Le
Dictionnaire Wagner 2010
en publiant
ce dictionnaire encyclopédique Wagner, d’autant plus
utile au moment où
l’Opéra national de Paris propose une nouvelle intégrale du Ring (L’Or
du
Rhin jusqu’au 28 mars 2010 puis La Walkyrie en mai
prochain, avant
Siegfried et Le Crépuscule des dieux pour la saison
2010-2011).
2.496 pages sont
nécessaires pour exprimer la diversité des facettes de la « totalité »
wagnérienne. Le Wagnérisme a immédiatement exercé dans l’histoire de la
musique et au sein des esthétiques contemporaines puis postérieures à
Wagner, son parfum entêtant, ses haines et ses passions… ses discours,
analyses, débats souvent captivants et partisans sur la question
théâtrale, politique, musicale…
Parmi les sujets développés, notons la place des écrivains fascinés et
agacés par la musique wagnérienne (Nietzsche, Wolf, Woolf, Yeats,
Zola,), les propagandistes atteint de wagnérite aiguë qui favorisent
l’adoration au maître (Wessling, Wolzogen), les musicologues wagnériens
(Westernhagen, Whittall), les villes que le destin du compositeur a
croisé (Bayreuth, Berlin, Tribschen, Zurich), les grands interprètes à
la scène (Crespin, Vickers, Windgassen…),…
Le lecteur y apprend, en collectant çà et là, de précieux éclaircissement, ce qui distingue de nombreux personnages de Parsifal, de la Tétralogie (on devrait à vrai dire plutôt parler de Trilogie avec Prologue) ou des opéras antérieurs: ce qui caractérise chaque profil dramatique et psychologique, ce qui explique comment parfois on a pu se tromper dans leur traitement à la scène au risque de les réduire dangereusement: ainsi, Amfortas, Parsifal, Titurel, Loge (dieu de la ruse et du feu), Mime, Melot, Lohengrin, Tannhaüser, Wotan, Brunnhilde… et combien d’autres.
Saluons l’ouverture des entrées qui engendrent chacune, un développement complémentaire aux autres: « oeuvre d’art totale dans la France de l’Entre-deux-guerres » (où est analysée la portée du concept de théâtre total sur la scène française, chez Ravel et Roussel, Milhaud puis Honegger…), « L’opéra après Wagner », … même les écrits du maître sont scrupuleusement présentés, soulignant leur argumentation et apports non moins décisifs sur le plan des idées et de l’esthétisme: lire par exemple l’article sur « Opéra et drame » de 1851 (Oper und drama), « opus magnum » du théoricien Wagner sur son oeuvre propre et sur l’opéra en général. De même, le lecteur se portera avec bénéfice à l’article « portraits de Wagner » afin de se constituer sa propre iconographie désormais raisonnée du fondateur de Bayreuth, à partir de ses portraits reconnus, réalisés de son vivant et après sa mort… sans omettre la scrupuleuse icône officielle, produite sous le contrôle de l’intraitable Cosima, par Lenbach en 1871 où Wagner, béret sur la tête scrute les lointains en un regard visionnaire, habité, partagé par tous les élus ou grands créateurs… par contre aucune mention ni commentaire sur le portrait en couverture du dictionnaire, Wagner par Giuseppe Tivoli, dont le dessin outre ses références aux peintres de la Renaissance dont Dürer, se réfère en effet au prototype institué par Lenbach…
Les questions délicates sont également traitées: nazisme, antisémitisme,
antiwagnérisme, la perception de Wagner en Allemagne, … Passionnantes
et complémentaires voire originales les entrées « Anarchisme »,
« Bouddha », « Bourgeoisie », « Capitalisme », « Chant wagnérien »,
« chromatisme », « Communisme », « Eros et Thanatos », « France »… « Pensée
politique », « Lieux où vécut Wagner »… « Temps », « video », … La trentaine de collaborateurs participant à cette somme incontournable
approche l’oeuvre et sa signification en quelque 4.000 entrées. Lecture hautement recommandée.
Dictionnaire encyclopédique Wagner. Editions Actes Sud /
Cité de la
musique. Sous la direction de Timothée Picard. 2.496 pages. Parution:
mars 2010. Prix indicatif: 79 euros
