CRITIQUE, CD Ă©vĂ©nement. GLUCK : Don Juan, Semiramis – Le Concert des Nations. Jordi savall (1 cd Alia Vox)

gluck-savall-alia-vox-concert-des-nations-cd-critique-cd-review-classiquenews-don-juan-semiramis-angiolini-calzabigi-classiquenews-COVER-CDCRITIQUE, CD Ă©vĂ©nement. GLUCK : Don Juan, Semiramis (ballets de Angiolini) – Le Concert des Nations. Jordi savall, direction (1 cd Alia Vox)  -  Un impi arrogant qui choque et provoque par son esprit aussi querelleur que mĂ©prisant… le « Dom Juan » rĂ©digĂ© par Calzabigi, exprimĂ© en musique par Gluck (pour le ballet d’Angiolini) sert une toute autre vision du mythe que celle qu’ont choisi après lui Mozart et Da Ponte. Voici donc une vision diffĂ©rente du mythe fascinant de Don Juan. La vivacitĂ© du trait que pilote et dĂ©fend avec une grande Ă©nergie (Allegro presto, plage 13) Jordi Savall se rĂ©vèle passionnante ; elle met en lumière entre autres, ce qui sĂ©duit tant chez Rousseau : ce Gluck trĂ©pidant, direct et franc dont les instrumentistes expriment jusqu’à la frĂ©nĂ©sie, la transe qui s’enivre d’elle-mĂŞme.
Dès la sinfonia d’ouverture, s’entend le chant électrisé de la guitare, doublant les cordes qui porte avec beaucoup d’acuité expressive l’élan, la force du désir de possession qui anime le chevalier indécent : sa lascivité séductrice et racée (Chaconne espagnole, plage 20) mais aussi sa cour gracieuse (pas de deux avec la nièce du commandeur, plage 22). Le Ballet suit la trame originelle espagnole et met en scène de fait, la statue du Commandeur qui paraît au festin de Dom Juan, avant d’inviter ce dernier à souper dans son propre mausolée de pierre ; voilà qui explique le sous titre de la pièce de Tirso de Molina « Dom Juan ou le festin de pierre ».

Le tableau le plus spectaculaire étant le dernier, celui des enfers, où entêté, méprisant, Dom Juan est poursuivi par les démons jusqu’aux profondeurs de la terre, par les furies et leurs serpents qui inspirent le fameux finale, des plus mélodiquement et rythmiquement envoûtants. Ce que souligne la musique ici c’est après la vanité et la morve supérieure du héros, son effondrement psychique, la conscience de sa finitude face aux gémissements des âmes impies comme lui : la séquence exprime cette chute existentielle dans la violence de l’orchestre, cordes et cuivres mordants, fouettés, incisifs et sinueux. Les cors sont mis en avant, et les bois percutants, emportés par la tempête des cordes, en un cataclysme qui s’étire et s’allonge jusqu’à l’expiration / l’expiation du pêcheur vaniteux. L’intérêt de cette intégrale est de restituer la séquence des Furies, habituellement jouée seule au concert, sans le parcours dramatique et philosophique qui a précédé. Voilà qui rétablit chez Gluck, la maîtrise du dramaturge comme l’acuité du psychologue.

 

 

Jordi Savall en gluckiste irrésistible :
Les ballets fantastiques d’Angiolini,
La musique frénétique et psychologique de Gluck

 

 

 

 

Même frénésie parfois âpre et sardonique (relief des bassons) dans le ballet qui suit Semiramis des mêmes Gluck, Angiolini, Calzabigi. Ici l’hypertension des cordes offre une autre facette du style frénétique de Gluck, au moment surtout où la Reine est saisie et forcée par le spectre de Ninus d’entrer dans le mausolée : séquence d’enlèvement terrifiante et fantastique. Jordi Savall sait enrichir la palette des ressources expressives de l’orchestre au delà d’une seule description narrative de l’argument conçu par Calzabigi. Le sentiment d’horreur est la clé de toute la partition ; les effets dramatiques comme la musique convergeant vers l’issue finale, en tout point, terrifiante voire choquante ; comment les dieux refuseraient-ils à Sémiramis, souveraine toute puissante à Babylone, son choix d’épouser ce… Ninias ? C’est que ce dernier étant son fils sans être connu ainsi de lui-même et de la Reine, ne peut épouser celle qui lui a donné le jour.
L’intrigue qui les en empêche et qui les élimine tout simplement offre à la musique de Gluck, cette construction directe, efficace, dramatiquement fulgurante. En cela proche du temps chorégraphique, car le mouvement précipite l’action et renforce les contrastes comme sublime les coups de théâtre ; Gluck soigne particulièrement les formes serrées, courtes. Autant de séquences dramatiquement fugaces qui cependant se succèdent avec une grande unité de ton. Fort de ce constat, serviteur d’un temps dramatique autant que psychologique (grâce à la somptueuse musique de Gluck), Jordi Savall prend indéniablement plaisir à ciseler les couleurs et les timbres gluckistes pour intensifier comme caractériser chaque séquence (bien documentée selon le livret de Calzabigi qui CLIC D'OR macaron 200est édité dans la notice). Il soigne le rire des cors, la fièvre des cordes, le chant argenté des bois. Ce travail sur la vivacité des timbres est évidemment permise par l’orchestre sur instruments d’époque, Le Concert des Nations, collectif d’individualités formidablement bien électrisées sous la coupe du maestro plutôt inspiré par ce répertoire. La musique de ballet, évidemment profite ici du génie de Gluck ; mais elle regorge de teintes et nuances qui en fait une remarquable tapisserie sonore, digne de l’opéra, comme des chefs d’oeuvres symphoniques de la fin du siècle (Haydn, Mozart…). Du Gluck pur et historiquement percutant. Saisissant.

 

 

 

 

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CRITIQUE, CD Ă©vĂ©nement. GLUCK : Don Juan, Semiramis (ballets de Angiolini) – Le Concert des Nations. Jordi Savall, direction (1 cd Alia Vox). CLIC de CLASSIQUENEWS Ă©tĂ© 2022. EnregistrĂ© en janvier 2022, Ă  Cardona (Catalogne, Espagne).

 

 

 

 

CRITIQUE DVD : l’archet des Lumières. Le Chevalier de Saint-Georges (BelAir classiques)

saint-georges-archet-lumieres-dvd-blu-ray-bel-air-classiques-clic-de-classiquenews-critique-concert-opera-review-classiquenewsCRITIQUE DVD : l’archet des Lumières. Le Chevalier de Saint-Georges (BelAir classiques) – Le documentaire suit les jalons dits face Ă  la camĂ©ra par AndrĂ© GuĂ©dĂ©, biographe actuel du compositeur ; on assiste ainsi, enfin, Ă  la rĂ©surrection du « Mozart noir », personnalitĂ© incontournable du Paris des annĂ©es 1780 et que depuis le rĂ©tablissement par Bonaparte en 1802 de l’esclavage, la volontĂ© politique s’entĂŞte Ă  tenir dans l’ombre ; pas de crĂ©ole digne du gĂ©nie des Lumières ! Cela fait tâche… Une honte bien française qui cependant n’existe pas outre-Atlantique oĂą l’on cĂ©lèbre toujours celui qui fut la source artistique de Mozart entre autres (pour son ballet « Les Petits Riens », le Salzbourgeois admiratif emprunta au Chevalier bien inspirĂ© Saint-Geroges, certains motifs de ses concertos pour violon…).
L’envergure de l’artiste ne doit pas non plus Ă©clipser ses faits d’armes comme militaire : adolescent, Saint-Georges fut un escrimeur renommĂ© Ă  Paris qui affirma la noblesse de sa naissance : son père aristocrate fortunĂ© – descendants des Comtes de Boulogne, et haut fonctionnaire, revint Ă  Paris avec son Ă©pouse esclave, Nanon et donc leur fils auquel il prodigua une Ă©ducation particulièrement soignĂ©e en leur demeure, un hĂ´tel particulier près de la Place des Victoires.
Capitaine de la garde Nationale, Saint-Georges défendit la République naissante contre le complot du royaliste Dumourier à Lille… Ingrate, la France oublia vite ce héros des Lumières au prétexte qu’il était noir, né des Antilles (Basse Terre, Guadeloupe)…
Il était temps de réparer l’outrage de la mémoire étatique française, mémoire bien défaillante en l’occurrence.
Bien fait de sa personne, costumé et parfumé comme les nobles parisiens, Saint-Georges laisse un catalogue d’œuvres magistrales qui disputent à Mozart et Haydn, finesse, élégance, séduction mélodique… apprise auprès de ses professeurs, Leclair et Gossec.
Ils permettent au compositeur de se dĂ©voiler ; Saint Georges devient une plume aux cĂ´tĂ©s de ses aptitudes Ă  l’Ă©pĂ©e. Après avoir manquĂ© son duel avec le champion Faldoni, Saint-Georges pourtant escrimeur chevronnĂ©, se dĂ©die Ă  la composition.

Le documentaire dĂ©voile un tempĂ©rament attachant, qui n’usurpe pas sa rĂ©putation de « Mozart noir » ; Saint-Georges participe activement Ă  la vie musicale parisienne, dirigeant comme Dauvergne, l’incontournable Concert Spirituel, haut lieu de la crĂ©ation symphonique et lyrique alors; pour autant qu’il est possible de mesurer son invention, a contrario des Gossec et MĂ©hul qui traversent la pĂ©riode rĂ©volutionnaire et s’imposera tout autant Ă  la pĂ©riode romantique, Saint-Georges semble rester dans ce XVIIIIè galant et suave (comme en tĂ©moigne ici le style prĂ©cieux de l’air d’Ernestine, – jouĂ© dans une version Ă©purĂ©e avec Quatuor Ă  cordes, sur un livret de Chanderlos de Laclos – avant que ce dernier n’écrivent les Liaisons dangereuses).
Marie-Antoinette qui l’a choisi comme précepteur de musique, souhaite le nommer directeur de l’Académie royale : une décision qui choque le milieu parisien, décidément trop étroit pour ne pas dire raciste ; Louis XVI intervient alors pour écarter Saint-Georges d’une telle responsabilité.
Dépressif, Saint-Georges reprend les armes et représentant de la noblesse libérale de la fin de l’Ancien Régime, il participe en décembre 1789, à la libération de Lille, comme capitaine de la garde nationale. Saint-Georges meurt le 10 juin 1799 alors qu’il venait de créer le Cercle de l’Harmonie, société musicale pourtant prometteuse.
Au moins sur le champs de bataille, celui qui a été refusé par la clique musicale parisienne, révèle sa mesure : celle d’un auteur minoré qui a la stature d’un héros des Lumières.

CLIC_macaron_2014Si Lille tarde à reconnaître tous ses mérites, pourtant décisifs à son histoire, Paris grâce au maire Delanoé, sait débaptiser la rue Richepanse (lequel avait rétabli l’esclavage aux Antilles) et la renommer Chevalier de Saint-Georges, le 4 février 2002. 20 ans plus tard, le travail de réhabilitation du compositeur qui est plus joué aux USA qu’en France, reste énorme.

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CRITIQUE DVD : l’archet des Lumières. Le Chevalier de Saint-Georges / The Enlightened Violonist (1 dvd BelAir classiques) – 53 mn – Un film de Martin Mirabel avec la participation de Alain GuĂ©dĂ©, le Quatuor Cambini…

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VOIR le teaser vidéo du DVD Le Chevalier de Saint-Georges, l’archet des Lumières

https://vimeo.com/ondemand/saintgeorge/701161901

CRITIQUE, DVD Ă©vĂ©nement – OpĂ©ra de Paris une saison très particulière (BelAir classiques)

Une-saison-tres-particulière belair classiques critique classiquenews dvd opera de paris hugo marchandCRITIQUE, DVD Ă©vĂ©nement – OpĂ©ra de Paris une saison très particulière (BelAir classiques) – Mars 2020 fermeture et confinement : les artistes comme tous les citoyens sont tenus Ă  rĂ©sidence : les sessions collectives et donc le travail au sein du Ballet, sont interdites. Juin 2020, retour en salles de rĂ©pĂ©tition… Et presque Ă  une vie sociale normale. Le retour Ă  la danse ensemble s’apparente Ă  un retour Ă  la vie : sans danse et sans mouvement, le danseur ne peut plus exprimer ni ĂŞtre tout simplement. C’est un athlète qui doit se reconstruire : il a perdu en cardio, en endurance, en musculature car celui qui dansait entre 7h Ă  10h par jour, ne dansait plus.
La caméra suit les séances de répétition où chacun retrouve son corps.
Sessions de travail, entretiens, disent ce retour Ă  la vie normale du danseur, Ă  son quotidien de grand sportif et d’athlète artiste.
C’est le plaisir et les sourires qui sont le vrai sujet de ce documentaire qui célèbre le mouvement et de la danse.
Diagonale de chassĂ©s plutĂ´t que grands sauts car les contraintes sont encore lĂ  et restreignent la suractivitĂ© du groupe, comme l’enthousiasme des premières Ă©nergies.

Les défis de la Bayadère
Le retour de la troupe Ă  son complet (soit 90 artistes en scène) se rĂ©alise avec le reprise de la production lĂ©gendaire de La Bayadère ; 15 oct 2020 : premières rĂ©pĂ©titions en nombre et en masques. Noureev est l’adn de la troupe ; le chorĂ©graphe associe technique et endurance, Ă©lĂ©gance et discipline acadĂ©mique. Des critères qui font depuis la singularitĂ© de la Maison parisienne.
DĂ©tachĂ©s, arabesques,.. synchronisĂ©s constituent ce collectif qui semble respirer comme un seul organe ; le corps de ballet est la star pour Noureev ; la mise en place est essentielle ; elles sont 32 danseuses mais il n’y en a qu’une seule, unies, par la mĂŞme sĂ©rie de mouvements et de figures parfaitement synchrones.

La chorĂ©graphie de Noureev est la plus difficile de la planète ; l’OpĂ©ra de Paris est l’Ă©cole de la très haute technicitĂ©. Ailleurs on dirait comme Salieri ou Joseph II parlant de la musique de Mozart (« trop de notes ») : « trop de pas » comme le rappelle Lionel Delanoe, maĂ®tre de ballet…. il convient de cacher et sublimer l’exigence de technicitĂ© extrĂŞme par la souplesse et l’élĂ©gance du naturel.

HUGO MARCHAND rĂ©pète dans le rĂ´le de Solar... Puissance et investissement sollicite le corps, marquant un crescendo dans la difficultĂ©… « Manège de deux assemblĂ©es » exige une Ă©nergie du corps difficile Ă  nĂ©gocier … L’action mĂŞle tragique et orientalisme Ă  la GĂ©rĂ´me : la Bayadère Nikita [Amandine Abilsson] vouĂ©e au temple, aime Solar qui est promis Ă  la fille du raja… Que peut l’amour de deux ĂŞtres contre le devoir imposĂ© par la religion et le pouvoir ? Tout ! Solar suit Nikita dans la mort… Pur incarner avec justesse Nikita, la denseuse doit aussi dĂ©voiler son regard, exprimer la complainte, et aussi dans la chorĂ©graphie de Noureev, le style de la dĂ©mesure lyrique, caractère propre Ă  l’école russe…

De mars à déc 2020
Le ballet de l’Opéra de Paris à l’épreuve du confinement…

Peines et élégance, engagement et discipline
à l’école de la Grâce

Les répétition des tableaux collectifs avec le corps de ballet où tous les danseurs et les solistes dévoilent leur travail, montrent les derniers points de fragilité dans l’enchaînement du drame… Le Solo de Paul Marque en idole d’or saisit par sa puissance et sa grâce, déjà sidérantes à ce stade. Puis ce sont les répétitions en scène (27 nov), avec costumes, avec la réalité du terrain (la fameuse pente de Bastille) : un autre défi là encore, canaliser la tension, maîtriser son stress, accepter ses faiblesses ou sa perte d’attention et de concentration… mais faire de son mieux.
La Descente des 32 danseuses ou 32 arabesques qui se révèle sur scène ainsi 32 fois sur la même jambe dans la souplesse : un défi pour la première danseuse ! … une sorte de yoga d’une même figure à réaliser … 32 fois ! Ce corps décomposé en 32 danseuses parfaitement synchronisées rappelle la fascination de Noureev pour le Ballet comme protagoniste central de ses chorégraphies. Ce parcours dans les coulisses du travail dévoilant la peine, la discipline, et malgré l’engagement et le plaisir de cette école de la grâce se révèle passionnant…
Entre autres, les Ă©toiles et ex Ă©toiles Aurelie Dupont, Mathieu Ganio, Germain Louvet, Dorothee Gilbert … tĂ©moignent et racontent aussi cette saison (très) spĂ©ciale du Ballet de l’OpĂ©ra de Paris.

