolutions libertaires européennes laissent espérer un nouveau monde, débarrassé des despotismes monarchiques pour… le retour du fils de Napoléon. On lui fait miroiter de vaines illusions de pouvoir : il a alors 20 ans, l’âge de toutes les illusions et de toutes les manipulations.
Trop occulté par l’ombre du père, Napoléon Bonaparte, soumis voire humilié par l’intraitable chancelier Metternich, le jeune homme meurt à propos, de tuberculose en 1832.
Le fils de Napoléon Ier avait-il réellement un destin ?
La littérature et le musique s’empare de sa figure devenue mythe. L’Aiglon, ce jeune absolu politique aux ailes brisées inspire à Rostand une figure marquée par la vanité, l’amertume d’un destin sacrifié aux espérances politiques avortées…, un personnage théâtral proche d’Hamlet ; aux compositeurs, Ibert et Honegger, un ouvrage écrit à quatre mains, entre Puccini et Debussy au dramatisme formaté à l’échelle d’une tragédie politique sauvage, violente et aussi tendre.
«  L’un a écrit les bémols, l’autre les dièses !  » disaient les deux musiciens très complices . Dans les faits, chacun a traité les actes selon son tempérament : pudeur et intériorité des actes I et V pour Ibert ; action contrastée des II et IV pour Honegger ; quand le III les associe totalement.

Après le succès de Cyrano de Bergerac (1897), Edmond Rostand écrit en 1900, L’Aiglon. La pièce est créée au Théâtre Sarah-Bernhardt à Paris, le 15 mars 1900. Sarah Bernhardt, dans le rôle-titre, pour laquelle Rostand a déjà écrit La Princesse lointaine en 1895 et La Samaritaine en 1897, éblouit par sa verve dramatique, sa profondeur tragique. A 56 ans, incarnant un jeune homme de 21 ans, l’actrice embrase les planches : elle assure le triomphe immédiat de la pièce. Les parisiens marqués par la Commune, la défaite de 1870 (perte de l’Alsace Lorraine), restent sensibles à l’exacerbation d’un sentiment français et patriote autour des figures historiques surtout tragiques. La figure de Napoléon II qui réactive la flamme impériale de son père Bonaparte répond à l’amertume et la frustration du temps. Même amputée d’une jambe, la tragédienne rehausse le lyrisme nationaliste du texte avec un tempérament frappant. Elle jouera le rôle plus de 1000 fois.
A la demande de Raoul Gunsbourg, directeur de l’Opéra de Monte-Carlo, le librettiste Henri Cain adapte le texte de Rostang en un livret digne d’Homère (1936). L’intrigue est resserrée (5 actes au lieu des 6 originels).
Cain suit l’intrigue de Rostand avec scrupule, insistant sur l’évolution tragique du personnage central: au II, brille le feu du monologue de Metternich, un acte à la fois vindicatif et sadique à l’encontre du Fils trop menaçant… ; au III, l’action se passe à Schönbrunn (bal des les ruines romaines); au IV, le titre « les ailes brisées » indiquent clairement le destin avorté de l’Aiglon: c’est par la mort du vieux grognard nostalgique Flambeau, une évocation de Wagram, ancienne victoire napoléonienne qui réactive la légende et l’épopée du père fondateur (contrepoint sur des motifs de La Marseillaise et du Chant du départ). Le V (  » les ailes fermées « ) met en scène la mort de Napoléon II alors alité, désormais voué à la mort.
A l’été 1936, Ibert et Honegger composent la musique, dans un style  » images d’Epinal «  selon leurs propres termes. Duo complémentaire qui conjuguent idéalement la tendresse gracile d’Ibert et l’héroïsme d’Honegger. La présence des mélodies d’époque ajoutent au folklore volontairement restitué (dans le V : vieilles chansons françaises, telles que : Il pleut, il pleut bergère, Nous n’irons plus au bois, Sur le pont d’Avignon et Il était un p’tit homme, tout habillé de gris…). A sa création à l’Opéra de Monte Carlo le 11 mars 1937, L’Aiglon suscite un très grand succès.

