vendredi 19 avril 2024

CD, compte-rendu critique. Haydn 2032, N°4 : « Il Distratto ». HAYDN : Symphonies n°60, 70, 12. CIMAROSA : Il Maestro di Cappella. (Giovanni Antonini,1 cd Alpha classics 2016)

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antonini giovanni telemann giardino armonico presentation classiquenewsCD, compte-rendu critique. Haydn 2032, N°4 : « Il Distratto ». HAYDN : Symphonies n°60, 70, 12. CIMAROSA : Il Maestro di Cappella. (Giovanni Antonini,1 cd Alpha classics 2016). Suite de l’intégrale des 107 Symphonies de Haydn en vu du tricentenaire Haydn prévu en 2032… Ce nouveau volet hisse très haut la valeur du cycle en cours. Outre la justesse de vue du chef Giovanni Antonini, il s’agit aussi de mettre en perspective Haydn et les auteurs de son époque : la filiation ainsi proposée avec le théâtre fin et savoureux de Cimarosa, réalise un cocktail explosif et indiscutablement pertinent. On aime de tels programmes audacieux, imprévus, capables de réformer nos idées réçues sur le Haydn symphoniste que l’on croit connaître ; servi ici par des interprètes jubilatoires, ayant pour devise, une qualité rare chez les artistes des répertoires baroques et romantiques aujourd’hui : la finesse.

haydn 2032 il distratto symphonies 12 cimarosa maestro di cappella giovanni antonini cd review cd critique classiquenews CLIC de classiquenews mars 2017Des 3 symphonies ici traitées, ne prenons qu’un épisode emblématique. Non pas la première de la sélection, n°60 qui donne son nom au programme (conçue pour la comédie intitulée « Il Distratto »), mais nous préférons demeuré sur notre excellente impression, produite par l’Adagio de la n°12 qui s’impose par sa profondeur et son rayonnement simple. Sublime introspection (plage 12), tel un désert sans issue et au cordes seules, qui touche par son épure quasi austère ; la respiration, les dynamiques, l’économie et le sens des phrasés sont d’une irrésistible justesse. Antonini y glisse un spuçon de tendre nostalgie qui assimile cet épisode frappant par son intériorité maîtrisée à une variation gluckiste, le Gluck sublimement déploré et lacrymal, c’est à dire pudique et mélodique à la fois, de la prière d’Orphée et son hymne désespéré mais digne : « J’ai perdu mon Eurydice ». Haydn semble en déduire une interrogation en résonance. Quel contraste avec l’Allegro insouciant et délicatement caractérisé (hautbois, bassons) qui suit.

Un orchestre d’instruments acteurs, un opéra où le chant instrumental est partenaire du chanteur soliste…

cimarosa domenicoLa vivacité et l’intelligence habite le Cimarosa révélé (Il Maestro di Cappella), dès son ouverture (plage 14) d’une poésie naturelle et infiniment subtile. A la source de Cimarosa, sphynx européen qui fut joué dans toute l’Europe des Lumières, affirmant l’essor de la veine napolitaine, découle les opéras buffas et les perles comiques de Hadyn, justement, Mozart, et aussi Salieri, ainsi que l’a récemment démontré un excellent enregistrement de La Scuola degli Gelosi, lui-même source pour les Nozze et le Cosi mozartiens. Construit comme une vaste cantate pour voix seule (baryton), avec ouverture, en deux recitatifs et deux airs, Il Maestro di Cappella, permet à Cimarosa d’épingler l’art musical lui-même en brossant le portrait d’un chef d’orchestre, d’une verve imaginative flamboyante à la quelle répond la vitalité expressive des instruments de l’orchestre, véritables acteurs d’une fine coopération. La caractérisation à laquelle atteint Giovanni Antonini et ses partenaires musiciens d’Il Giardino Armonico réalise l’excellence ; toujours justes, c’est à dire d’une élégance et d’une subtilité qui ne confinent jamais à la vulgarité ; ce sens de la mesure, de la facétie cachée, affleurante voisinne avec le meilleur Haydn, et les interprètes s’ingénient dans une complicité jubilatoire quand le chef indique ce que doit jouer chaque pupitres ; les instrumentistes lui rendant ce à quoi il les invite. Cette perle comique qui singe la musique elle-même exprime ce théâtre agile en imagination, d’une sincérité joyeuse, d’une finesse irrésistible. Evidemment, de ce Cimarosa sûr, truculent, habile, intelligent dérive aussi le pétulant Rossini, c’est dire l’apport de l’enregistrement et aussi l’éclairage qui en découle : la parenté des Symphonies de haydn avec le théâtre picaresque de Cimarosa. Dans les premières, tout un opéra instrumental se fait jour : peu de chefs actuels en comprennent comme ici les enjeux et les ressources ; dans le second, les instrumentistes font valoir leur chant spécifique, les possibilités dramatiques tels de véritables chanteurs, partenaire du soliste baryton. Après tout, quels autres associés fabuleux pour un Maestro di Cappella que les instrumentistes de son propre orchestre ? Ainsi Cimarosa nous laisse sa propre vision de l’orchestre à travers cette cantate épatante et savoureuse : à travers les volontés et les indications de son héros, le compositeur concocte un menu instrumental où l’orchestre virtuose réalise une collection de mets délicats et goûteux. Révélation et jubilation.

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CLIC_macaron_2014CD, compte-rendu critique. Haydn 2013, N°4 : « Il Distrato ». HAYDN : Symphonies n°60, 70, 12. CIMAROSA : Il Maestro di Cappella. Riccardo Novaro, baryton. Il Giardino Armonico. Giovanni Antonini, direction / Enregistré il y a 1 an, en mars 2016 à Berlin / 1 cd Alpha classics (2016). CLIC de CLASSIQUENEWS de mars 2017.

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