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CLIC_macaron_2014CRITIQUE, DVD, BLU RAY. Opéra de Paris, Une saison très particulière. Réalisation : Priscilla Pizzato (Bel Air classiques). PLUS D’INFOS sur le site de l’éditeur BelAir classiques :
https://belairclassiques.com/catalogue/opera-de-paris-une-saison-tres-particuliere-ballet-priscilla-pizzato-dvd-blu-ray

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

TEASER vidéo :
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CD coffret événement, critique. César FRANCK : complete orchestral works / Intégrale symphonique (4 cd Fuga Libera)

franck cesar cd coffret set box complete orchestral works 4 cd fuga libera cd review critique classiquenews CLIC de classiquenewsCD coffret Ă©vĂ©nement, critique. CĂ©sar FRANCK : complete orchestral works / IntĂ©grale symphonique (4 cd Fuga Libera) - CLIC de CLASSIQUENEWS printemps 2022 – Le coffret a le mĂ©rite, intĂ©grale oblige, et aussi le courage de rĂ©tablir certains faits concernant CĂ©sar Franck. Voici le cas exemplaire d’une rĂ©vĂ©lation : Franck atteint une belle maturitĂ© artistique dès son jeune âge, alors prodige du piano, rĂ©cemment naturalisĂ©, Ă©lève au Conservatoire de Paris et maĂ®trisant la forme chambriste et comme ici, l’écriture orchestrale. En tĂ©moignent ses premières Variations Ă  11 ans (!) ; celles « brillantes » d’après l’opĂ©ra Gustave III d’Auber (composĂ©es en 1834, un an après la crĂ©ation du drame lyrique) ; le thème de la ronde tirĂ©e de l’acte II dĂ©ploie une libertĂ© de ton et une virtuositĂ© mozartienne toujours inspirĂ©e Ă  laquelle rĂ©pond l’orchestration d’esprit webĂ©rien. A dĂ©faut de savoir si le Concerto n°1 a jamais existĂ© (probable supercherie de Franck père), le Concerto n°2 du fils saisit lui aussi en 1835, car il dĂ©montre les dĂ©buts franckistes Ă  l’assaut du tout orchestral : la mĂŞme puissance mĂ©lodique et l’ampleur de l’orchestration conçues par l’adolescent de 12 ans (attestant d’ailleurs de son apprentissage Ă©clairĂ© auprès de Reicha) : la carrure beethovĂ©nienne, la pensĂ©e claire d’une architecture impressionnante, l’emportent sur la tentation de Chopin et d’Hummel…

La première partition qui impressionne par sa gravité surnaturelle et l’ampleur de l’évocation pastorale et onirique est « Ce qu’on entend sur la montagne » (1846), fusion inédite du poème à programme et de l’idée philosophique : à 24 ans, Franck égale ici l’inventivité des Berlioz et Liszt. Son inspiration atteint l’imaginaire wagnérien dans une orchestration somptueuse, digne de la source littéraire Les Feuilles d’Automne d’Hugo (traitées ensuite par Liszt en 1847). Voilà la primauté de Franck révélée, soulignée, démontrée dans une partition élaborée par un jeune auteur au tempérament lui-même poétique qui pense la musique en suggestions sonores, en dilatation spatiale, en déroulement psychologique (comme Wagner), et pas uniquement descriptif ou narratif.

Franck, le poète symphoniste
La fusion exemplaire de l’idée et de la forme

L’auditeur se délecte tout autant des deux volets symphoniques « Rédemption » (1872), manifeste fraternel, humaniste composé contre la guerre et la barbarie de 1870. Là encore les interprètes montrent combien la forme sonate (élargie) fusionne avec l’idée et le plan spirituel et philosophique. Forme et fond s’unissent sous le sceau d’une inspiration géniale, restituée dans la version corrigée souhaitée par Franck (première mondiale, autre belle révélation du coffret Fuga Libera).

Une mĂŞme cohĂ©rence de vision, une mĂŞme honnĂŞtetĂ© interprĂ©tative soulignent la singularitĂ© poĂ©tique des Éolides (1877) dont le prĂ©impressionnisme aĂ©rien, balançant vers l’immatĂ©rialitĂ©, mène Ă  l’accomplissement qui en dĂ©coule, PsychĂ© (Ă©tĂ© 1886), dans le livret-notice qui accompagne les 4 cd du coffret, idĂ©alement prĂ©sentĂ© : chacune des 4 parties sont explicitĂ©es – enjeux, rĂ©alisation, poĂ©sie, soulignant s’il Ă©tait encore nĂ©cessaire, la probitĂ© poĂ©tique du Franck perfectionniste (et sa grande connaissance du des auteurs littĂ©raires).

Avec ce drame orchestral (et choral), le compositeur se révèle autrement à nous : Psyché (1878) permet à Franck d’aborder l’un des thèmes les plus langoureux voire érotiques, tiré des Métamorphoses d’Apulée (dixit le livret notice) ; en cela, il fait suite au drame musical d’Ambroise Thomas que Franck admire : toujours, l’idée précède la forme et Franck s’attache à servir sa pensée par une musique jamais décorative. Gergely Madaras et les instrumentistes de l’OPRL expriment cette alliance subtile entre le sens du drame, son déroulement tragique (avant sa résolution pathétique et heureuse) en particulier ils relient Franck ici à Wagner (Tristan und Isolde), renforçant la part fantastique et d’un surnaturel miraculeux par le choeur mystérieux (« Apothéose » finale) dans la coulisse, invisible agent du miracle ultime. La partition langoureuse, aux voluptés instrumentales inédites révèle ainsi la nature vénusienne du « Séraphin » Franck.

Que dire encore des partitions complémentaires : Variations Symphoniques, Le Chasseur maudit (1882, d’après Nerval), Les Djinns … Les Djinns d’après Les Orientales d’Hugo (1884, créé au Châtelet en mars 1885) expriment le souffle terrifiant de l’essaim maléfique décrit par Hugo ; la partition associe étroitement piano et orchestre en une entente là aussi poétiquement idéale dont la réussite se renouvelle dans la partition suivante Variations Symphoniques, lumineuses (cycle dédié au pianiste Louis Diémer), au dramatisme de plus en plus extatique, référence aux Etudes Symphoniques de Schumann,
L’exhaustivitĂ© parle en faveur du coffret et le place comme l’intĂ©grale de la musique de chambre Ă©ditĂ© par Fuga Libera simultanĂ©ment, au nombre des rĂ©alisations majeures de l’annĂ©e CĂ©sar Franck 1822 – 2022.
Le tour est complet (respectant d’ailleurs la chronologie des œuvres, présentation idéale pour restituer l’évolution de l’écriture dans la durée…), majoritairement réalisé par l’OPRL Orch Philh Royal de Liège, avec divers chefs dont Christian Arming (Symphonie en ré), Pierre Bleuse (Pierné), surtout Gergely Madaras (Psyché)…

Le programme du cd4 assure l’intĂ©gralitĂ© : il prĂ©sente la mystique Symphonie de 1889, – cathĂ©drale Ă  l’élan fantastique et puissant ; prĂ©cĂ©dĂ©e par l’hommage de Gabriel PiernĂ© Ă  son maĂ®tre vĂ©nĂ©rĂ© : sa version orchestrale, Ă©crite en 1915 (pour le 25è anniversaire de la mort de Franck) d’après le triptyque pianistique PrĂ©lude, choral et fugue : lĂ  encore une rĂ©vĂ©lation qui permet de réécouter l’art des combinaisons franckistes dans un nouvel habillage instrumental. Magistral.

 

 

 

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CLIC D'OR macaron 200CD coffret Ă©vĂ©nement, critique. CĂ©sar FRANCK : complete orchestral works / IntĂ©grale symphonique (4 cd Fuga Libera) – OPRL Orch Philh Royal de Liège. COFFRET Ă©vĂ©nement CLIC de CLASSIQUENEWS printemps 2022 – PLUS D’INFOS sur le site de Fuga Libera / Outhere : https://outhere-music.com/fr/albums/franck-complete-orchestral-works

 

 

 

OPRL Orchestre Philharmonique Royal de liège
Présentation des œuvres selon la chronologie des enregistrements :
2021 (juin puis sept), 2018, 2009, 2012.

CD 1 (1-5), CD 4 (1), enregistré à la Salle Philharmonique de Liège, du 9 au 12 juin 2021.
CD1
Variations brillantes CFF 131 (1)
Variations d’après Gustave III (2)
Concerto pour piano n°2 (3,4,5) – Florian Noack, piano / Pierre Bleuse, direction.
CD4 : Prélude, choral et Fugue (Pierné) (1) / Pierre Bleuse, dir.

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CD 2 (1), CD 3 (3-10), enregistré à la Salle Philharmonique de Liège, du 8 au 11 septembre 2021:
CD2 (1) RĂ©demption, 1ère version, 1872 – Gergely Madaras, dir.
CD3 : Les Djinns (1) Cédric Tiberghien, piano / FX Roth, dir. ; Psyché (3,4,5,6,7,8,9), Chœur de Radio France, Gergely Madaras, dir.

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CD 2 (2), enregistré à la Salle Philharmonique de Liège, du 23 au 27 octobre 2018 : Rédemption : Morceau symphonique, version 2, 1873 : H niquet, dir.

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CD 2 (3 et 9), CD 4 (1-2), enregistré à la Salle Philharmonique de Liège, du 22 au 29 juillet 2009.
CD2 : Les Eolides (3) ; Le Chasseur maudit (9) : FX Roth, dir.

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CD 1 (6), CD 2, (4-8), CD 4 (2-4) : enregistré à la Salle Philharmonique de Liège, du 4 au 8 juin 2012.
CD1 : Ce qu’on entend sur la montage (6)
CD2 : ; HULDA, extraits (4,5,6,7,8)
CD4 : Symphonie en ré mineur (2, 3, 4).
OPRL / Christian Arming, dir.

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cd cesar franck complete chamber music cd critique review classiquenews clic de classiquenewsCD coffret Ă©vĂ©nement, critique. FRANCK : intĂ©grale de la musique de chambre (4 cd Fuga Libera) – Pour cĂ©lĂ©brer les 200 ans de la naissance de CĂ©sar Franck (1822 – 1890), nĂ© liĂ©geois mais gĂ©nie primordial pour la musique française Ă  l’époque du WagnĂ©risme total, l’éditeur Fuga libera Ă©dite plusieurs coffrets dont le mĂ©rite sous forme d’intĂ©grales thĂ©matiques propose une rĂ©estimation de son Ă©criture : voici le volet chambriste. Tout y est : autour du Quintette pour clavier (jalon essentiel de 1878) et de la Sonate (pour violon / piano), fleuron de 1886, l’auditeur peut ainsi mesurer le gĂ©nie franckiste dans la ciselure et le dialogue instrumental, ce en deux parties : l’une relevant de la jeunesse (propre aux annĂ©es 1840) ; la seconde fixant les Ă©volutions tardives (soit la dĂ©cennie 1880). Sous une figure avenante et calme, le pianiste et compositeur Franck bouillonne ; son Trio Ă©crit dès 12 ans, marquĂ© par Alkan, …

 

CRITIQUE CD, événement. VOYAGES INTÉRIEURS : Duo Seigle (1 cd Klarthe records, enregistré à Lyon, nov 2020)

DUO SEIGLE RAVEL FALLA violon violoncelle NoĂ«mi Waysfeld critique cd review classiquenews CLIC de classiquenews KLA139CRITIQUE CD, Ă©vĂ©nement. VOYAGES INTÉRIEURS : Duo Seigle (1 cd Klarthe records, enregistrĂ© Ă  Lyon, nov 2020). VoilĂ  un programme plus qu’original : d’une cohĂ©rence personnelle rĂ©jouissante, portĂ©e, vivifiĂ©e par une fratrie lyonnaise, aventureuse, dĂ©fricheuse, curieuse et qui renouvelle le rĂ©pertoire chambriste violon / violoncelle : MichaĂ«l (violon) et Nicolas Seigle (violoncelle). Le sujet central reste la Sonate de Ravel, sommet de la dernière manière, créée en 1922 : puissante, imprĂ©visible, surexpressive dans une Ă©pure fondĂ©e sur l’exacerbation des textures de timbres et pourtant d’une telle subtilitĂ© (dans sa complexitĂ© contrapuntique, dans sa fascination gĂ©nĂ©reuse des rythmes de danses enchevĂŞtrĂ©es…). Pour en souligner la secrète activitĂ©, l’inspiration multiple, la fascination mystĂ©rieuse, le Duo Seigle « ose » rĂ©inventer le contexte de sa rĂ©ception, pour sa totale et profonde comprĂ©hension : l’urgence du 3è mouvement (entre cauchemar amer et solitude intranquille, tension portĂ©e Ă  vif et nouvelle conscience, ou pour reprendre les mots des interprètes « irrĂ©alitĂ©, cassure ou rĂ©miniscence », dans une incandescence dangereuse), affirme la complicitĂ© continue des deux solistes ; leur goĂ»t des arrangements qui envisagent une nouvelle perception des Ĺ“uvres. Comme un fil tĂ©nu, les instrumentistes remontent jusqu’à la source inspiratrice de Maurice Ravel, invoquant dans cette gĂ©nĂ©alogie supposĂ©e mais d’une rare cohĂ©rence, l’esprit et le style de JS Bach (4 duetti originellement pour orgue dont la libertĂ© illimitĂ©e du chant contrapuntique dialogue avec Ravel) ; chant hĂ©braĂŻque de Kaddish (Lent, dans un arrangement du Duo Seigle, oĂą rayonnent les respirations, le chant mesurĂ© et viscĂ©ral de la chanteuse invitĂ©e NoĂ«mi Waysfeld) ; swing jazzy de Gerswhin, sans omettre, complicitĂ© complĂ©mentaire, les chansons populaires de Falla, arrangĂ©es pour violon, violoncelle et voix (le grain de NoĂ«mi Waysfeld souligne l’idĂ©e d’une rusticitĂ© enchantĂ©e : « Nana », est tissĂ©e comme une berceuse Ă©nigmatique) ; le jeu texturĂ© des deux instruments seuls (CanciĂłn, Seguedilla Murciana, Jota…) pimente la sĂ©duction mĂ©lodique, l’essence populaire des sĂ©quences au caractère dansant, franchement ibĂ©rique.
CLIC_macaron_2014Le terreau auquel s’abreuve les instrumentistes est ce riche passé offert en héritage dont ils savent récolter de nouvelles sonorités. Un tel hommage à la mémoire s’écoute dans l’adaptation du standard « Embraceable You » de Gershwin, au formidable prélude ; la voix caresse, dialogue avec les cordes en une promenade funambule d’une authentique poésie. Ce trio imprévu est aussi original que juste, d’une sensibilité artistique lumineuse. Chapeau bas.

 

 

 

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CRITIQUE CD, événement. VOYAGES INTÉRIEURS : Duo Seigle (1 cd Klarthe records, enregistré à Lyon, nov 2020). CLIC de CLASSIQUENEWS printemps 2022.

 

 

 

Programme

Maurice Ravel – Sonate en quatre parties
Johann Sebastian Bach – 4 Duetti BWV 802-805
Manuel de Falla – Canciones populares españolas (arrangements : CĂ©dric Granelle)
Maurice Ravel – Kaddisch (arrangement : Duo Seigle)
George Gershwin (arrangements : David Bressat) : 
Embraceable You, 
The Man I Love, 
A Foggy Day

 

 

 

Agenda
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CONCERT «  Voyages intérieurs », La Marbrerie à MONTREUIL (93), mercredi 23 mars 19h. Billetterie : LaMarbrerie.fr
https://lamarbrerie.fr/duo-seigle-quatuor-psophos/
Le Duo Seigle recompose les ferments qui ont inspiré Maurice Ravel dans la composition de sa fameuse Sonate pour violon et violoncelle ; les deux instrumentistes nous offrent un voyage intérieur où paraissent musiques populaires venues d’Espagne, chant hébraïque, jazz, et musique baroque.

VIDEO – Lien youtube: https://youtu.be/VqBOYmrx9uA

 

 

 

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TEASER vidéo
https://www.youtube.com/watch?v=_p_PW6uoE78

 

 

 

 

 

 

CRITIQUE CD événement. GEORGE ROCHBERG : Caprice Variations pour violon seul. Léo MARILLIER, violon (1 cd Albany)

rochberg-georg-leo-marillier-violon-violin-caprice-variations-critique-cd-review-classiquenews-CLIC-de-classiquenews-entretien-interview-leo-marillierCRITIQUE CD Ă©vĂ©nement. GEORGE ROCHBERG : Caprice Variations pour violon seul. LĂ©o MARILLIER, violon (1 cd Albany) – Le propos tient du marathon ; d’une gageure en rĂ©alitĂ© inimaginable pour un seul soliste. C’est peu dire que les 51 Variations ici enchaĂ®nĂ©es (et jouĂ©es pour l’enregistrement d’une traite) composent un dĂ©fi et une performance hors normes ; il ne dĂ©pend que de l’endurance et de la concentration de l’interprète, son aptitude Ă  traverser chaque Ă©pisode contrastĂ© de ce cheminement aux surprises incessantes qui outre leur exigence pour l’instrumentiste, questionnent le matĂ©riau musical, la forme, l’écriture, le sens et la direction d’un dĂ©veloppement.
A la façon de James Joyce, celui d’Ulysse, George Rochberg en 1970 dessine tout un parcours d’un constant renouvellement, qui semble ouvrir de multiples portes, chacune jouant des styles, des effets, des caractères, des nuances les plus extrêmes… La palette des émotions est infinie, mais toujours dans le geste unitaire du violoniste se précise peu à peu une volonté indéfectible ; de ce questionnement en forme de labyrinthe, serpente et prend forme la réponse jusqu’à l’élucidation finale (51è variation, qui est en réalité, la source du périple : le 24è Caprice de Paganini, celui là même que Rachmaninov a célébré lui aussi dans sa fameuse Rhapsodie de 1934), une course contre le temps et la nécessité temporelle qui se fait pensée, célébration de la liberté.
CLIC_macaron_2014Le 24è Caprice, produit d’un rituel de passages et de métamorphoses, cristallise ainsi toutes les tensions et les détentes accumulées, en produit une libération salvatrice. L’effet est saisissant : solaire. Ainsi le chemin s’élève dans la lumière ; de la matière à l’abstraction. A la fois technicien et poète de la matière, le virtuose Léo Marillier n’a pas seulement l’instinct sûr grâce à une technique éloquente et précise ; il comprend et éclaire de l’intérieur chaque séquence, unifiant les 50 jalons vers l’apothéose finale. De sorte que ce qui compte absolument c’est autant la ciselure formelle du cheminement que l’expérience musicale, esthétique, spirituelle qui naît de son déroulement.