L’Aiglon selon Ibert et Honegger

De la même génération, les deux auteurs soulignent ce qui leur a été essentiel dans ce projet d’écriture associée: composer un opéra « populaire et direct ».
 » Le drame de Rostand ne présente-t-il pas le caractère idéal d’une œuvre susceptible de toucher et d’émouvoir tous les publics, sans cesser d’être
une œuvre d’art ?  »
De leur aveu, les deux compositeurs admirateurs de la prose de Rostand en déduisent une musique propre.
Ainsi pour  » ceux qui ont vu L’Aiglon avec Sarah Bernardt, la symphonie
verbale que présente le tableau de Wagram, les bruits de coulisse, et le génie même de l’interprète, n’ont jamais produit l’effet qu’en espérait le poète. Or, ce tableau, entre autres, nous est apparu offrir d’exceptionnelles possibilités musicales qui, loin d’en contrarier l’effet, pouvaient lui conférer toute sa puissance et sa véritable atmosphère. La critique, après les représentations de Monte-Carlo, a bien voulu reconnaître à notre partition une certaine unité assez surprenante, étant donné la différence que l’on s’accorde à trouver à nos tempéraments.  » précisent Ibert et Honegger dans un article du Figaro daté de 1937.

L’Aiglon. Drame musical en cinq actes
Jacques Ibert (1890-1962) et Arthur Honegger (1892-1955)

D’après la pièce d’Edmond Rostand adaptée par Henri Caïn

Première représentation à l’Opéra de Monte-Carlo à Monaco, le 11 mars 1937

Première suisse le 3 mars 1953 au Grand-Casino de Genève

Production de l’Opéra de Marseille

Distribution

Le Duc de Reichstadt Carine Séchaye
Séraphin Flambeau Marc Barrard
Le prince de Metternich Franco Pomponi
Le maréchal Marmont Benoît Capt
Frédéric de Gentz André Gass
L’attaché militaire français Christophe Berry
Le chevalier de Prokesch-Osten Sacha Michon
Thérèse de Lorget Carole Meyer
Marie-Louise duchesse de Parme Marie Karall
La comtesse Camerata Céline Soudain
Fanny Elssler Antoinette Dennefeld

Orchestre de Chambre de Lausanne
Chœur de l’Opéra de Lausanne dirigé par Véronique Carrot

Direction musicale : Jean-Yves Ossonce
Mise en scène Renée Auphan,
D’après la production de Patrice Caurier et Moshe Leiser

Informations pratiques

OPERA DE LAUSANNE
Avenue du Théâtre, CP 7543, 1002 Lausanne
Accès : parking Bellefontaine (tarifs préférentiels pendant les spectacles)
Transports publics, arrêt Georgette
Tél. administration : 021 315 40 40

BILLETTERIE
A l’Opéra de Lausanne par téléphone du lundi au vendredi de 12h à 18h
Attention nouvelle numérotation : 021 315 40 20
Vente en ligne : www.opera-lausanne.ch
Carte d’abonnement en ligne sur notre site ainsi qu’à la billetterie.

Synopsis
Le livret d’Henri Cain regroupe plusieurs actes de la pièce de Rostang afin de resserrer l’action global et réussir la continuité lyrique de l’opéra d’Ibert et de Honegger.


Personnages

L’Aiglon [duc de Reichstadt]
Thérèse de Lorget, dame d’honneur et lectrice de Marie-Louise
Marie-Louise [de Habsbourg-Lorraine], duchesse de Parme et ancienne impératrice de France, mère de l’Aiglon, remariée au général von Neipperg
La comtesse Camerata, fille d’Elisa Bonaparte, sœur de l’Empereur
Fanny Elssler, célèbre danseuse viennoise, maîtresse de Frédéric de Gentz
Isabelle, le Manteau vénitien
Flambeau, vieux «grognard»
Metternich, prince et chancelier de l’Empire d’Autriche après Waterloo
Marmont, maréchal de France
Frédéric de Gentz, diplomate autrichien, conseiller et ami de Metternich
Le chevalier de Prokesch-Osten, militaire et l’un des rares amis autrichiens du duc de Reichstadt
L’attaché militaire français
Arlequin
Un Polichinelle
Un Gilles

Acte I
« Les ailes qui s’ouvrent » – musique de Jacques Ibert.
Schönbrunn, Salon des Laques, en 1831.

