jeudi 18 avril 2024

CD, compte rendu critique. Angela Gheorghiu : autograph (1994-2011. 8 cd Warner classics)

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gheorghiu angela autograph coffret box cd warner classics CLIC classiquenews avril 2015 0825646190478 GheorghiuCD. Angela Gheorghiu : autograph (25 ans de carrière). Scrupuleuse dans ses choix de répertoire, capricieuse comme une diva consciente de son art mais qui sait que périssable et fragile, elle doit le préserver toujours, « La Gheorghiu » resplendit toujours (et bientôt dans Adriana Lecouvreur de Cilea, – son dernier rôle important-, à l’Opéra de Paris, en juin et juillet prochains, (23 juin>15 juillet 2015), et dans la mise en scène créée pour elle à Londres en 2010 par McVicar, éditée au DVD avec l’éblouissant Kaufmann en Maurizio…) : timbre clair et charnu, à la fois blessé et irradiant, le soprano velouté et sombre de la belle brune a marqué les rôles d’héroïnes verdiennes : Traviata en 1994 sous la direction de Solti qui l’a ainsi révélée ; Mimi dans la Bohème, dont le partenaire en 1996 Roberto Alagna devient son mari (ils sont séparés depuis) ; Carmen en 2002 avec Plasson (qui n’est pas sa meilleure réussite), surtout Tosca en 2000 au cinéma (Benoit Jacquot) : un personnage fervent, fragile et fort à la fois qui convient à la couleur et au caractère de son chant.
Celle qui a été révélée à 29 ans n’a plus cessé depuis d’éblouir les scènes internationales : à Londres, New York, Salzbourg, Milan, Munich et plus rarement en France… Le coffret de 8 cd et 1 dvd (bonus comprenant un entretien radiophonique en anglais de la cantatrice sur ses rôles phares) édité par Warner classics délivre la quintessence d’une carrière menée avec intelligence et discernement, laissant une témoignage unique à ce jour sur plusieurs prises de rôles (les enregistrements suivent la tenue sur scène) que la soprano roumaine née en 1965 aura marqué par l’intelligence du style, la suavité, la justesse musicale, un grain de voix à la fois lacrymal et corsé qui lui permet de toujours convaincre dans les rôles moins dramatiques que vraiment angéliques et tragiques. Le coffret Warner fête ses déjà 20 ans de carrière et les 25 ans de ses débuts. La moisson est stupéfiante et dans les choix mesurés, réfléchis, révèle l’instinct sûr d’une diva qui a su, contrairement à d’autres, respecter et préserver son instrument.

 

 

 

Les 20 ans de la carrière de la soprano roumaine Angela Gheorghiu

Gheorghiu diva verdienne et puccinienne

 

CLIC D'OR macaron 200Le CD1 « femmes fatales » comprend sa Carmen avec Plasson et Roberto Alagna en 2002, sa Manon avec le même Alagna en 1999. Le CD2 célèbre ses affinités pucciniennes (aussi évidentes et naturelles que celles verdiennes) : Tosca évidemment (toujours avec Alagna en 2000), et sa Butterfly (plus travaillée moins coulant de source : Rome, 2008, Pappano avec l’irrésistible Kaufmann). Le CD3 est le plus juste du point de vue stylistique : jamais Gheorghiu n’a tant convaincu que dans le rôle des filles plutôt que des amoureuses : son angélisme tragique sublime l’expression de la filiation ainsi ses Amelia de Simon Boccanegra (Abbado, 1998), Gilda de Rigoletto (Chailly, 1999), Juliette de Gounod (avec Alagna, composant un duo sublime par sa couleur et son éloquence sombre et héroïque sous la baguette de Plasson, 1995), Charlotte de Werther (avec Alagna en 1998), Chimène du Cid (2010) ou Louise de Charpentier (2001). Le CD4 est un récital non moins captivant accompagné par entre autres par Jeff Cohen (Milan, 2006) qui souligne le soin du texte et l’architecture dramatique de chaque air (mais ni Porpora ni Haendel ne gagnent dans ce vibrato appuyé ni dans cette ligne inféodé au tremolo) ; y paraît par contre sa Comtesse des Noces (incursion mozartienne pleine de profondeur et de gravité tendre, de couleur essentiellement lacrymale, au velouté nostalgique, Londres 2006 sous la direction de Ion Martin, lourde et pesante aux tempi pachydermiques). L’apport de ce disque reste cependant l’offrande belcantiste de la Roumaine chantant Rossini et Bellini avec une séduction et un contrôle de la ligne, et toujours sa couleur tragique parfois âpre comme l’était Callas, qui font trembler : Rosina déterminée, Norma éthérée font aussi partie de l’accomplissement d’une voix singulière.
Le CD5 fait la part belle à Verdi : mélodies, opéras, oratorio (Libera me du Requiem, Abbado, 2001). S’y imposent naturellement : sa Violetta de 2010, et clin d’œil au miracle soltien de 1994 : l’Addio del passato de l’acte III. Mais aussi sa Leonora du Trouvère (Trovatore, Pappano, Londres, 2000) ; Elisabetta de Don Carlo (Abbado, Berlin, 1998)… Coup de cœur particulier pour le CD6, « verismo » dans lequel la diva a su approfondir la couleur sombre de son timbre de velours : Nedda de Pagliacci de Leoncavallo (2010), Suze de l’Amico Fritz (1995), Mimi (diverses prises de 1995, 2004 et 2010) : Maddalena d’Andrea Chenier de Giordano (2010), La Wally et surtout Adriana Lecouvreur de Cilea où figurent les deux airs clés de l’actrice amouruse (Io son l’umile ancella (I) puis Poveri fiori, gemme de’ prati (IV, 2001) ; enfin Magda de La Rondine de Puccini (1996). Mention particulière aussi pour sa Suor Angelica (Senza mamma, 2004). Le CD7 confirme sa parfaite diction française chez Gounod, Bizet et Brel (récital couplé avec les compositeurs roumains ses compatriotes tels Brediceanu, Grigorio, Gheciu. Le CD8 reproduit une émission pour le BBC où Angela en 2004, se raconte au micro en anglais, récapitulation de sa carrière (souvenirs familiaux et témoignages d’une vocation pleinement assouvie par le travail…). Coffret en forme de portrait hommage absolument incontournable. A écouter pour mieux préparer votre prochaine écoute d’Adriana Lecouvreur à l’affiche de l’Opéra Bastille en juin et juillet 2015.

 

 

CD, compte rendu critique. Angela Gheorghiu : autograph (compilation recordings 1994-2011). 8 cd + 1 dvd. Coffret Warner classics 082564610478

 

 

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