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GEORGE ROCHBERG (1918 – 2005) : Caprice Variations pour violon seul (1970). LĂ©o MARILLIER, violon (1 cd Albany) – enregistrĂ© en aoĂ»t 2021 – CLIC de CLASSIQUENEWS

APPROFONDIR
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LIRE aussi notre entretien avec Léo Marillier à propos des 51 Caprice Variations de George ROCHBERG :

Léo Marillier joue les 51 caprice variations de George ROCHBERGLe violoniste Léo Marillier dévoile la force et la puissance poétique des « Caprice Variations » composés en 1970 par George Rochberg (1918-2005), compositeur américain d’autant plus méconnu que son écriture opère une réflexion fondamentale sur la musique et les formes musicales. En témoignent ses 51 Variations inspirées de Paganini, point de départ d’un labyrinthe foisonnant, flamboyant qui mêle et interroge tous les styles, en un parcours dont l’architecture échappant à l’évidence, exprime le tumulte même d’une vie tragique, celle précipitée de l’auteur lui-même, foudroyé par une catastrophe personnelle… Léo Marillier, qui est aussi membre du Quatuor Diotima depuis déc 2021, est le premier violoniste français à enregistrer l’intégrale des “Caprice Variations” qui paraît en mars 2022 (après avoir réalisé la création française de l’oeuvre en concert à Paris en 2017). L’interprète en éclaire les incertitudes critiques comme le cheminement allusif.
http://www.classiquenews.com/entretien-avec-leo-marillier-a-propos-des-caprice-variations-de-georg-rochberg/

CRITIQUE, opéra. PARIS, Salle Gaveau, le 12 fév 2022. VERDI : I DUE FOSCARI (version de concert). Domingo, Chacon-Cruz…

domingo-placido-portrait-nabucco-boccanegra-foscari-opera-classiquenews-critique-concertCRITIQUE, opéra. PARIS, Salle Gaveau, le 12 fév 2022. VERDI : I DUE FOSCARI (version de concert). Domingo, Chacon-Cruz… Appasionato. Le retour à la vie normale des concerts et des récitals lyriques s’affirme un peu plus en ces jours de février. Après les salles fermées, les productions empêchées pour cause de cas contact, voici que Gaveau nous offre l’un de meilleurs instants opératiques vécus à paris depuis le 1er janvier 2022.

Ce 12 fĂ©vrier 2022, Gaveau rĂ©unissait ainsi de façon improbable – mais l’inespĂ©rĂ© n’est -il pas de nous surprendre pour mieux nous saisir ? – rien de moins qu’un plateau de solistes lyriques de premier plan, dont Ă©videmment dans le rĂ´le-titre de Placido Domingo, juste, vĂ©tĂ©ran et acteur sincère, douĂ© d’une incarnation phĂ©nomĂ©nale malgrĂ© son grand âge mais quelle expĂ©rience et quel instinct du drame… aux cĂ´tĂ©s d’Anna Pirozzi et d’Arturo Chacon-Cruz, fils du Doge – Jacopo Foscari, des plus engagĂ©s.

 

 

Doge tragique et sombre
son fils, ardent, incandescent, Ă©lectrisant…
A Gaveau, les 2 FOSCARI au sommet…

 

 


Gaveau n’est pas une salle pour l’opéra : la scène ne permet aucun déplacement, mouvement, ampleur gestuelle. De même l’absence de surtitrage laisse les spectateurs à leur propre connaissance des situations dramatiques. 
Mais justement l’expérience de la version non scénique permet comme toujours de (re)découvrir l’écriture orchestrale verdienne avec toute son acuité de timbres ; les solos instrumentaux s’y déploient mieux que s’ils étaient en fosse, invisibles (clarinette, alto / violoncelle de la scène de la prison). Les déchirements intérieurs du Doge Foscari à Venise, annonce bientôt la sombre mélancolie solitaire, et comme irradiée du Doge de Gênes, Simon Boccanegra, où Verdi développe cette même couleur générale magnifiquement sombre et prenante. Le sens de l’épure, l’économie psychologique ont desservi la juste appréciation de l’oeuvre : ce regard direct sur le tréfonds de l’âme humaine, loin des retentissements et déflagrations collectives parfois assourdissantes voire encombrées (Don Carlos, La Forza del destino, Il Trovatore, sans omettre le défilé de victoire d’Aida… véritable peplum égyptien) sont justement les points forts de l’écriture verdienne. Un nouvel aspect que l’auditeur redécouvre et apprécie aujourd’hui. La scène finale en particulier qui explore l’esprit agité et sombre voire dépressif car démuni, du Doge Foscari reste le tableau le plus impressionnant: un monologue comparable à la force noire de Boris Godounov de Moussorsgki et dans laquelle brilla le diamant profond des grands barytons verdiens : Piero Capucelli en tête…

teĚnor opera classiquenews foscari critique opera annonce classiquenews_Arturo_Chacon__CruzD’après Lord Byron, Les deux Foscari polarise l’action autour des Foscari père et fils. Jacopo de braise, condamnĂ© Ă  l’exil crĂ©tois par le Conseil de Venise, ardent, brillant, le tĂ©nor mexicain Arturo Chacon-Cruz tire son Ă©pingle du jeu et construit son personnage dans la passion, l’intranquillitĂ©, la pulsion dĂ©vastatrice, vertiges et transe vocale Ă  l’avenant, Ă  travers la scène de la prison donc, oĂą sa raison vacille, visions fantasmatiques Ă  l’appui, jusqu’au dernier air : « All’infelice veglio » dont la sincĂ©ritĂ© touche directement.
Lucrezia convaincante (mais en deça du niveau vocal de ses partenaires masculins), épouse démunie mais si fière de l’exilé, Anna Pirozzi déploie un organe ample (même si la tension dans les aigus et le peu de nuances suscitent nos réserves). Celle qui chante aujourd’hui, les grands rôles féminins verdiens dramatiques, Abigaille (Nabucco) ou Lady Macbeth, impose son tempérament puissant, aux décibels faciles, traversé elle aussi d’incertitude, et pourtant pleine de force apparente quand il faut soutenir son époux condamné. D’autant qu’elle sait bien le rôle pour l’avoir chanté déjà avec Domingo à Monte-Carlo en déc 2020.

Annoncé enrhumé, Placido Domingo, pilier et tête d’affiche de la soirée, exauce tous les espoirs : contrairement à son prénom, son implication à être Francesco Foscari, Doge (octogénaire) de Venise, brûle les planches par la vérité saisissante de l’incarnation ; comme ses Boccanegra ou ses Luna, le baryton verdien excelle dans la nuances, les phrasés, la rondeur du chant, les intonations et connotations expressives qui manifestent ici un génie vocal (habile aussi à négocier quelques imprécisions noyées dans un vibrato et une prosodie coulante dont il a le secret). Chapeau maestro Domingo : vous êtes assurément l’incarnation du drame verdien, d’autant que Verdi a scrupuleusement édifié sa conception de la tessiture, réservant au timbre de baryton, ses plus grandes créations vocales, de Rigoletto à Falstaff, sans omettre Stiffelio et ici Foscari. Sans omettre non plus Germont et surotut Boccanegra, autre figure de Doge (celui-l) gênois) mais qui à l’extrémité de la carrière, vient compléter et prolonger la figure du renoncement amorcée avec Francesco Foscari.
Saluons les rôles « secondaires », tous très solides, ciselant encore la galerie des portraits ainsi réalisée sur la scène de Gaveau : Emanuele Cordaro (diabolique Jacopo Loredano, celui qui manipule le Conseil des Dix dans sa détermination à abattre les Foscari) ; le ténor Diego Godoy et Arianna Giuffrida, respectivement Barbarigo, superbe lui aussi, et Pisana, présents, engagés.
Devant une salle remplie Ă  son comble, – comme lors du rĂ©cital CHOPIN du pianiste Gaspard Dehaene (le 9 fĂ©v prĂ©cĂ©dent), les solistes font chavirer la salle aux moments des saluts tant la rĂ©alisation musicale fut satisfaisante, d’autant que le choeur et l’orchestre (Appasionato sous la baguette de Mathieu Herzog, mozartien remarquĂ©, et ici verdien de premier plan) a participĂ© activement Ă  la rĂ©ussite de la soirĂ©e. A venir, de prochaines surprises concoctĂ©es par Domingo en personne, qui entend exprimer son amour de la France et des parisiens. Rendez-vous est pris.

 

 
 

 
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LIRE aussi notre dossier sur l’opéra I DUE FOSCARI de Giuseppe Verdi : http://www.classiquenews.com/les-deux-foscari-a-marseille/

LIRE aussi la critique de I due Foscari Ă  Marseille avec Piero Capuccilli, nov 2015 : http://www.classiquenews.com/les-deux-foscari-a-marseille/

 
 

 

ARTE. Christoph MARTHALER met en scène Giuditta de Franz Lehar (Munich, déc 2021)

marthaler-munich-dec-2021-engel-critique-opera-review-classiquenews-giuditta-lehar-operaARTE. LEHAR : GIUDITTA, dim 27 fĂ©v 2022, 23h25. La dernière opĂ©rette de Franz Lehar (1870 – 1948) est créée Ă  l’OpĂ©ra de Vienne en janvier 1934, en pleine ascension hitlĂ©rienne. Comme les drames prĂ©cĂ©dents du compositeur autrichien (La Veuve Joyeuse, immense succès de 1905 ; , Au Pays du sourire…),  la partition cultive les mĂ©lodies enivrantes, d’une voluptĂ© habile et langoureuse, comme son hĂ©roĂŻne. Le Lehar sexagĂ©naire a le souci du renouvellement et fixe avec Giuditta une nouvelle parure dans le genre de l’opĂ©rette : sa fin tragique, sa tension fondĂ©e sur l’impossibilitĂ© et le dĂ©samour, marque l’esprit des spectateurs, plus familier des comĂ©dies fleur bleue  au dĂ©nouement lĂ©ger, insouciant, heureux.  Rien de tel avec Giuditta qui Ă©prouve les illusions amères des amours vĂ©nales. Comme Traviata de verdi, la Giuditta de Lehar connaĂ®t le pur amour, le seul, l’unique, Ă©vanescent  et barbare, qui mène au sacrifice, Ă  la frustration, Ă  la mort sentimentale. Le cynisme et l’argent dĂ©truisent mĂ©ticuleusement le miracle de l’amour. Lehar dĂ©ploie ici une vĂ©ritable facilitĂ© mĂ©lodique dans une orchestration colorĂ©e et chatoyante, proche en cela de Puccini dont il fut proche et qui composa La Rondine (au style proche de Lehar, et dont le sujet rappelle celui de Giuditta).

Dans cette production de l’Opéra de Munich, présentée en déc 2021, le metteur en scène Christoph Marthaler souligne la barbarie des années 1930, complétant la musique de Lehar, d’emprunts aux autres compositeurs de l’époque, propres à l’entre-deux guerre : Bartok, Korngold, Chostakovitch, sans  omettre des lieder de Viktor Ullmann, Hans Eiseler, Alban Berg ; et aussi d’extraits de la pièce d’odon Von Horvath, « Sladek, soldat de l’armée noire » qui accentue encore le démonisme d’une période où les nazis prennent le pouvoir.

VOIR GIUDITTA de Franz LEHAR
Diffusion sur ARTE, dimanche 27 février 2022, 23h25
En replay, sur ARTEconcert jusqu’au 28 mai 2022
https://www.arte.tv/fr/videos/106846-000-A/franz-lehar-giuditta/

Distribution
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Production à l’affiche du Nationaltheater de Munich, décembre 2021.

Franz Lehár (1870-1948) : Giuditta
Spieloper en 3 actes sur un livret de Paul Knepler et Fritz Löhner-Beda.

Vida Miknevičiūtė (Giuditta)
Daniel Behle (Octavio)
Kerstin Avemo (Anna / Anita)
Sebastian Kohlhepp (Sladek / Pierino)
Jochen Schmeckenbecher (Antonio) ;
Bayerisches Staatsorchester
Titus Engel, direction.
Mise en scène : Christoph Marthaler

Synopsis des 5 tableaux de Giuditta
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I : Pourtant mariée (au vieux Manuele), Giuditta qui se rêvait ballerine comme sa mère, s’éprend du jeune officier Octavio.  Aussi quand celui ci est affecté en Lybie, Giuditta le suit. II, III : les deux amants filent l’idylle idéale mais Octavio doit partir au front. IV : Devenue danseuse de cabaret à Tripoli, Guiditta monnaie ses charmes à qui peut payer comptant dont Lord Barrymore… au grand dam d’Octavio qui revient de sa mission, mais est écarté. V : 5 années ont passé. Octavio pianiste de bar, joue dans un palace européen. Au bars d’un duc, son nouvel amant, Giuditta tente de reconquérir l’amant qu’elle a aimé en Lybie. Mais celui-ci ne veut lus souffrir et refuse net les avances de la belle séductrice.

CRITIQUE CD. BRUCKNER : Symphonies n°1, n°5 (Gewandhausorchester Leipzig, Nelsons – Live 2020 – 2021 – 2 cd Deutsche Grammophon)

Bruckner-Symphonies-Nos.-1-5-Wagner-Tristan-und-Isolde critique cd review classiquenewsCRITIQUE CD. BRUCKNER : Symphonies n°1, n°5 (Gewandhausorchester Leipzig, Nelsons – Live 2020 – 2021 – 2 cd Deutsche Grammophon) – Très judicieux le rapprochement de Wagner et Bruckner dans le cd 1, le second Ă©tant admiratif du premier. En assistant en 1865 Ă  la crĂ©ation de « Tristan und Isolde » Ă  Munich, Bruckner a le choc de sa vie : il est donc lĂ©gitime de souligner ce fait artistique en jouant d’abord l’emblème tristanesque « Prelude and Liebestod », (profondeur sombre et cuivrĂ©e), superbement enchaĂ®nĂ© avec la Symphonie 1 de Bruckner (WAB 101, version de Vienne 1891) – La filiation se rĂ©alise par la texture mĂŞme et l’orchestration proche des deux auteurs. Nelsons y ajoute aussi la coloration lisztĂ©enne de l’orchestre (Bruckner assistant aussi en cette annĂ©e 1865, Ă  la crĂ©ation de l’oratorio de Liszt, « Sainte-Elisabeth »). Les qualitĂ©s du Gewandhaus s’imposent particulièrement dans la texture dense mais transparente du Wagner initial : ici surgit la matière musicale qui devait tant inspirer le Bruckner symphoniste alors quadragĂ©naire.
Saisissant dans sa rugosité primitive, la partition brucknérienne, le chef souligne son caractère plus narratif que spirituel : plus resserrée, aux mouvements courts, la Symphonie n°1 de Bruckner est la moins développée, passant cependant de pianissimi murmurés aux déflagrations assumées en triple forte. Le Scherzo, exposé ordinairement comme une danse macabre (ce qui peut se défendre), brille ici par sa rusticité violente où perce dans le trio, l’impertinente facétie du hautbois. Nelsons prend soin d’exprimer le souffle primitif de cet opus, sa vitalité originelle, avant que le mysticisme et le sens de la solennité ne portent les suivantes à dépasser en durée, les 60 mn.

La Symphonie n°5 pourrait être naturellement appelée « symphonie du destin », tant les forces qu’elle convoquent dès le développement spectaculaire du 1er mouvement requiert des pupitres considérables ; 3 trompettes, 3 trombones, tuba (et 4 cors évidemment) ; cette fanfare, aux appels impérieux expriment la puissance d’un fatum inflexible, souvent éruptif et fracassant : Bruckner y étend considérablement la résonance et le chant imprécatoire de la fosse wagnérienne, qui est sa source première. L’auteur très affaibli et malade la compose entre 1875 et 1878, mais ne l’entendit jamais puisque c’est son disciple Franck Schalk qui la crée en avril 1894, son auteur absent, exténué, s’éteignant 2 ans après… La plus techtonique, la plus mystique, souvent âpre et comme façonnée à grands coups de sabre, explore cependant des sonorités encore inexplorées, souvent vertigineuses ; l’auteur pourtant atteint semble y relever et mesurer l’ampleur d’une cathédrale colossale inconnue, aux déflagrations, à la grandeur inédite… Aux massifs puissants, inquiétants de l’ample Allegro premier (plus de 20 mn) répond un même climat tendu, intranquille de l’Adagio dont le chef souligne la très progressive et lente élucidation en texture harmonique parfois rude et dissonante dont la plénitude et la saturation relève de l’expertise de l’organiste. Le Scherzo est plus martelé ici que réellement rapide, énoncé comme un hymne et une prière désespérée qui tournent au rictus grimaçant : l’on est proche de l’atmosphère mahlérienne ; comme une célébration du génie de Bach (que Bruckner a dû maîtriser comme organiste), mais ici démultipliée par le souffle beethovénien et la grandeur wagnérienne, le Finale retrouve les proportions du premier Allegro : la double fugue (associant trompettes / trombones au motif initial des basses), exprime la conscience et la pensée universelle du Bruckner pèlerin ardent, que dévore et porte une foi mystique inextinguible. Le Gewandhausorchester de Leipzig a la tension, l’éloquence requises ; la tension qu’imprime Andris Nelsons, qui poursuit ainsi son intégrale Bruckner (pour l’année du bicentenaire en septembre 2024, comme celle simultanée de Thielemann chez Sony) y fructifie : en bénéficiant des ressources expressives de Leipzig, le chef letton (qui dirige aussi le Symphonique de Boston / BSO, depuis 2014) déploie une sonorité plus rustique et âpre que lyrique et transparente (qualités que l’on retrouve davantage chez son « rival » Thielemann qui dirige les Wiener Philharmoniker). Voici donc les nouveaux jalons d’une intégrale Bruckner, franchement caractérisée, parmi les plus intéressantes actuellement.