Pendant un bal, deux antibonapartistes forcenés discutent dans un salon : le conseiller Frédéric de Gentz et le chancelier Metternich. Il faut retirer l’effigie du duc de Reichstadt sur une fiole de parfum importée de Paris: les Français ont encore la nostalgie de l’idéal napoléonien. Survient l’ex Impératrice Marie-Louise qui invite sa nouvelle dame d’honneur Thérèse de Lorget à lire Les Méditations
de Lamartine : Courage, enfant déchu d’une race divine… paraît alors l’Aiglon, d’une tristesse silencieuse.
Mais la révolution de 1830 fait espérer le retour de l’ordre républicain contre la monarchie : le jeune homme sent une espérance se préciser.
D’autant que parmi ses soutiens à Vienne, le valet Flambeaux (ancien grenadier bonapartiste) tente d’organiser une fuite vers la France…

Acte II
« Les ailes qui battent » – musique d’Arthur Honegger.
Même décor qu’à l’acte précédent.

Au cours de sa ronde de nuit, Metternich remarque le chapeau de l’Empereur, en fait le signal choisi par Napoléon II pour s’enfuir de Vienne : l’Autrichien exprime sa haine et sa crainte face aux Napoléonides. Survient le Duc de Reichstadt que le vieux ministre tente de déstabiliser définitivement dans une scène particulièrement forte et sauvage. Il le manipule et l’ensorcèle même afin de le perdre : le jeune homme brise le miroir où il se voit et appelle à l’aide, confirmant l’ascendant triomphal de Metternich, son sadisme inquiet tenté de peur trouble…

Acte III

« Les ailes meurtries » – musique d’Arthur Honegger et Jacques Ibert (suite de valses). Le parc de Schönbrunn.

Au milieu des valses d’un bal masqué, le jeune duc cherche un idéal: Thérèse qui l’aime, ou un dessein digne de son nom ? En moquant son costume de petit colonel français, Metternich ravive l’orgueil du jeune homme. Il veut marcher sur les pas du petit caporal Bonaparte. Paraît la célèbre danseuse viennoise Fanny Elssler, maîtresse de Frédéric de
Grentz antibonapartiste virulent. Le plan de la fuite se précise : les conjurés se retrouveront sur la mythique plaine de Wagram, lieu de la victoire napoléonienne.

Acte IV
« Les ailes brisées » – musique d’Arthur Honegger. La plaine de Wagram.

Avec Flambeaux, le Duc attend les chevaux pour rejoindre la France. Mais Metternich est déjà à leurs trousses. Flambeau se blesse mortellement et pour adoucir son agonie, Reichstadt évoque avec passion en une vision puissante la bataille de Wagram faisant croire à son fidèle compagnon qu’il y meurt bel et bien. Dans l’évocation des armes et des combats, Honegger ajoute la Marseillaise et le Chant du départ. Le destin du Fils semble scellé: l’épopée napoléonienne se cantonne désormais à une évocation brumeuse qui dévore toute tentative de revanche.

Acte V
« Les ailes fermées » – musique de Jacques Ibert. Schönbrunn, chambre du duc de Reichstadt, en 1832.

La bataille de Napoléon II est celle qu’il mène contre Metternich dans les salons de Schönbrunn. Mais les dés sont jetés et l’issue, inexorable. A son chevet, se presse sa mère Marie-Louise en larmes, et Thérèse qui chante de douces chansons de
France. Dans l’ombre, Metternich observe, surveille jusqu’au dernier souffle de l’Aiglon dont les espoirs ont été vains. Pourtant fauché à 21 ans, sa jeunesse le rend éternel : sa légende peut naître, il a rejoint son père.


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