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CRITIQUE CD. BRUCKNER : Symphonies n°1, n°5 (Gewandhausorchester Leipzig, Nelsons – Live 2020 – 2021 – 2 cd Deutsche Grammophon)

 

 

 

 

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AUTRES CD BRUCKNER par Andris NELSONS et le Gewandhausorchester, critiqués sur CLASSIQUENEWS :

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bruckner andris nelsons symphony n 3 gewandhaus orchester cd review critique par classiquenews 0028947975779CD, compte rendu critique. BRUCKNER : Symphonie n°4. Andris Nelsons. Gewandhausorchester Leipzig (1 cd Deutsche Grammophon 2017). La 4è de Bruckner est dite « romantique » : serait-ce parce qu’elle réussit une nouvelle sagesse ample et majestueuse malgré l’ampleur des effectifs ; le sentiment préservé malgré l’esprit du colossal ? La noblesse parfois emphatique, la solennité parfois spectaculaire ne doivent jamais amoindrir l’allant altier, l’électricité souterraine qui illumine de l’intérieur, une partition toute dédiée à l’auteur de Tristan : l’ampleur des tutti, le clair obscur âpre, mordant, violent, sauvage des contrastes, opposant, affrontant les pupitres…

https://www.classiquenews.com/cd-compte-rendu-critique-bruckner-symphonie-n4-andris-nelsons-gewandhausorchester-leipzig-1-cd-deutsche-grammophon-2017/

 

 

bruckner 7 symphonie andris nelsons gewandhaus leipzig critique cd cd review par classiquenewsCD, critique. BRUCKNER : 7è Symphonie (Gewandhausorchester Leipzig / Andris Nelsons, 2018 – 1 cd DG). La 7è de Bruckner est un sommet autant majestueux que d’une tendresse infinie, celle d’un organiste devenu par la seule force de sa volonté… symphoniste de premier plan, immensément dévoué à l’exemple de Wagner. Toute la 7è est un hommage et une célébration de l’oeuvre wagnérien. Bruckner sincère et entier, bien que très tardivement célébré comme compositeur, – son premier succès est justement la 7è, acclamé alors qu’il a déjà 60 ans, développe de superbes couleurs funèbres et intimistes… Andris Nelsons poursuit son intégrale pour DG Deutsche Grammophon avec le sens de la grandeur (brahmsienne …

http://www.classiquenews.com/cd-critique-bruckner-7e-symphonie-gewandhausorchester-leipzig-andris-nelsons-2018-1-cd-dg/

 

 

NELSONS andris cd critique cd review classiquenews CLIC de classiquenews Bruckner-Symphony-number-3-Wagner-Tannhauser-OvertureCD, compte rendu critique. BRUCKNER : Symphonie n°3, WAGNER : Ouverture de Tannhäuser / Andris Nelsons / Gewandhausorchester Leipzig ( 1 cd Deutsche Grammophon, Leipzig juin 2016). L’expérience à laquelle nous convie le chef letton Andris, – pas encore quadragénaire (né à Riga en Lettonie en 1978), est une immersion intelligente et réfléchie, de Bruckner à Wagner, d’autant plus pertinente et convaincante que l’ambition des effectifs requis ici n’écarte jamais le souci de précision claire, de sonorité transparente et riche. C’est même un modèle de finesse et d’élégance à mettre à présent au crédit d’un jeune chef superbement doué (on le connaît davantage dans une fosse d’opéra que comme maestro symphonique), dont le parcours discographique chez DG Deutsche Grammophon devra être suivi à présent, avec l’attention qu’il mérite… Le chef débute ainsi sa coopération à Leipzig comme directeur musical du Gewandhausorchester Leipzig,- fonction dédiée qu’il partage avec un poste équivalent à Boston (directeur musical du Boston Symphony Orchestra).

http://www.classiquenews.com/cd-compte-rendu-critique-bruckner-symphonie-n3-wagner-ouverture-de-tannhauser-andris-nelsons-gewandhausorchester-leipzig-1-cd-deutsche-grammophon-leipzig-juin-2016/

 

 

 

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AUTRES CD ou CONCERTS d’Andris NELSONS, critiqués sur CLASSIQUENEWS :

CD coffret, événement, critique. ANDRIS NELSONS / BEETHOVEN :BEETHOVEN andris nelsons 9 symphonies wiener philharmoniker 5 cd blu ray DG Deutsche Grammophon Complete symphonies / intégrale des 9 symphonies : Wiener Philharmoniker (2017 – 2019  -  5 cd + bluray-audio DG Deutsche Grammophon). La direction très carrée du chef letton Andris Nelsons (né à Riga en 1978) brillante certes chez Bruckner et Chostakovitch, efficace et expressive, finit par dessiner un Beethoven assez réducteur, parfois caricatural (Symphonies n°7 et 8). De la vigueur, de la force, des éclairs et tutti martiaux, guerriers… mais pour autant est-ce suffisant dans ce grand laboratoire du chaudron Beethovénien qui exige aussi de la profondeur et une palette de couleurs des plus nuancées ?
http://www.classiquenews.com/cd-coffret-evenement-annonce-andris-nelsons-beethoven-complete-symphonies-integrale-des-9-symphoniess-wiener-philharm-2017-2019-5-cd-bluray-audio-dg-deutsche-grammophon/

 

 

Chostakovich_CD nelsons bostonCD, critique. SHOSTAKOVICH / CHOSTAKOVITCH : Symphonies n°6 et 7 (Boston Symph. Orch / Andris Nelsons) / 2 CD Deutsche Grammophon. Fin du cycle des Symphonies de guerre de Chostakovich par le Boston Symphony et le chef letton Andris Nelsons. Ce 3è et dernier volume attestent des qualités identiques observées dans les opus précédents : puissance et richesse du son. Créée à Leningrad en 1939 par le légendaire Evgeni Mravinski, la Symphonie N° 6 op. 54, est la plus courte des symphonies ; Nelsons souligne le caractère endeuillé du Largo préliminaire, détaillant les solos instrumentaux pour flûte piccolo, cor anglais, basson afin de déployer la matière nocturne, étouffante de cette longue séquence grave…
http://www.classiquenews.com/cd-critique-shostakovich-chostakovitch-symphonies-n6-et-7-boston-symph-orch-andris-nelsons-2-cd-deutsche-grammophon/

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CRITIQUE, CD événement. LULLY : Grands Motets VOL.1 (Les Epopées, Stéphane Fuget, 1 CD Château de Versailles Spectacles, 2020)

grands motets_Lully stephane fuget epopees critique classiquenewsCRITIQUE, CD Ă©vĂ©nement. LULLY : Grands Motets VOL.1 (Les EpopĂ©es, StĂ©phane Fuget, 1 CD Château de Versailles Spectacles, 2020) – Face au manuscrit du XVIIè, si fragmentaires pour l’interprète actuel, – comment restituer ici nuances, instrumentation, ornements, coups d’archet, tempos…?, autant d’élĂ©ments qui manquent sur les manuscrits de Lully. StĂ©phane Fuget se pose les bonnes questions et trouve les options justes pour la rĂ©alisation de ses Grands Motets dont voici le volume 1, « pour le temps de pĂ©nitence ». Battements, tremblements, martèlements… sont quelques uns des effets inventoriĂ©s, possibles, avĂ©rĂ©s sur le plan historique, que le chef des EpopĂ©es connaĂ®t et use avec une grande finesse et un Ă  propos souvent fulgurant, .. soit un discernement qui dĂ©voile combien il connaĂ®t le rĂ©pertoire et les sources d’informations historiques (de Muffat Ă  Bacilly… dont les noms Ă©maillent la trop courte introduction qu’il a rĂ©digĂ© en intro au livret). En maĂ®tre des ornements, le chef nous offre de (re)dĂ©couvrir la ferveur de Lully, le reconsidĂ©rer comme alchimiste et orfèvre, ici grand dramaturge de la dĂ©ploration lacrymale oĂą perce le relief des mots. Le grand amuseur du Roi sait aussi faire pleurer la Cour. C’est manifestement le cas pour le Dies Irae et le De Profundis jouĂ©s en 1683 Ă  Saint-Denis pour les funĂ©railles de la reine Marie-ThĂ©rèse. Lully y dĂ©verse des torrents de scintillements recueillis, bouleversant la tradition musicale oĂą l’on connaĂ®t aussi Robert, Dumont, Lalande, Desmarets…

L’accentuation textuelle, la durée des notes, l’affirmation de certaines syllabes composent une tenture liturgique des plus riches, d’autant plus saisissantes que le traitement spécifique du texte sacré, aux accents légitimes, gagne une vérité impressionnante, de surcroît dans l’acoustique particulière de la chapelle royale, un chantier architecturale que ne connut pas Lully mais à laquelle la musique semble s’accorder idéalement entre faste et sincérité. L’articulation et la projection du texte, les cris maîtrisés, les respirations, les suspensions, jusqu’aux silences, tout surprend et saisit par l’intelligence linguistique ; autant d’accents qui partagés chez solistes (sans exception) et chœurs, produisent une vaste tragédie humaine, cette vallée de larmes par exemple (« O Lachrymae », motet plus ancien, remontant à 1664), aux épisodes bien contrastés, individualisés, et pourtant unifiés… exprimant la profondeur de la déploration inconsolable qui cependant étend une ineffable dignité collective… à laquelle répond le nimbe des flûtes (« O fons amoris »).

 

 

Flexibilité chorale, individualisation et caractérisation des voix solistes, splendide nimbe orchestral : les Épopées triomphent

Somptueux théâtre de la mort

 

 

Plus grave et sombre encore, le très impressionnant « De Profundis » édifie un théâtre funèbre d’une intensité exceptionnelle ; il déploie une somptueuse pâte sonore, instrumentale comme vocale (l’orchestre de Lully est une autre voie fabuleuse à explorer, aux côtés de ses 12 motets)… Chaque soliste, parfaitement à sa place, chante à pleine voix là encore la noble douleur du deuil, et la tragédie de la mort, et le déchirement de la perte. Et dans chaque élan subtilement distribué parmi les voix solistes et le choeur, se dresse la si vaine symphonie des sentiments humains face à la faucheuse, la prière terrestre qui implore, à la fois fragile et pénitente, mais engagée dans chaque inflexion. Ce travail du verbe agissant, du geste vocal est remarquable. CLIC_macaron_2014Autant de caractérisation dramatique, aussi orfévrée, faisant chatoyer chaque nuance de la tapisserie lullyste marque l’interprétation du genre. Un Lully à la fois solennel et majestueux, ardent, fervent, humain, aux vertiges murmurés inédits (« Requiem æternam dona eis Domine », aux lueurs éplorées et comme gagnées de haute lutte, in extremis : avec l’accent suspendu sur la dernière phrase « Et lux perpetua luceat eis »). Les Épopées ont tout : la fièvre de l’opéra, le sentiment de la ferveur. On attend déjà la suite avec impatience car c’est bien l’intégrale des Grands Motets de Lully qui s’annonce ainsi de bien belle façon.

 

 

 

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CRITIQUE, CD événement. LULLY : Grands Motets VOL.1 (Les Epopées, Stéphane Fuget, 1 CD Château de Versailles Spectacles, enregistré, filmé en mars 2020) / CLIC de CLASSIQUENEWS hiver 2022.

 

 

 

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TEASER VIDEO ici :
https://www.facebook.com/chateauversailles.spectacles/videos/379915923285260/

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VOIR en replay le programme de ce CD Grands Motets de Lully (vol 1) sur ARTEconcert / jusq’11 nov 2023 :
https://www.classiquenews.com/streaming-concert-grands-motets-de-lully-les-epopees-stephane-fuguet-2020/

Parmi le choeur, des solistes de première valeur : Claire Lefilliâtre, Ambroisine Bré, Cyril Auvity, Marc Mauillon, Renaud Delaigue, Marco Angioloni, … autant de tempéraments qui dans la mesure et la nuance nécessaire, requise par la sensibilité orfévrée du chef Stéphane Fuget, expriment l’individualité des croyants assemblés. Ce sens de l’incarnation distingue l’approche de toutes celles qui l’ont précédée : collectif certes, surtout réunion de fervents dont l’ardeur personnelle et intime, revendiquent l’émotion, dans les duos, trios alanguis, les sursauts collectifs, rythmiquement intrusifs, comme précipités, qui leur succèdent… Remarquable compréhension de la ferveur lullyste et versaillaise … Présentation par Alban Deags.

 

 

 

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CRITIQUE, CD, Ă©vĂ©nement,J HAYDN : La CrĂ©ation – Yeree Sue … Le Concert des Nations / Jordi Savall (2 cd ALIA VOX 2021)

savall-jordi-la-creation-die-schopfung-yeree-suh-matthias-winckhler-critique-cd-review-classiquenews-CLIC-alia-voxCRITIQUE, CD, Ă©vĂ©nement,J HAYDN : La CrĂ©ation – Yeree Sue … Le Concert des Nations / Jordi Savall (2 cd ALIA VOX 2021) – De Haydn, Jordi Savall avait dĂ©jĂ  enregistrĂ© Les Sept Dernières Paroles du Christ en croix (2007) – pour La CrĂ©ation (créé en 1798), le chef gambiste catalan retrouve Le Concert des Nations et la Capella Reial de Catalunya. D’une exceptionnelle cohĂ©rence artistique, la lecture de Jordi Savall Ă©labore une vision Ă  la fois distanciĂ©e (cuivres lointains dès l’ouverture, dans le chaos primordial) et aussi profonde et très poĂ©tique. Il fait de la partition, un manifeste inondĂ© de lumière, le prolongement des oratorios de Haendel (« notre maĂ®tre Ă  tous », selon ses propres mots, et qu’il a pu Ă©couter lors de son sĂ©jour Ă  Londres, en juin 1791.
Le chef soigne le continuum harmonique comme clé d’accès et comme voûte de tout le cheminement de l’ombre inquiétante à la lumière divine. Savall souligne combien le génie de Haydn triate à sa façon les grandes masses chorales haendéliennes ; y fusionne l’énergie martiale de Beethoven et aussi la grâce tendre de Mozart (dont Haydn cite certains motifs fameux comme la ci darem la mano du Don Giovanni dans le trio avec choeur (partie II) ; ainsi tout au long des 2 premières parties, quand Dieu décide de l’ordre des éléments qu’il fait naître du rien et des ténèbres, le maître d’Esterházy fait surgir une formidable prière de célébration qui loue le miracle de la création : dans ce cadre harmonieux, se dresse Adam et Eve, dans la 3è partie (au 7 jour, quand Dieu au repos contemple son œuvre), dont le sentiment de bonheur amoureux s’exalte, expression finale d’une peinture qui représente et encense le miracle de la Nature créée par Dieu.
CLIC_macaron_2014L’orchestre n’est pas que narratif : suivant le texte Ă©laborĂ© par Swieten, – ami de Haydn et haendĂ©lien passionnĂ©, il exprime Ă  la façon de la future pastorale de Beethoven, toutes les nuances du motif naturel et de la cosmogonie naissante. Les solistes sont proches de l’idĂ©al, en particulier la soprano et la basse, d’une musicalitĂ© directe ; ils incarnent chacun Gabriel et RaphaĂ«l ; puis Eve et Adam dans la dernière sĂ©quence terrestre. Timbre clair et veloutĂ© de Yeree Sue ; noblesse ductile, musicalitĂ© ronde et flexible, d’une intelligence expressive de Matthias Winckhler. Sans omettre le scintillant Uriel de Tilman Lichdi, articulĂ©, prĂ©sent, impliquĂ© tout autant. Chacun exprime tout ce qui subjugue dans La CrĂ©ation, non plus l’homme, pĂŞcheur et d’une intranquille fragilitĂ© comme chez Bach, mais l’être supĂ©rieur et parfait, lumineux qui (avant le pĂ©chĂ© Ă©videmment) couronne l’œuvre divine car il est Ă  l’image de son crĂ©ateur : parfait. Savall sculpte lui aussi par son orchestre ductile, l’homme accompli dont Haydn met en musique la nature idĂ©ale, connectĂ©e au monde et aux animaux nouvellement nĂ©s. Le chef montre aussi Ă  quel point l’écriture musicale, le chant et la parole des instruments, inscrivent le miracle sonore comme une manifestation tangible de l’harmonie universelle. Remarquable lecture.

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CRITIQUE, CD, Ă©vĂ©nement,J HAYDN : La CrĂ©ation – Yeree Sue … Le Concert des Nations / Jordi Savall (2 cd ALIA VOX 2021) – Enregistrement rĂ©alisĂ© du 5 au 7 mai 2021 Ă  la CollĂ©giale du Château de Cardona (Catalogne) par Manuel Mohino – ALIA VOX – AVSA994

CD1 : 54’18 + CD2 : 49’

Distribution
Le Concert des Nations / Manfredo Kraemer, concertino
La Capella Reial de Catalunya
Jordi Savall, direction
Yeree Sue, Gabriel, Eva
Tilman Lichdi, Uriel
Matthias Winckhler, Raphaël, Adam

CD événement, réédition. JS BACH : Famous Cantates VOL 1. Ton Koopman (1 cd Challenge classics)

challenge classics koopman ca tates js bach vol 1 muhlhausen 1707 cd critique classiquenews koopman cd critiqueCD événement, réédition. JS BACH : Famous Cantates VOL 1. Ton Koopman (1 cd CHALLENGE Classics). Heureuse série de 4 cantates parmi les plus dramatiques et filment architecturées, rééditée par le label Challenge classics en cette fin 2021. La BWV 4 exprime le doute et la fragilité humaine des croyants en quête de Dieu (les deux duos pour soprano et alto puis soprano et ténor) tandis que la basse réconforte, rassérène par sa foi intangible. Le soprano de Barbara Schlick incarne cette tendresse fragile irradiée par Christ comme la tendresse sobre et simple de l’excellent ténor Guy de Mey. On ne peut trouver actuellement semblable quatuor de solistes, dans l’intensité sincère, la clarté incandescente, la simplicité aussi dépouillée qu’ardente ; heureux Koopman qui réunit alors la crème des chanteurs, capables d’exprimer la ferveur la plus épurée, la plus directe et franche.
La BWV 71 exprime la même unité dans le questionnement fervent qui culmine dans le sublime choeur avec hautbois et flûtes « Du wollest des Feinde niche gobent », d’une tendresse collective désarmante.
La BWV 131 affirme chez Bach une nouvelle maîtrise de la suspension chorale, d’un souffle suspendu, éthéré, symptôme d’une foi apaisée, en apesanteur ainsi qu’en témoigne les choeurs somptueux de cette cantate très aboutie dont celui pour ténor « Meine Seele wartet auf den Herrn », d’une constante certitude de plus de 6mn ! … une longueur inédite chez le Director Musices de Leipzig.
Chef d’oeuvre absolu, la BWV 106 « actus tragicus », est introduite par la sinfonia pour flûtes / traverses obligés, vraie épiphanie pastorale et tendre qui convoque immédiatement un enchantement angélique que le choeur qui suit prolonge par sa candeur lumineuse (Gottes Zenit est die allerbeste Zeit). Il s’agit d’un opéra liturgique d’une finesse bouleversante. L’accord alto / basse profite des timbres à l’énoncé clair et simple des deux solistes, Kai Wessel et Klaus Martens, deux visages de la ferveur, l’un inquiet, fragile ; le second confiant, sûr, secondé par le choeur …paradisiaque.
CLIC D'OR macaron 200koopman-oratorio-Bach-classiquenews-ton-koopman-dirige-labo_603x380EnregistrĂ© Ă  Amsterdam en 1994, le programme enchante de bout en bout, tĂ©moignant de l’approche de Koopman, d’une cohĂ©rence d’intention manifeste voire irrĂ©sistible, entre sincĂ©ritĂ© et franchise, profitant autant des caractères individualisĂ©s des solistes chanteurs que du choeur inspirĂ© comme des instrumentistes composant son Amsterdam Baroque, Orchestra & Choir. Magistrale plĂ©nitude spirituelle au dĂ©but des annĂ©es 1990. C’est un rappel de ce que le chef et claveciniste lĂ©gendaire a rĂ©alisĂ©, il y a plus de 25 ans Ă  prĂ©sent, une maĂ®trise qui est acte de sincĂ©ritĂ© majeur lequel s’est renouvelĂ© lors du dernier Bach Festival Leipzig 2021 / BACHFEST LEIPZIG 2021, oĂą Koopman dirigeait en livre streaming plusieurs cantates, le Magnificat et la Passion selon Saint-Mathieu (Lire notre critique le 14 juin 2021) -  CLIC de CLASSIQUENEWS.

CD événement, critique. ANNA NETREBKO : Amata delle Tenebre (1 cd DG Deutsche Grammophon, 2020, 2021)

Anna-netrebko-amata-delle-tenebre-scala-dg-cd-review-critique-cd-classiquenews-opera-critiqueCD Ă©vĂ©nement, critique. ANNA NETREBKO : Amata delle Tenebre (1 cd DG Deutsche Grammophon, 2020, 2021) – EnregistrĂ© Ă  La Scala de Milan en octobre 2020 et avril 2021, le rĂ©cital new look de la diva des divas actuelles met l’accent sur la couleur tragique : « AimĂ©e des TĂ©nèbres » / Amata delle tenebre… Cette couleur funèbre s’affiche dès le premier air, celui d’Ariane abandonnĂ©e, trahie Ă  Naxos, qui s’éveille alors au gouffre noir ; Strauss y dĂ©veloppe une ample prière Ă  la mort dont le chant de la soprano dĂ©sespĂ©rĂ©e mais digne, et qui veut disparaĂ®tre, exprime dĂ©jĂ  le souffle libĂ©rateur. S’il n’était que ce premier air, le programme laisserait une impression mitigĂ©e tant les aigus sont tendus voire arrachĂ©s, Ă  peine tenus, et l’articulation alĂ©atoire. « Es gibt ein Reich, wo alles rein ist…  / Il y a un royaume oĂą tout est pur », pris de surcroĂ®t sur un tempo trop lent (pour mĂ©nager la voix), s’enlise, techniquement imparfait. Dommage. On y dĂ©cèle la mĂŞme fragilitĂ© que dans ses 4 derniers lieder du mĂŞme Strauss, jadis enregistrĂ©s avec Barenboim, en un cycle certes audacieux et risquĂ©, mais trop disparate vocalement. De plus la cantatrice ne maĂ®trise pas l’abattage straussien.

 

 

 

 

Dans son nouvel album, Anna Netrebko en fiancée des Ténèbres, convainc surtout chez les véristes et Wagner…

Ténèbres éclectiques inconstantes

 

 

Cette réserve énoncée derechef, le reste du programme suscite l’admiration tant la voix cette fois est naturelle, plus flexible et égale tant sur le plan des aigus que du medium, toujours large, riche, onctueux et dense, parfois sépulcral.
En italien, la verdienne avérée depuis ses débuts (et sa première Traviata à Salzbourg), affirme un tempérament de feu, en particulier pour Aida qu’elle a chanté sur scène : âme en transe, palpitante voire incandescente ; par contre son Elisabeth (Don Carlo) manque de brillance ; Côté Puccini, oui sans réserves pour sa Butterfly dont l’intensité du timbre se montre déchirant, sincère, direct ; comme sa Manon, à l’intonation très juste ; idem pour Adriana Lecouvreur de Cilea dont la prosodie s’écoule naturellement… on en redemande évidemment tellement l’extrait nous paraît trop court alors. L’air de Lisa (Dame de Pique) de Tchaikovski est un sommet de brillance tragique (comme d’ailleurs sa Iolanta chantée sur scène et enregistrée, mais qui n’apparaît pas ici) ; avouons notre surprise enthousiaste pour ses 3 Wagner : son Elisabeth (Tannhäuser) rayonne, ardente, éclatante même quand Elsa (Lohengrin) exprime la candeur d’une jeune amoureuse trop naïve ; reste en conclusion de ce récital hors norme, son Isolde : le liebestod est un grand moment de plénitude enivrée (volupté caressante du timbre) qui inscrit l’aimée de Tristan et sa veuve éperdue, telle une torche brûlante prête à rejoindre dans la mort le seul être qui l’inspire. Il est temps que la diva chante le rôle sur scène ! Dommage que cette fin CLIC_macaron_2014salvatrice ne trouve pas dans le tout début straussien la même évidence caractérisée. Nous tenions là, entre ses deux extrêmes qui se répondent, un admirable récital lyrique dont la sincérité aurait été pleine et entière. Quoiqu’il en soit, celle qui s’apprête en décembre 2021 à inaugurer justement la nouvelle saison lyrique de la Scala (en Lady Macbeth) continue de nous surprendre et nous troubler par une implication personnelle parfois sidérante, toujours entière et viscérale.

Plusieurs clips vidéos dont certains filmés à la Scala, accompagnent la sortie de cet album marquant dont la mort de Didon de Purcell (qui laisse aussi mitigé en raison de la ligne vocale pas toujours tenue et claire, malgré comme toujours la sincérité ardente de l’intonation). RIccardo Chailly suit les volutes envoûtantes de ce récital sans égal aujourd’hui. La cinquantaine diverse et généreuse, la diva continue de nous subjuguer.

 

 

tracklisting / Programme des airs “Amata delle Tenebre”
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1. Richard Strauss – Ariadne auf Naxos : « Es gibt ein Reich, wo alles rein ist aus »
2. Giuseppe Verdi – Aida : « Ritorna vincitor! … Numi, pieta »
3. Giuseppe Verdi – Don Carlo : « Tu che le vanita conoscesti del mondo »
4. Richard Wagner – Tannhäuser : « Dich, teure Halle, grüß ich wieder »
5. Francesco Cilea – Adriana Lecouvreur : « Poveri diori, gemme de’ prati »
6. Pyotr I. Tchaikovsky – Pique Dame : « Uzh polnoch blitzitsya » – Pique Dame
7. Giacomo Puccini – Madama Butterfly : « Un bel di vedremo »
8. Richard Wagner – Lohengrin : « Einsam in trüben Tagen » – Lohengrin
9. Giacomo Puccini – Manon Lescaut : « Sola, perduta, abbandonata »
10. Henry Purcell – Dido and Aeneas : « Thy hand, Belinda … When I am laid in earth »
11. Richard Wagner – Tristan und Isolde : « Mild und leise wie er lächelt »

Anna Netrebko, soprano / Orchestre du Teatro alla Scala
Riccardo Chailly, direction – 1 cd Deutsche Grammophon 2894860531 – DurĂ©e : 1h06’

 

 

 

 

 

 

VIDEO : ANNA NETREBKO / DIDO alal Scala, MIlano – CLIP vidĂ©o

Anna Netrebko – Purcell: Dido and Aeneas, Z. 626: “When I am laid in earth”

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Les autres cd ANNA NETREBKO critiqués sur CLASSIQUENEWS :

 

Verismo : le nouvel album choc d'Anna NetrebkoCD, compte rendu critique. « VERISMO » : Boito, Ponchielli, Catalani, Cilea, Leoncavallo, Mascagni, Puccini, airs d’opéras par Anna Netrebko, soprano (1 cd Deutsche Grammophon). De La Wally à Gioconda, d’Adrienne Lecouvreur à Marguerite, sans omettre les pucciniennes Butterfly, Liù et Turandot, aux côtés de Manon Lescaut, Anna Netrebko confirme son immense talent d’actrice. En plus de l’intensité d’une voix de plus en plus large et charnelle (medium et graves sont faciles, amples et colorés), la soprano émerveille et enchante littéralement en alliant risque et subtilité. C’est à nouveau une réussite totale, et après son dernier album Iolanthe / Iolanta de Tchaikovsky et celui intitulé VERDI, la confirmation d’un tempérament irrésistible au service de l’élargissement de son répertoire… Au très large public, Anna Netrebko adresse son chant rayonnant et sûr ; aux connaisseurs qui la suivent depuis ses débuts, la Divina sait encore les surprendre, sans rien sacrifier à l’intelligence ni à la subtilité. Ses nouveaux moyens vocaux même la rendent davantage troublante. CLIC de CLASSIQUENEWS de septembre 2016.

 

 

netrebko anna strauss barenboim staatskapelle berlin deutsche grammophon cd anna netrebkoCD / Le Strauss d’Anna Netrebko… Leonora du Trouvère (Salzbourg l’été dernier, après l’avoir créé à Berlin en décembre 2013), aujourd’hui furieuse et battante Lady Macbeth du même Verdi actuellement au Met, Anna Netrebko poursuit son amour du risque avec une Norma de Bellini annoncée pour l’ouverture de la saison 2017-2018 du Metropolitan Opera… Pas vraiment belcantiste comme ont pu l’être Callas, puis Sutherland ou Caballé, Anna Netrebko n’en partage pas moins le goût des défis de ses ainées. Elle a su affirmer ainsi une éblouissante Elvira dans I Puritani, il y a déjà sept ans (déjà au Met en 2007). Son Bellini comme souvent chez elle, touche par son timbre corsé, ses aigus diamantins et métallisés, surtout en dépit d’une coloratoure parfois fastidieuse côté agilité et une justesse pas sûre, une sincérité de ton qui saisit par son angélisme hyper féminin, plutôt très incarné (une couleur charnelle qui fait la valeur de sa Manon puccinienne)… De quoi nous rendre déjà impatients car Norma est le rôle féminin par excellence : digne et tragique. Parution : octobre 2014.

 

 

 

anna Netrebko, cd souvenris 2008CD. Anna Netrebko : Souvenirs (2008) …   Anna Netrebko n’est pas la plus belle diva actuelle, c’est aussi une interprète à l’exquise et suave musicalité. Ce quatrième opus solo est un magnifique album. L’un de ses plus bouleversants. Ne vous fiez pas au style sucré du visuel de couverture et des illustrations contenues dans le coffret (lequel comprend aussi un dvd bonus et des cartes postales!), un style maniériste à la Bouguereau, digne du style pompier pure origine… C’est que sur le plan musical, la diva, jeune maman en 2008, nous a concocté un voyage serti de plusieurs joyaux qui font d’elle, une ambassadrice de charme… et de chocs dont la tendresse lyrique et le choix réfléchi des mélodies ici regroupées affirment une maturité rayonnante, un style et un caractère,  indiscutables.

 

 

LIVRE événement, critique. Jean-Yves Clément : CHOPIN et LISZT, la magnificence des contraires (Éditions Premières Loges, sept 2021)

chopin-et-liszt jean yves clement premieres loges livre critique classiquenewsLIVRE Ă©vĂ©nement, critique. Jean-Yves ClĂ©ment : CHOPIN et LISZT, la magnificence des contraires (Éditions Premières Loges, sept 2021). CLIC de CLASSIQUENEWS automne 2021. Il est tentant toujours de rapprocher les deux compositeurs pianistes les plus passionnants de l’ère romantique : nĂ©s contemporains, Chopin (1810) et Liszt (1811) incarnent chacun Ă  leur façon, la question du piano, de la musique ; chacun interroge jusqu’à la forme, son sens, son dĂ©veloppement ; l’écriture mĂŞme comme la pensĂ©e musicale. Evidemment notre Ă©poque de la radicalitĂ© affectionne l’éloquente estimation des oppositions… Leurs diffĂ©rences renforcent cette “magnificence des contraires” : le premier, expatriĂ© nostalgique, maladif et pudique, renfermĂ© patriote, concentrĂ© sur son Ĺ“uvre, chĂ©tif mais frappĂ© et portĂ© par une crĂ©ativitĂ© gĂ©niale malgrĂ© une vie fauchĂ©e (Chopin meurt Ă  39 ans) ; le second, nĂ© hongrois mais ouvert au monde, citoyen universaliste et fraternel, virtuose flamboyant et spectaculaire, baladin surdĂ©ployĂ©, surexposĂ©, … pourtant tout autant habitĂ© par un feu intĂ©rieur qui interroge son rapport Ă  la musique. C’est pourquoi sa 2è vie, celle amorcĂ©e avec la Sonate en si mineur, (et après la mort de son gĂ©nial double) impose le Liszt compositeur, obsĂ©dĂ© par une mĂŞme approche critique et spirituel de son art. Ce que rĂ©vèle le texte du livre Ă©ditĂ© par Premières Loges, c’est la pensĂ©e et le cheminement musical de Liszt, Ă©clairĂ© dans son rapport au modèle chopinien. Liszt expĂ©rimentant après Chopin, l’expĂ©rience spirituelle de l’art ; mais lĂ  oĂą le premier la vit en fulgurance, le second passe d’abord par la carrière du rĂ©citaliste (forcenĂ© / extĂ©nuĂ©) pour atteindre Ă  la vĂ©ritĂ© du crĂ©ateur, gĂ©nie de la transformation thĂ©matique (il est mort en 1886 Ă  75 ans). Chopin est dans l’instant touchĂ© par la grâce ; Liszt dans la durĂ©e d’une mĂ©tamorphose permanente. Lumineuse confrontation qui passionne car elle rĂ©vèle tout ce qui bouleverse chez Chopin comme (surtout) chez Liszt.

Au final, la confrontation des deux tempéraments romantiques serait une approche admirative d’une équation féconde, convoquant comme un rébus, la réalité de la dispersion, l’urgence de l’unité ; c’est là que Liszt nous paraît dans toute sa quête critique qu’il n’aurait pas même conscientisé, sans sa profonde compréhension du temps compté de Chopin : le Polonais saisit par son essence et quand il meurt (1849), le Hongrois peut enfin naître à lui-même ; et du concertiste épuisé perdu, devient le compositeur auquel est révélé le sens unifié d’une vie faite œuvre.

Le texte admirable de JY Clément n’est pas comparaison mais témoignage de deux unités réalisées en deux temps distincts, cependant mêlés l’un à l’autre. Liszt serait-il devenu ce génie de la transcendance, apôtre de l’essence, sans Chopin, qui fut l’âme de la musique, mais une âme franche, directe, concentrée, et parfois violente (ce que n’oublie pas de souligner l’auteur)?

En un temps deux fois plus long, Liszt expérimente et revit le calvaire et aussi le miracle de Chopin ; il trouve son essence dans un minimalisme final prédebussyste quand son gendre, Wagner développe pour lui-même et sans rendre hommage à son mentor, la musique qui fusionne temps et espace dans cette durée alchimique du Liszt en pleine mutation chopinienne.

CLIC D'OR macaron 200Tout en rétablissant la violence prophétique de Chopin (ce qui tempère le « raphaëlisme » dont parle cependant non sans justesse Balzac), l’auteur exprime en fin connaisseur, le chemin de croix du dernier Liszt (son doute créateur), ses fabuleuses dernières conquêtes  (le « nocturne » Wiegenlied de 1880, En rêve de 1885…), celui des Nocturnes endeuillés et énigmatiques dont l’épure éthérée (éolienne) tout en renouant avec la vibration chopinienne, annonce la propre ferveur d’un Messiaen… . Passionnant.

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LIVRE événement, critique. Jean-Yves Clément : CHOPIN et LISZT, la magnificence des contraires (Éditions Premières Loges, sept 2021). CLIC de CLASSIQUENEWS automne 2021.

https://www.editions-premieresloges.com/

CD événement, annonce. JEAN-YVES THIBAUDET : Carte Blanche ( 1 cd Decca)

thibaudet-jean-yves-carte-blanche-&-cd-decca-critique-cd-review-classiquenewsCD Ă©vĂ©nement, annonce. JEAN-YVES THIBAUDET : Carte Blanche ( 1 cd Decca). Cela pourrait ĂŞtre le modèle de tout rĂ©cital personnel pour tout artiste capable de conserver la flamme de l’humilitĂ© et de la sincĂ©ritĂ© tout ua long de la carrière. Artiste phare du catalogue Decca (comme aujourd’hui son challenger britannique, Benjamin Grosvenor dont classiquenews a saluĂ© en mars dernier son superbe album Liszt, le programme Carte Blanche de Jean-Yves Thibaudet affirme la personnalitĂ© d’un interprète qui en sachant conjuguer la pudeur et la discrĂ©tion rĂ©alise un nouveau jalon intime, virtuose, hyperĂ©lĂ©gant. Le phrasĂ©, le toucher, la respiration y sont dĂ©ployĂ©s avec art, sans que jamais le naturel de l’intonation ne soit sacrifiĂ© ; aucune posture dans ce pianisme qui paraĂ®t simple et Ă©vident tant il est source de travail, de justesse, d’intelligence nuancĂ©e. Les pièces personnelles composent ainsi un journal, un cahier personnel, une collection de morceaux choisis dont chacun Ă©voque un souvenir cher, une rencontre, une amitiĂ© dont le secret se dĂ©voile dans la musique. Proche du chant, le piano de Thibaudet souligne tout ce qui le lie aux chanteurs (RenĂ© Fleming son amie Ă©voquĂ©e dans l’arrangement de « When you wish upon a star » d’après Jesse Kissel) ; tout ce qu’il doit Ă  ses ainĂ©s tels Alicia de Larrocha (Ă  travers Quejas, o la Maja de Granados), surtout son professeur et maĂ®tre Aldo Ciccolini (Salut d’amour d’Elgar) ; Artiste des ambiances oĂą se lovent le mystère enivrant de souvenirs qui perdurent (Consolation de Liszt, auquel succède le sublime Intermezzo opus 118 n°2 de Brahms…), Thibaudet a choisi en ouverture de ce remarquable album, la Suite qu’il a commandĂ©e pour piano seul, inspirĂ©e du film Pride & Prejudice / Orgeuil et PrĂ©jugĂ©, jalon marquant du cycle de Jane Austen (1813). Le roman romantique a inspirĂ© en 2005 le film très rĂ©ussi de Joe Wright (2005), rĂ©alisateur d’Expiation, autre sommet cinĂ©matographique. Pour le film amĂ©ricano-britannique, Jean-Yves Thibaudet avait enregistrĂ© les sĂ©quences pour piano composĂ©es par Marianelli ; il en dĂ©coule aujourd’hui cette suite spĂ©cifique de 5 airs mĂ©morables dont Dawn, l’initial, est le joyau absolu. De caractère schubertien, l’écriture jaillit comme une CLIC D'OR macaron 200source vive oĂą coule la noblesse de sentiments partagĂ©s enfin avouĂ©s (entre Elizabeth Bennet et D’Arcy). Incontestablement, un parcours intime d’une profonde vĂ©ritĂ©, conçu par un pianiste d’une somptueuse sensibilitĂ© dont la profondeur n’écarte certes pas l’éloquence virtuose (Ă©tude de concert opus 13 de PiernĂ©). Critique Ă  venir dans mag dvd cd livres de classiquenews (Parution annoncĂ©e : 3 – 10 sept 2021 – 1 cd Decca). CLIC de CLASSIQUENEWS de septembre 2021.

PLUS D’INFOS : https://www.deccaclassics.com/en/catalogue/products/carte-blanche-jean-yves-thibaudet-12421

Works by: Marianelli · Couperin · Scarlatti / Schubert · R. Strauss · Chopin / Liszt · Brahms · Elgar / PiernĂ© · Granados · Villa-Lobos – Poulenc · Sancan · M.Gould – Cherkassky · Gershwin

CRITIQUE, opĂ©ra. WAGNER : Tristan und Isolde, le 9 juil 2021. Stuart Skelton (Tristan), Nina Stemme (Isolde) – mise en scène : Simon Stone. LSO, London Symphony Orchestra – Direction musicale : Simon Rattle.

TRISTAN-ISOLDE-AIX-2021-RATTLE-critique-opera-classiquenews-Stemme-Skelton-ZeligCRITIQUE, opĂ©ra. WAGNER : Tristan und Isolde, le 9 juil 2021. Stuart Skelton (Tristan), Nina Stemme (Isolde) – mise en scène : Simon Stone. LSO, London Symphony Orchestra – Direction musicale : Simon Rattle. Certes on nous avait « vendu » cette production comme « l’évĂ©nement d’Aix 2021 ». Que nenni. Dans un dĂ©cor annĂ©e 60, style Mad men, Isolde dans son salon avec vue sur l’ocĂ©an (histoire de faire rĂ©fĂ©rence au vaisseau qui est censĂ© la conduire jusqu’à la cour du roi Marke Ă  bord du bateau oĂą se trouve aussi Tristan), se morfond, pleine de ressentiment et d’ insatisfaction vis Ă  vis de celui qu’elle a jadis soignĂ© et aimĂ© secrètement sous le nom de … Tantris. Le premier acte qui est d’exposition, s’enlise dans un jeu d’acteurs statique, oĂą chacun, d’Isolde, Tristan / Tantris, Ă  Brangaine, figure comme une belle plante de salon. Orchestralement, sous la baguette de Rattle, les instrumentistes ne manquent pas de puissance comme d’expressivitĂ©, mais sonnent Ă©pais.
On attend l’acte II. La mise en scène actuelle ne fait pas rêver loin s’en faut surtout pour la magie nocturne de ce début d’acte qui exprime les langueurs du désir le plus absolu, appel sublime et nocturne à l’anéantissement de la conscience, loin du mensonge du jour… Pas facile d’imaginer cette couleur médiévale du chevalier Tristan et de la princesse Yseult, la belle d’Irlande, couple mythique de l’amour absolu, dans ce décor froid et glacial, style Ikea ou cantine d’Ephad… avec verrière industrielle (!).

Melot-marke-F-zelig-tristan-und-isolde-rattle-aix-2021-opera-critiqueHeureusement, dans toute production, il y a du bon. Franz-Josef Selig, wagnérien d’une rare subtilité (jusque sur la scène de l’Opéra Bastille), éblouit viscéralement en roi Marke, témoin malgré lui de l’effusion des amants magnifiques et maudits; par ses phrasés suggestifs, sa ligne vocale infinie, énoncée en vrai diseur, comme enivrée par la poison de la jalousie et de l’impuissance face au couple divin Yseult / Tristan. Quelle leçon quand il exprime sa blessure car il est ainsi trahi par son cher (et aimé) Tristan… Il y a dans ce timbre blessé de l’Amfortas à venir ; être à jamais marqué dans sa chair et dans l’esprit par une trahison indélébile…
De même, percutant Dominic Sedgwick en Melot, insinueux, vindicatif et juvénile, ardent dans la dénonciation (de Tristan) d’un coeur jaloux et meurtrier (c’est lui qui poignarde Tristan en fin de II)…
Dans les rôles titres, hélas les deux protagonistes font entendre la fatigue de voix hier brillantes ; on est à 100 lieux du couple jeune, du jeune chevalier et de la princesse… La crédibilité scénique en pâtit terriblement. Le brio et l’éclat psychologique, et toutes les nuances d’une partition scintillantes sont absentes. Hélas.

Au Festival d’Aix 2021,
dans une mise en scène désatreuse de Simon Stone,
TRISTAN PREND LE METRO PARISIEN ET MEURT DANS LA RAME

 Tristan und isolde aix en provence 2021 Rattle Stemme Skelton critique opera classiquenews dans le metro

Le III (à 3h44) fait valoir les limites et les incongruités d’une mise en scène trop décalée, une conception qui comme tant d’autres aujourd’hui recherche avant toute fusion avec la musique, sa propre grille de lecture ; une rame de métro emporte les héros marqués par leur destin ; l’admirable air du pâtre (hautbois solo) qui dit tout le dénuement ultime des êtres impuissants et solitaires, est un musicien qui fait la manche… Une voyageuse fait tomber des papiers en prenant son portable et demande son chemin… Evidemment Tristan en habit de soirée se dispute avec Isolde puis est (encore) poignardé par le jeune Melot tout de blanc vêtu… la répétition, l’anecdotique, le manque de cohérence tranchent derechef avec ce qui a précédé. Le solo de Tristan blessé gagne une certaine puissance dans cette rame de métro qui va sa route, à vive allure, aux arrêts de plus en plus improbables… Ainsi va la mise en scène actuelle et le choix des directeurs de théâtres. On déroute chaque soir un peu plus l’auditeur, surtout les néophytes qui pensent alors découvrir sur scène les œuvres marquantes du répertoire, dans toute leur… incohérence visuelle et scénique. Les amateurs d’opéra eux, restent déconcertés par tant de confusion comme d’invraisemblance scénique.

C’est d’autant plus dommage que vocalement, le niveau est relevé à ce moment : Josef Wagner (Kurwenal, très impliqué) ; particulièrement Linard Vrielink (Hirt) excellent diseur… Et Tristan lui-même qui semble porté, inspiré par les insinuations sombres, crépusculaires de la musique, atteint cette articulation chantante et naturelle proche de la parole. Dans une quête de lui-même qui est une confession déjà psychanalytique, où il meurt presque apaisé car il s’est trouvé ; a analysé l’ampleur de son désir pour Isolde. Celui qui a tout vécu, qui a tout compris, peut mourir en paix. Force est de reconnaître la prestation de Stuart Skelton qui donne tout, exprimant les affres de l’homme qui doute et est maudit par le philtre du désir, mais s’émerveille toujours à l’évocation d’Isolde. Autour de lui, les voyageurs du métro, absents à sa prière, à sa sincérité ensanglantée… entrent et sortent de la voiture. A Goncourt, les deux amants se retrouvent, avant que Tristan n’expire.
Autant de voix qui timbrent et articulent enfin un Wagner chambriste, empêtré, sublimé dans les rets d’une langueur infinie. Reconnaissons à Rattle aussi, le sens de la mesure, des équilibres chambristes d’une partition fleuve, suspendue. Et ici, visuellement décortiquée et dénaturée, réécrite, éclatée… c’est à dire à la mode.
On reste perplexe voire agacé par la « conception » de Simon Stone ; par ce chaos de tableaux incohérents qui finit par gêner la perception de la musique et l’unité du drame conçu à l’origine par Wagner. Pour les idées déco et quelques jeux de lumières, on veut bien reprendre le métro avec le metteur en scène australien, et l’inviter à ne pas rater la station BHV Hôtel de ville…

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CRITIQUE, opĂ©ra. WAGNER : Tristan und Isolde, le 9 juil 2021. Stuart Skelton (Tristan), Nina Stemme (Isolde) – mise en scène : Simon Stone. LSO, London Symphony Orchestra – Direction musicale : Simon Rattle.

REVOIR Tristan und Isolde AIX 2021 – Rattle, Stone

https://www.arte.tv/fr/videos/103071-000-A/tristan-et-isolde-festival-d-aix-en-provence-2021/

En replay sur ARTEconcert jusqu’au 30 août 2023.

CD, critique. BACH en miroir. Marie Andrée JOERGER, accordéon (1 cd Klarthe, 2020)

KLA115couv_low BACH en miroir. Marie AndrĂ©e JOERGER, accordĂ©on clic de classiquenews cd critiqueCD, critique. BACH en miroir. Marie AndrĂ©e JOERGER, accordĂ©on (1 cd Klarthe, 2020) – MA Joerger sĂ©lectionne 5 PrĂ©ludes et Fugues de Johann Sebastian auxquels l’accordĂ©oniste fait dialoguer 5 autres Ă©critures dont le sens dramatique, l’acuitĂ© expressive, un dĂ©liĂ© spĂ©cifique dans l’articulation font merveille, rĂ©vĂ©lant une grande interprète au carrefour des styles. Le dĂ©fi est de taille, exigeant pour l’instrumentiste et la musicienne ; de l’impro (PrĂ©lude) au cadre strict et complexe qui suit (fugue), la musicienne convainc de bout en bout grâce Ă  une rare intelligence discursive : le geste est naturel, proche du souffle et de la respiration ; comme il sait habilement dĂ©tailler la texture complexe contrapuntique. Entre rigueur et imagination, la balance est idĂ©ale.
Au cœur du programme des plus inspirés, il y a le « mystère » Bach, ici magnifiquement suggéré, incarné. Pour chaque Prélude et Fugue choisi du Cantor, derrière l’agilité des architectures prodigieuses, leur immensité impressionnante, l’interprète touche le dénuement et la solitude infinie qui s’en détache (sublime profondeur, simplicité envoûtante du sommet en la matière du BWV 853 en mib mineur). Le programme ouvre sur le dépouillement profond d’un Bach architecte qui tutoie les étoiles, mais qui sait aussi stimuler et comme révéler les manières mises en dialogue avec la sienne.
Le parcours est passionnant car la palette expressive est d’une rare richesse imaginative : inquiétude sourde, tendresse intranquille chez Mozart (Prélude Kv404a) qui trouve un écho d’une douceur infinie chez Clara Schumann (Prélude et fugue n°1 opus 6) ; construction polyphonique vertigineuse dont l’écoulement qui semble intarissable, édifie des cathédrales aussi lumineuses, détaillées, qu’équilibrées et rayonnantes, d’une tension irrépressible (BWV 875) et sous les doigts agiles et souple de l’accordéoniste, suspendues, célestes…
CLIC D'OR macaron 200La vibration papillonnante subtilement irisĂ©e de Reger (n°2 opus 99) dont la fugue qui renouvelle encore le genre, apporte la preuve que l’on peut ĂŞtre crĂ©atif et Ă©tonnamment inspirĂ© dans un cadre contraint jusqu’aux cimes expressionnistes et très contrastĂ©es de Thierry Escaich – autre maĂ®tre du clavier (orgue) comme esquissĂ©es avec une acuitĂ© flamboyante (ici crĂ©ation mondiale enregistrĂ©e en 2019) et conçue comme une course Ă  l’abĂ®me, convulsive et inquiète. Il n’y a guère que la tranquillitĂ© impĂ©nĂ©trable du BWV 893 pour rĂ©parer, rassĂ©rĂ©ner, bercer. Le geste est infiniment poĂ©tique et d’une palette de nuances qui enivre littĂ©ralement.

CD, critique. BACH en miroir. Marie Andrée JOERGER, accordéon (1 cd Klarthe, enregistré en mars 2019 et déc 2020)CLIC de CLASSIQUENEWS été 2021.

STREAMING opéra, critique. R. STRAUSS : Capriccio, Dresde. Nylund, Thielemann, le 23 mai 2021

Capriccio-camilla-nylund-critique-opera-thilemann-dreden-critique-opera-classiquenewsOpéra, critique. R. STRAUSS : Capriccio, Dresde. Nylund, Thielemann, le 23 mai 2021. Production ambitieuse qui met en scène l’époque contemporaine et celle baroque des protagonistes : les deux artistes créateurs, le poète et le compositeur, Olivier et Flamand, en dialogue et conversation avec leur mécène, la comtesse Madeleine. Strauss exploite toutes les ressources de l’opéra pour aborder le thème récurrent (dans toute l’histoire du genre), de la primauté entre paroles et musique. Qui doit conduire l’autre ? Qui prévaut ? le sous titre pourtant donne un indice : « Prima la musica e poi le parole » / D’abord la musique puis les paroles ; le compositeur entendait donc défendre sa vocation, son art (comme Rameau, la musique d’abord !). Sur le prétexte d’une joute entre les deux créateurs, la Comtesse propose que chacun traite le sonnet (« Kein andres »… d’après Ronsard, noyau de toute la partition) ; elle entend départager ce qui ne peut l’être, car à l’opéra, le texte est aussi essentiel que la musique, contredisant la hiérarchie pourtant défendue par le fondateur du genre, Monteverdi qui a conçu des dramma in musica, c’est à dire des textes mis en musique. La musique doit-elle être servante du verbe ? Toute la question est là.
L’ultime scène (à 2h04), superbement introduite par le chant du cor, profond, grave et noble, comme un crépuscule qui s’accomplit, pose la forme adulée par Strauss : une conversation en musique, comédie qui porte le texte qu’articule la divine musique. Ainsi dans ce final éblouissant et mordoré, la Comtesse ne sait que préférer : la puissance du verbe, l’incantation de la magie musicale ? La question reste ouverte en fin d’action.
Si la directon de Thielemann, dirigeant un orchestre viscéralement straussien,- comme c’est le cas de Munich, reste lisse parfois liquoreuse sans réellement exprimer le trouble ni l’ambivalence d’une musique qui parle et suggère, la mise en scène est en revanche plus claire et efficace, entre réalisme et poésie, exploitant les accents purement comiques de cette réflexion musicale sur la musique et le théâtre (divertissement dansé et duo de chanteurs italiens, puis intermèdes des serviteurs, dans l’esprit des pièces de Molière, sources essentielles chez Strauss, depuis sa collaboration avec le poète librettiste Hofmannsthal). Dans le rôle central de la comtesse, Camilla Nylund affirme une belle sincérité expressive, un timbre étincelant, rayonnant, souple qui se montre digne de ses augustes consoeurs qui l’ont précédée dans un rôle féminin parmi les plus subtils et attachants du répertoire (Schwarzkopf, Fleming…). Convaincant. Dresde, filmé en avril 2021.

VOIR et REVOIR

VOIR Capriccio de Richard Strauss sur le site de l’Opéra de Dresde, ici :
https://www.semperoper.de/streaming/capriccio.html

Sur le site ARTEconcert, en replay jusqu’au 17 juillet 2021
https://www.arte.tv/fr/videos/103827-000-A/capriccio-de-richard-strauss/

LIVRE événement, critique. Philippe BLAY : REYNALDO HAHN (Fayard)

9782213622620 reynaldo hahn philippe blay bio critique classiquenews fayard livre clic de classiquenewsLIVRE Ă©vĂ©nement, critique. Philippe BLAY : REYNALDO HAHN (Fayard). L’auteur restitue le portrait le plus exact possible de l’auteur de Ciboulette, de fait le plus grand compositeur d’opĂ©rettes françaises (de l’Entre-deux-guerres), Reynaldo Hahn (1874-1947), Ă©lève de Massenet dont il aura su fusionner non sans pertinence et sensibilitĂ©, ce romantisme lyrique souvent irrĂ©sistible avec le classicisme grand style de Saint-SaĂ«ns. Ainsi Hahn ne serait-il pas ce gĂ©nie mĂ©sestimĂ© des synthèses ou des Ă©quations difficiles ; Ă©lĂ©gantissime, mĂ©lodiste hors pair, immensĂ©ment douĂ© pour les comĂ©dies comme les pastiches post classiques et nĂ©o romantiques ? Lui-mĂŞme chanteur, enfant des salons Ă  la mode et donc compositeur ” mondain “, Hahn le vĂ©nĂ©zuĂ©lien incarne l’essence mĂŞme du goĂ»t français et aussi du chic parisien.
Toute la valeur du texte édité par Fayard est bien de révéler les 1000 joyaux d’une écriture sensible et cultivée qui sut à l’époque de la révolution debussyste, réussir par sa légèreté comme sa profondeur. Ce mondain charmant savait autant séduire que toucher.
A la lumière dévoilée de nouvelles sources (dont le journal inédit), complétant une riche et passionnante correspondance avec son compagnon Marcel Proust, l’œuvre de Hahn gagne une nouvelle dimension par sa justesse et son éclectisme raisonné, s’affirmant autant sur la scène lyrique que dans les domaines  ainsi re précisés de l’oratorio, du ballet, de la mélodie ou du quatuor à cordes… Qui connaissait jusqu’à leur étude ici en première mondiale : Sagesse ou La Corsaire ?
CLIC_macaron_2014Dans une époque de profonds remous, Hahn catalogué passéiste compulsif voire conservateur nostalgique (ne souhaitait-il pas prolonger le modèle des Nozze de Mozart?) a réussi cependant à vivifier et renouveler toujours un classicisme sincère dont l’intelligence et l’éclat nous sont enfin révélés.

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LIVRE Ă©vĂ©nement, critique. Philippe BLAY : REYNALDO HAHN (Fayard). Parution : mai 2021. 712 pages – prix indicatif : 28 euros. EAN : 9782213622620 – CLIC de CLASSIQUENEWS printemps 2021.

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LIVE STREAMING, concert, critique. LILLE, ONL, sam 10 avril 2021 : Ravel, Debussy. Orchestre National de Lille, AS OTT, piano / Elim CHAN, direction.

ELIM CHAN cheffe classiquenews ON LILLE steaming concert audito 2LIVE STREAMING, concert, critique. LILLE, ONL, sam 10 avril 2021 : Ravel, Debussy. Orchestre National de Lille, AS OTT, piano / Elim CHAN, direction. Comme un signe annonciateur, espéré du retour du public dans les salles de concerts, confirmant la continuité du travail musical de l’Orchestre National de Lille, ce malgré l’application des mesures sanitaires, voici un nouveau jalon de l’offre digitale de la phalange lilloise ; le catalogue des programmes ainsi captés depuis l’Auditorium du Nouveau Siècle à Lille (offre 100 numérique intitulée « AUDITO 2.0 ») est devenu pléthorique et varié : tout est accessible depuis la chaîne youtube de l’Orchestre National de Lille (ICI). / Photo : Elim CHAN (DR).

Pour ce concert double Ravel / Beethoven, deux tempĂ©raments asiatiques affrontent la vitalitĂ© de l’Ă©criture concertante et symphonique.
D’emblée l’entente, la complicité entre cheffe, soliste et instrumentistes portent leurs fruits ; le Premier mouvement du Concerto en sol de Ravel, à la vitalité enivrée et swinguée, « américaine » , réalise ce que recherchait Ravel après sa tournée aux USA (1928) : produire une pièce mouvante, parfois superactive dans l’esprit d’un « divertissement », où brille à armes égales, l’éloquence du piano et des instruments de l’orchestre, en particulier les vents. Le mouvement central (Adagio assai) a cette rêverie que chef et soliste inscrivent dans la nonchalance mozartienne (claire référence au Quintette pour clarinette de Wolfgang) entre abandon et suprême nostalgie (voire climat d’insaisissable rêverie enchantée) puis le finale (Presto) devient transe dans laquelle la cheffe soigne la vitalité des timbres auquel le piano frétillant de la pianiste (germano-nippone) Alice Sara Ott apporte une claque détaillée et lumineuse qui fouette les rythmes.

Dans la Symphonie n°2 de Beethoven (1802, créée en 1803), la cheffe hong-kongaise souligne l’énergie et l’impétuosité de l’écriture, celle qui affirme le génie créateur et conquérant d’un Beethoven qui a alors surmonté la crise d’Heiligenstadt ; dépression en liaison avec sa surdité croissante, finalement surpassée et sublimée par une rage déterminée : tout cela s’entend (Scherzo à la fois capricieux et allègre) et résonne sous la baguette vive, affûtée, musclée d’Elim Chan (Finale / Allegro molto d’un pur esprit de joie séditieuse). C’est la vigueur qui l’emporte ici sur toute virtuosité et élégance viennoise : Elim Chan confirme le souffle martial d’un Beethoven prêt à en découdre, armé pour surmonter tous les revers de sa destinée foudroyée.

LIVE STREAMING, concert, critique. LILLE, ONL, sam 10 avril 2021 : Ravel, Debussy. Orchestre National de Lille, AS OTT, piano / Elim CHAN, direction. CONCERT Ă  revoir sur la chaĂ®ne YOUTUBE de l’ORCHESTRE NATIONAL DE LILLE ici :

E-CONCERT, STREAMING, critique. LILLE, Nouveau Siècle, le 3 avril 2021. « Enchantements », Wagner, Sibelius / I. Brimberg / Orchestre National de Lille, D. Stasevska

E-CONCERT, STREAMING, critique. LILLE, Nouveau Siècle, le 3 avril 2021. « Enchantements », Wagner, Sibelius / I. Brimberg / Orchestre National de Lille, D. Stasevska, direction. Après le nerf impétueux, vif argent du chef néerlandais Jan Willem De Vriend (concert Beethoven du 13 mars dernier), voici un nouveau volet de l’offre digitale du National de Lille ; ce programme diffusé sur internet du 3 avril 2021, dévoile la sensibilité de la chef invitée Dalia Stasevska, tempérament intérieur en communion avec les instrumentistes lillois ; d’abord précise aux éclats intérieurs mi enivrés mi tragiques de la (lente) Valse triste de Sibelius ; c’est un préambule tout en finesse suspendue pour le Prélude de Tristan : en kimono, la maestra ukrainienne recherche le sens derrière le son ; la résonance intime qui étire chaque accord, en sa tension irrésolue ; l’incandescence du sentiment amoureux, celui des amants maudits Tristan et Yseult se consume ainsi dans la clarté et la transparence ; une urgence intérieure qui creuse l’exaspération de désirs insatisfaits. La cheffe déploie des sortilèges de langueur sensuelle, toujours très soucieuse du son comme de la balance sonore.

 

 

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A 24’50 : seconde partie du concert avec la Symphonie n°3 de Jean Sibelius (1907). Les instrumentistes plongent, cœurs ardents et volontaires dans la suractivité de l’ample portique trépidant dès le début porté par les cordes auquel répond la danse des bois ; transe collective initiale que les cuivres portent vers une plénitude sonore elle aussi à bien des égards… enivrée. L’opus exprime ce sentiment d’appartenance cher au compositeur, appartenance au motif naturel, au moindre de ses élans, proche dans l’âme à chaque sursaut de vitalité. Tous les pupitres s’exaltent et se répondent dans un dialogue contrasté, parfois âpre mais superbement fluide dans lequel Sibelius exprime la sauvagerie des forces naturelles comme saisi sur le vif ; ainsi témoigne-t-il de la de la découverte et de la proximité immédiate avec le lieu de sa nouvelle résidence, un havre de paix bucolique, à la fois sauvage et rassurant près d’un lac (Tuusulanjärvi) : Ainola, en hommage au prénom de sa femme, Aino. Le cycle des variations populaire et naïves (d’une franchise primitive qui rappelle tout l’esprit du premier mouvement) caractérisent le Scherzo ; tandis que l’Andante déploie son lied sobre et ciselé formant intermezzo. Dans cette texture dense, souvent exacerbée et trépidante, la cheffe soigne toujours la direction du flux, l’éloquence de cette construction ambitieuse, impérieuse, incandescente (dont l’unité découle d’une grande continuité organique). Toute la difficulté de l’écriture tient à la réalisation d’un souci de structure (car Sibelius n’aime pas développer pour rien, quitte à s’économiser vers épure « classique ») tout en ciselant le raffinement de l’orchestration particulièrement scintillante.
Malgré la densité sonore, la baguette sait soigner la clarté et la transparence ; comme le chant sourd d’une vérité plus insaisissable et mystérieuse ; tout rugit, s’exaspère et s’organise peu à peu vers la noblesse sereine et lumineuse du finale : grandiose et raffinée. Noces de l’intime et du flamboiement, de la tendresse sobre et de la grandeur mystérieuse du motif naturel, le seul sujet qui inspira Sibelius. En cela Dalia Stasevska se révèle à la fois engagée, mieux habitée. Baguette à suivre. REVOIR le concert sur la chaîne YOUTUBE de l’ON LILLE / Orchestre National de Lille ICI :
https://www.youtube.com/watch?v=PEZ7NpHt71E

 

dalia-stakevska-concert-orchestre-national-lille-sibelius-wagner-streaming-concert-critique-concert-annonce

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LIRE aussi notre critique du concert « L’Héroïque » / Orchestre National de Lille / Jan Willem De Vrirend, direction (Cherubini / Beethoven). ICI :

http://www.classiquenews.com/compte-rendu-streaming-concert-on-lille-le-13-mars-2021-orch-national-de-lille-jan-willem-de-vriend-direction-beethoven-symphonie-n3-heroique/

 

 

 

 

CD événement, critique. VARIATIONS AMOUREUSES : French love songs from the 13th century / ALLA FRANCESCA, Brigitte Lesne (1 cd PARATY 2019)

PARATY_AllaFrancesca_VariationsAmoureuses_critique cd classiquenews CLIC de classiquenewsCD événement, critique. VARIATIONS AMOUREUSES : French love songs from the 13th century / ALLA FRANCESCA, Brigitte Lesne (1 cd PARATY 2019). 18è enregistrement de l’ensemble dirigé par Brigitte Lesne… mais 1er cd chez l’éditeur français Paraty : Alla Francesca y dévoile la diversité enivrante des chansons d’amour en France au XIIIè. Amour courtois parfois embrasé, douloureux selon l’inconstance des sentiments et l’infidélité maladive ; amour sacré aussi, en particulier marial qui célèbre la Vierge Marie, à partir de monodies ou chansons préalablement écrites dans l’univers courtois. Ainsi Gautier de Coinci recycle des airs courtois pour les sublimer dans son recueil des Miracles de Nostre Dame (fin des années 1220). Il en découle un labyrinthe poétique des plus nuancés, chanté, narré, investi en 3 langues : latin, français, langue d’oïl…

Entre Amour sacré, amour profane
Alla Francesca subjugue et enchante…
25 Variations amoureuses du XIIIè français

Inspirés par ce jeu des variations, filiations, métamorphoses du profane au sacré, du populaire au mystique, les chanteurs et instrumentistes d’ALLA FRANCESCA s’immergent dans cet échiquier du cœur épris, de la foi dévorante, ardente, souvent insatisfaite et inquiète pour incarner idéalement cette collection d’airs divers, aussi onirique que suggestive, souvent extatique. Aux côtés des compositions de Coinci, celles non moins vibrantes, de Gautier de Chatillon ou de Thibaut de Blaison enchantent tout autant ; l’accord sonore entre instruments (surtout la vièle, véritable axe instrumental du programme) et voix en exprime toute la tension comme foudroyée. Il est question de prière, d’imploration de type monodique (en langue d’oïl) ou polyphonique (latin) ; ductile et volubile, chaque soliste d’Alla Francesca souligne combien le geste sonore est indissociable de la respiration ; d’où souvent ce caractère de balancement, proche des scansions, langueur répétée des processions qui soulignent le mystère du sentiment amoureux ; tout est idéalement investi ; les textes et leur partition déploient de bout en bout un caractère d’émerveillement célébrant le sujet : idole aimée, Vierge adorée. Sans omettre les atermoiements déconcertants de passions immaîtrisées…
Ainsi les auditeurs qui auront bien reconnus les 3 timbres des 3 chanteuses d’Alla Francesca (Vivabiancaluna Biffi, Christel Boiron, Brigitte Lesne) parcourent une série de chansons vécues comme des témoignages d’une implorante sincérité, entre embrasement mystique et possession passionnelle. L’humour s’invite dans cette arène sentimentalement complète comme en témoigne la chanson de l’épouse qui veut aimer son amant malgré son mari bien jaloux et bien ennuyeux qui n’est pas un « ami » : le timbre clair et articulé de Brigitte Lesne en exprime la charge dramatique comme l’éloquence frappée du bon sens.

A 2 voix et parure instrumentale ciselĂ©e (rote, 2 vièles), « Sol sub nube latuit” / le soleil s’est cachĂ© dans la nue… », cĂ©lèbre la divinitĂ© pure du Christ nĂ© d’une Vierge admirable, sur un texte latin entonnĂ© comme une scansion hypnotique ; tandis que les deux sĂ©quences plus narratives et riche en texte vernaculaire (« Amours dont suis espris », et « Amors qui souprent »), incarnĂ© par le tĂ©nor Lior Leibovici expriment les tourments et vertiges de la passion charnelle qui enserre les cĹ“urs amoureux ; dans le sillon des textes comme enivrĂ©s, paniques et dĂ©semparĂ©s (« En non Dieu c’est la rage », puis « Or la voi, … ») oĂą le cĹ“ur affolĂ© s’agite sans mesure mais en un texte floral et poĂ©tique.

CLIC D'OR macaron 200La séduction du programme de motets, chansons, rondeaux ainsi narrés avec le sens du verbe, renforce la richesse sémantique des épisodes ; à la langueur insatisfaite, les interprètes soulignent la morsure d’une ironie suggérée par exemple dans « Amours mi fait renvoisier et chanter » dont la fin de chaque strophe, comme une morale sans naïveté aucune, reprend la leçon amoureuse du motet « Amis, vostre demoree »…
Un refrain est cité dans telle chanson monodique et devient partie d’un motet : ce parcours intertextuel révèle un terreau linguistique commun formant la trame d’un répertoire à redécouvrir absolument. Le génie des compositeurs ainsi ressuscités affirme une maîtrise exceptionnelle dans l’art des transformations et variations. A chaque séquence musicale, à chaque combinaison, un parcours intime qui épaissit encore le mystère de l’Amour. Au mérite d’ALLA FRANCESCA revient l’étonnante vivacité, à la fois angélique et grave, qui en exprimer l’ineffable tension poétique comme la puissance incantatoire. Magistral.

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CD Ă©vĂ©nement, critique. VARIATIONS AMOUREUSES : French love songs from the 13th century / ALLA FRANCESCA, Brigitte Lesne (1 cd PARATY 2019) – enregistrĂ© Ă  PARIS en avril 2019. CLIC de CLASSIQUENEWS

STREAMING, opéra, critique I SONYA YONCHEVA, soprano. Le 27 février 2021. VERDI, PURCELL, PUCCINI, MASSENET…

streaming MET STARS LIVE SOnya Yoncheva critique classiquenewsSTREAMING, opéra, critique I SONYA YONCHEVA, soprano. Le 27 février 2021. VERDI, PURCELL, PUCCINI, MASSENET… La bibliothèque rococo de l’Abbaye de Schussenried (Allemagne) offre un écrin somptueux pour ce récital présenté par le Metropolitan Opera dans le cadre de sa série digitale « Met Stars Live in Concert ». C’est un nouveau volet mémorable de l’offre de streaming de l’institution newyorkaise dont la rentrée lyrique ne se fera pas avant … septembre 2021. Pour rompre le silence, la voix de la soprano bulgare Sonya Yoncheva, diva évanescente dans sa robe rouge, réalise un parcours semé de perles indiscutables.

Sonya YONCHEVA chante pour le MET
ECLECTISME D’UNE DIVA VOLUPTUEUSE

La cantatrice d’abord formée au baroque, aime jongler avec les styles, les écritures, les langues. D’emblée, évacuons son air d’ouverture : « Ritorna Vincitor » d’Aida de Verdi : air trop immense pour une voix vite dépassée et à saturation. Dommage. Impression mitigée également érpouvée dans son second Verdi : sa Leonora du Trouvère « Tacea la notte placida » manque de contrastes, d’ampleur, de souffle halluciné. C’est bien chanté, mais rien de plus. Heureusement il y a Puccini et sa Bohème pour laquelle déjà au Met en 2018, la sirène bulgare retrouve le galbe de son timbre crémeux. Sur les pas de l’incomparable couleur nuancé de Fleming, La Yoncheva poursuit ensuite avec la prière à la lune de Russalka de Dvorak : malgré la tendresse sensuelle du timbre, la soprano manque de teintes mordorées, de finesse, de variations. C’est lisse et trop « sage ».
La captation orchestrée et présentée depuis New York rappelle les prises de rôles de la diva sur la scène du Met : ainsi l’Ave Maria de Desdemona d’Otello de Verdi (2015) ; puis Tosca en 2018. La cantatrice s’affirme enfin en Didon abandonnée (Purcell), au sombre chant crépusculaire dans lequel l’interprète captent et cultivent des nuances intérieures enfin maîtrisées. Dommage que le pianiste Julien Quientin, remplaçant au pied levé Malcolm Martineau, ne parvient pas à articuler et nuancer chaque séquence, avec l’intériorité requise.
En français, et encore sur les traces de Renée Fleming qui la chanta à Bastille, Yoncheva défend l’air déchirant « Adieu ma petite table » d’une Manon (Massenet) grave et voluptueuse. Pour conclure, l’Hymne à l’amour d’Edith Piaf s’impose comme le plus bel effet de la soirée (avec ses Puccini). Photo : Sonya Yoncheva © Metopera

REPLAY jusqu’au 12 mars 2021 sur cette page :
https://metstarslive.brightcove-services.com/events/6170940907001

The Program / me
“Ritorna vincitor!”
From Verdi’s Aida

“Tacea la notte placida … Di tale amor”
From Verdi’s Il Trovatore

“Donde lieta uscì”
From Puccini’s La Bohème

Song to the Moon
From Dvořák’s Rusalka

“Se come voi piccina io fossi”
From Puccini’s Le Villi

“Thy hand, Belinda … When I am laid in earth” (Dido’s Lament)
From Purcell’s Dido and Aeneas

“Lascia ch’io pianga”
From Handel’s Rinaldo

“Un bel dì”
From Puccini’s Madama Butterfly

“Ah! je suis seule … Dis-moi que je suis belle”
From Massenet’s Thaïs

“Adieu, notre petite table”
From Massenet’s Manon

“L’amour est un oiseau rebelle” (Habanera)
From Bizet’s Carmen

“Hymne à l’amour”
By Marguerite Monnot and Édith Piaf

CD, critique. EVOLUTION : Aynur Begutov, guitare Ă  7 cordes (1 cd Vision Fugitive 2020)

evolution aynur BEGUTOV cd critique classiquenews vision fugitiveCD, critique. EVOLUTION : Aynur Begutov, guitare Ă  7 cordes (1 cd Vision Fugitive 2020). Le label Vision Fugitive apporte sa contribution Ă  la clarification de l’école russe de guitare ; une filière artistique mĂ©connue pourtant florissante dès la fin du XVIIIè et au cours du XIXè (avec Andrei O Sikhra, 1773 – 1850 et ici ses Variations sur La Pie de voleuse de Rossini, qui exploite de façon gĂ©niale la technique sur 7 cordes). Le guitariste Aynur Begutov explicite et Ă©claire l’écriture du pĂ©dagogue et compositeur russe romantique, douĂ© d’une pensĂ©e vĂ©ritablement « orchestrale ». Si le maĂ®tre Sikhra sĂ©duit immĂ©diatement l’auditeur par sa facilitĂ© mĂ©lodique, il en est de mĂŞme chez son Ă©lève NikolaĂŻ Iv. Aleksandrov (1818 – 1884) qui fut colonel de la garde impĂ©riale des hussards ; totalement dĂ©diĂ© Ă  la composition musicale, son Ă©criture renouvelle avec goĂ»t et style la musique de salon russe du plein XIXè, comme l’attestent les 3 pièces rĂ©unies ici : Valse de l’adieu, Mazurka et Chic Polka.

 

 

A la découverte de l’école russe de guitare
Aynur Begutov joue un florilège de compositeurs guitaristes
de Sikhra à Orekhov…

 

 

Le parcours qui s’apparente à une anthologie consistante, s’impose par le sérieux de la sélection, une mise en avant qui s’écoute à la fois comme une invitation à approfondir sa connaissance de la guitare russe et un avant goût prometteur; la sélection comprend d’autres figures majeures telles Kostantin G Vassiliev (1970) dont 5 pièces courtes et denses, témoignent d’un apport puissant et original. Ces 5 esquisses russes ont été écrites en 2012 justement pour Aynur Begutov et concentrent la quintessence de l’art artisanal russe, osant des passerelles entre musique et arts décoratifs populaires. La digitalité du guitariste exploite les références aux techniques diverses utilisées, à leurs effets chromatiques, aux effets de matière aussi ; la dernière « Khokhloma » est emblématique du cycle.

L’écriture de SergueĂŻ D Orekhov (1935 – 1998), guitariste devenu lĂ©gendaire dans les annĂ©es 1970 / 1980 se distingue tout autant : Aynur Begutov rend hommage Ă  ses dons de compositeur, maĂ®trisant totalement les ressources techniques des 7 cordes, lui permettant de vivifier des pièces populaires telles la polka de Sokolov, la romance russe « les saules pleureurs endormis » ; « Mare diandia », très belle danse gitane.
Une affection particulière va Ă  un autre romantique Ă©clairĂ© Mikhail Tim. Vysotsky (1791 – 1837) dont l’écriture très personnelle a sĂ©duit musiciens et Ă©crivains dont Lermontov. Ici Aynur Begutov rend hommage Ă  l’auteur de l’Enseignement pratique de la guitare Ă  7 cordes : il en souligne l’exubĂ©rante inspiration cultivĂ©e dans le genre de la Variation (superbe Ă©lan des Variations sur la mĂ©lodie « Ma petite maman, j’ai mal Ă  la tĂŞte »… Programme dĂ©fricheur et audacieux.

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CD, critique. EVOLUTION : Aynur Begutov, guitare Ă  7 cordes (1 cd Vision Fugitive 2020).

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VOIR ici le TEASER du cd EVOLUTION / Aynur BEGUTOV (1 cd Vision Fugitive)
https://www.youtube.com/watch?v=bXUDHQjv2c4

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EN LIRE PLUS sur le site du label VISION FUGITiVE
https://www.visionfugitive.fr/fr
Lien vers la page de présentation du cd Evolution / Aynur BEGUTOV :
https://www.visionfugitive.fr/fr/catalogue/evolution/21

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STREAMINGS opĂ©ras, concerts, docus… 2021

STREAMINGS CONCERTS, OPERAS, RECITALS 2021. SĂ©lection CLASSIQUENEWS. Prisonniers des reports en reports, sans visibilitĂ© rĂ©elle, les acteurs du spectacle vivant Ă©vitent aujourd’hui l’asphyxie en continuant Ă  travailler et en entretenant le lien avec leurs publics grâce Ă  internet. Voici les diffusions annoncĂ©es, souvent en replay s’il s’agit de mise en ligne live. OpĂ©ras, concerts symphoniques, rĂ©citals, … ne manquez pas les Ă©vĂ©nements classiques sur la toile.

 

TOP LIST CLASSIQUENEWS
STREAMINGS concerts & opéras 2021
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STREAMING-concert-chez-soi-e-concert-symphonique-annonce-critique-concert-confinement-classiquenews

 

 

 

 

 

 

 

JEUDI 3 JUIN 2021 : 18h
OPERA : TOSCA de Puccini / Alexandre BLOCH et l’ORCHESTRE NATIONAL DE LILLE – mise en scène de concert : Olivier Fredj
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TOSCA-puccini-opera-lille-orchestre-national-de-lille-alexandre-bloch-annonce-critique-opera-classiquenewsLes retrouvailles de l’Orchestre et de son chef Alexandre Bloch avec le public se rĂ©aliseront lors du LILLE PIANO(S) Festival (18, 19 et 20 juin 2021 au Nouveau Siècle Ă  Lille) mais aussi avant, grâce Ă  la nouvelle production prĂ©sentĂ©e par l’OpĂ©ra de Lille : TOSCA de Puccini (mise en espace : Olivier Fredj). DIFFUSION en direct sur la chaĂ®ne YOUTUBE de l’ON LILLE / ORCHESTRE NATIONAL DE LILLE – VOIR le 3 juin 2021 Ă  18h  l’opĂ©ra TOSCA par Alexandre BLOCH / l’ON LILLE Orchestre National de LILLE ici

 

 

 

 

 

 

 

MERCREDI 5 MAI 2021 : 20h
OPERA : THAMOS, roi d’Egypte de MOZART / David Reiland et l’ORCHESTRE NATIONAL DE LILLE – mise en scène de concert : Damien Chardonnet-Darmaillacq
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L'ORCHESTRE NATIONAL DE LILLE joue THAMOS de MOZARTPresque 20 avant son dernier opéra (1791), La Flûte enchantée, Mozart (âgé de 18 ans) reçoit la commande d’un ouvrage à la conception similaire, également chanté en allemand : selon l’idéal maçonnique (le commanditaire est le baron Tobias Philipp von Gebler, futur grand-maître d’une Loge franc-maçonne viennoise), il s’agit dans Thamos, d’un drame égyptien, opposant les ténèbres et la lumière, en une geste hautement symbolique suscitant déjà les mêmes personnages : Tamino, la Reine de la nuit…

 

 

 

 

 

 

 

SAMEDI 17 AVRIL 2021 : 20h
CONCERT : MARIE-ANGE NGUCI et l’ORCHESTRE NATIONAL DE LILLE jouent le Concerto n°20 de Mozart
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NGUCI-Marie-ange-piano-concert-critique-classiquenews-orchestre-national-de-lille-streaming-liveDepuis l’Auditorium du Nouveau Siècle Ă  Lille, nouveau direct : le Concerto n°20 de Mozart, l’un des plus bouleversants, emblĂ©matique de cette gravitĂ© sombre et tendre de Wolfgang en 1785 Ă  Vienne… ” Fulgurant, mordant et d’une Ă©tonnante intelligence des contrastes, le jeu de Marie-Ange Nguci Ă©coute la matière, fait surgir des Ă©lans murmurĂ©s d’une poĂ©tique Ă©trange, liquide, suspendue, auxquels rĂ©pondent des dĂ©flagrations tranchantes ; mais il y aussi un impressionnisme sonore qui s’écoule, et des rythmes qui s’entrecroisent et se chevauchent dans un festival Ă©motionnel permanent, contrĂ´lĂ©, scintillant… ». LIRE ici notre annonce du concert MOZART / Marie-Ange NGUCI / Orchestre National de Lille / Audito 2.0 / 17 avril 2021

 

 

 

 

 

 

 

 

SAMEDI 10 AVRIL 2021 : 20h
CONCERT : Ravel & Beethoven
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Depuis l’Auditorium du Nouveau Siècle à Lille, nouveau direct : Concert en sol de Ravelaudito-2.0-Orchestre-National-de-lille-concerts-annonce-critique-classiquenews (Alice Sara Ott, piano) puis Symphonie n°2 de Beethoven

VOIR et LIRE la présentation du CONCERT : ici

 

 

 

 

 

 

 

JUSQU’AU 9 OCT 2021
OPERA : Pelléas et Mélisande (Opéra de Lille)
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pelleasmelisande_0813-©Frederic-Iovino opera lille critique annonce classiquenews stremaing operaL’OpĂ©ra de Lille a enregistrĂ© cette nouvelle production en mars 2021. L’argument principal est certes la distribution, principalement francophone (Julien Behr, Vannina Santoni, Alexandre Duhamel… dans les rĂ´les de PellĂ©as, MĂ©lisande, Golaud), mais surtout la couleur spĂ©cifique d’un orchestre sur instruments d’époque, qui plus est dirigĂ© par l’excellent chef François-Xavier ROTH  -  VOIR, LIRE notre prĂ©sentation ICI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

VENDREDI 26 MARS 2021 : 20h
OPERA. GOUNOD : Faust.
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Depuis l’OpĂ©ra Bastille, Paris, nouvelle production de mars 2021, sur FRANCE 5 – diffusion radiophonique le samedi 3 avril 2021 sur France Musique.
VOIR ici l’opéra :
https://www.france.tv/france-5/direct.html

 

 

 

 

 

 

MARDI 23 MARS 2021 : 20h30
CONCERT. RAVEL, BARTOK, BRUCKNER

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JEUNE MAESTRO FINNOIS : Klaus MÄKELÄDans le cadre du projet « Nouvelle vague » qui met l’accent sur de jeunes chefs et solistes
A VOIR sur le site Philharmonie Live / Orchestre de Paris : https://live.philharmoniedeparis.fr/
Philharmonie, Grande salle Pierre Boulez–*captation à 17h

KLAUS MÄKELÄ, direction
KIRILL GERSTEIN, piano

Maurice Ravel : Pavane pour une infante défunte
Béla Bartók : Concerto pour piano et orchestre n° 3
Anton Bruckner : Symphonie n° 9

DIMANCHE 21 MARS 2021 : 15h30 puis 23h55
OPERA. R. STRAUSS : Der Rosenkavalier sur ARTE concert
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Depuis l’OpĂ©ra d’état de Bavière, Munich. Munich, Bayerische Staatsoper, 2021 – Vladimir Jurowski, direction.
Barrie Kosky, mise en scène. Marilis Petersen, la Maréchale. Christof Fischesser, Ochs. Strauss, l’enfant terrible d’un symphonisme flamboyant regarde ici dans l’esprit d’une Fantaisie, vers la poésie courtoise et comique du XVIIIè. Inspiré des gravures de William Hogarth, Strauss et son prodigieux librettiste Hofmannsthal conçoivent à 4 mains, un opéra dans l’esprit de Mozart…Nouvelle production événement du printemps 2021.
VOIR l’opéra ici :
https://www.staatsoper.de/staatsopertv.html?no_cache=1#c18480

 

 

 

 

 

 

DIMANCHE 14 MARS 2021 : 19h
OPERA. ZANDONAI: Francesca da Rimini
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Berlin, Deutsch Oper, streaming direct 2021 – Liens vers Talkt1 et DFLKultur-radio sur le site.
Christof Loy, mise en scène / avec : Sara Jakubiak, Ivan Inverardi, Jonathan Tetelman, Charles Workman
VOIR l’opéra ici
https://www.deutscheoperberlin.de/de_DE/francesca-da-rimini-im-stream

 

 

 

 

 

 

DIMANCHE 14 MARS 2021 : 14h30
CONCERT BAROQUE. GLI INCOGNITI, Amandine Beyer, violon
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SAINTES : nouvelle session orchestrale du JOA piloté par Amandine BeyerEn accès direct depuis le site du Théâtre de la Ville à Paris, assistez en direct dès 14h30 au concert de la violoniste facétieuse et volubile AMANDINE BEYER, qui depuis 20 ans fait souffler sur la planète classique et baroque, un vent rafraîchissant, audacieux, élégant, subtil, véritable prolongement du geste des premiers « baroqueux ». Son approche du répertoire respire l’originalité et pourtant le strict respect des partitions, mais ici renouvelé grâce à une connaissance aiguisée des traités d’époque, de la pratique dite historique. Amandine Beyer a ce tempérament critique, analyste et furieusement naturel en partage avec un autre enfant virtuose du violon baroque, le jeune Augustin Lusson, récent partenaire inspiré des Sonates de Clément, génie français révélé par le claveciniste Iakovos Pappas.
Artiste en résidence au Théâtre de la Ville à Paris, Amandine Beyer joue dans ce programme de mars 2021, les œuvres de JEAN-SEBASTIEN BACH.

VOIR le CONCERT BAROQUE. GLI INCOGNITI, Amandine Beyer, violon
Depuis le Théâtre des Abbesses à PARIS :
https://www.theatredelaville-paris.com/fr/spectacles/gardons-le-lien/les-directs/amandine-beyer-gli-incogniti

Amandine Beyer, violon

GLI INCOGNITI
Manuel Granatiero, traverso
Antoine Torunczyk, hautbois
Alba Roca, Vadym Makarenko, violons
Marta Paramo, alto Marco Ceccato, violoncelle
Baldomero Barciela, violone
Anna Fontana, clavecin

 

PROGRAMME

Johann Sebastian Bach (1685-1750)

Concerto pour hautbois d’amore, BWV 1055R
Allegro • Larghetto • Allegro ma non tanto

Concerto pour violon, en la mineur, BWV 1041 [ ]
• Andante • Allegro assai

Concerto pour violon & hautbois, en ut mineur, BWV 1060R
Allegro • Adagio • Allegro

Concerto brandebourgeois, en ré majeur, BWV 1050
Allegro • Affettuoso • Allegro

TEASER Amandine Beyer

https://youtu.be/h1rCl0NcfgI

 

 

 

 

 

 

 

SAMEDI 13 MARS 2021 : 20h
CONCERT. ORCHESTRE NATIONAL DE LILLE / Jan Willem De Vriend, direction
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de-vriend-jan-willem-maestro-chef-classiquenews-orch-national-de-lille-marcel-Boek-classiquenews-concerts-orchestre-national-lille-streamingL’Orch National de Lille offre à nouveau un superbe concert, nouveau jalon de son offre digitale à suivre sur la toile (intitulée depuis début 2021 « Audito 2.0 »). Depuis l’Auditorium du Nouveau siècle à Lille, chaque concert lillois confirme la poursuite de l’activité musicale des instrumentistes soucieux à Lille de prolonger leur activité coûte que coûte, tout en diffusant les fruits de leur travail grâce aux concerts numériques. Ce samedi 13 mars 2021 à 20h, l’Orchestre retrouve son premier chef invité, le néerlandais Jan Willem De Vriend dans un programme « héroïque » autour des compositeurs Cherubini (qui fut directeur du Conservatoire) et Beethoven, mais aussi ceux qui les ont inspirés : Louis XVIII et Napoléon (fêté cette année pour son bicentenaire). Le programme solennel et spectaculaire évoque le dernier Cherubini et le tempérament de feu, éruptif et poétique du jeune Beethoven, spectateur passionné des événements français au début du nouveau siècle… Programme : Cherubini : Marche funèbre / Beethoven : Symphonie n°3 « héroïque ». EN LIRE PLUS ICI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

MERCREDI 10 MARS 2021 : 20h30
CONCERT. POULENC
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Dans le cadre du projet « Nouvelle vague » qui met l’accent sur de jeunes chefs et solistes
A VOIR sur le site Philharmonie Live / Orchestre de  Paris :
https://live.philharmoniedeparis.fr/
Philharmonie, Grande salle Pierre Boulez–*captation à 17h

CORINNA NIEMEYER, direction
LORIANE LLORCA, orgue
JEAN RONDEAU, clavecin

Francis Poulenc
Concert champĂŞtrepour clavecin et orgue
Sinfonietta
Concerto pour orgue, orchestre Ă  cordes et timbales

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

MERCREDI 3 MARS 2021 : 20h30
CONCERT. CAMILLE SAINT-SAËNS

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saint-saens_400_x_250_camille_2_musica_juin_1907_p._93Dans le cadre du projet « Nouvelle vague » qui met l’accent sur de jeunes chefs et solistes
A VOIR sur le site Philharmonie Live / Orchestre  de Paris :
https://live.philharmoniedeparis.fr/
Philharmonie, Grande salle Pierre Boulez–*captation à 17h
LIEN DIRECT vers le concert ici :
https://live.philharmoniedeparis.fr/concert/1121933/orchestre-de-paris-julien-masmondet-100-saint-saens-marie-ange.html

JULIEN MASMONDET, direction
MARIE-ANGE NGUCI, piano
VICTOR JULIEN-LAFERRIERE, violoncelle
EVA ZAVARO, violon

Camille Saint-Saëns :
La Princesse Jaune, ouverture
Concerto pour piano et orchestre n°2
Danse macabre
Concerto pour violoncelle et orchestre n° 1
La Muse et le poète, pour violon, violoncelle et orchestre

 

 

 

 

 

 

DIMANCHE 28 FEVRIER 2021 : 22h
OPERA, ORATORIO. LEVINAS : La Passion selon Marc

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A VOIR sur Philharmonie Live et le site de l’Orchestre de chambre de Paris
et disponible jusqu’au 31 juillet 2021 :
https://live.philharmoniedeparis.fr/concert/1121832/

Michael Levinas.Composé pour les 500 ans de la Réforme, La Passion selon Marc, une passion après Auschwittz, un oratorio singulier, est l’occasion pour Michaël Levinas de revisiter le genre hérité du baroque et de relire les Évangiles dans une perspective déterminée par la Shoah. Une médiation musicale et philosophique sur le silence de Dieu et des hommes dans laquelle le compositeur propose de relire le récit chrétien de la passion de Jésus au regard de la Shoah.
Si le propos d’Adorno – « écrire un poème après Auschwitz est barbare » – a été mal compris, cette dialectique entre culture et barbarie pose une question existentielle : comment vivre et créer après Auschwitz ? S’emparant de La Passion selon Saint Marc – dont Bach avait tiré un chef-d’œuvre hélas perdu, Michael Levinas tente d’apporter quelques débuts de réponse. Portée par un engagement spirituel radical, sa partition donne ainsi au récit un point de vue plus féminin, mais aussi une dimension œcuménique, grâce notamment à deux poèmes de Paul Celan, lui-même victime du nazisme, qui referment le récit évangélique. Comment réinterpréter l’antijudaïsme hérité de la Passion après les millions de morts qu’il a engendrés ?

Magali LĂ©ger : soprano – (Mère) – Marion Grange : soprano (Marie-Madeleine)
Guilhem Terrail : contre-tĂ©nor (ÉvangĂ©liste) – Mathieu Dubroca : baryton (JĂ©sus)

Thomas Lacote : orgue – L’ensemble Le Balcon ChĹ“ur
Maxime Pascal : direction

ECOUTER Michael LEVINAS présenter, expliquer les enjeux et le sens de son opéra La Passion selon Saint-Marc
https://www.youtube.com/watch?v=CWf3tyRoOJQ&utm_campaign=La+Passion&utm_medium=email&utm_source=Mailjet

Créée en 2017, la Passion selon Marc de Michaël Levinas porte dans son titre une double référence : à Bach ​et à l’Holocauste. Écrire de la musique après Auschwitz, c’est composer une musique qui tremble. C’est poser sans cesse la même question qui taraudait Paul Celan. Peut-on chanter sans pleurer et sans trembler après la Shoah ?
https://philharmoniedeparis.fr/fr/act…​

00:00​ : Une Passion moderne
2:36​ : Une Passion après Auschwitz
5:41​ : Le Triptyque de la Passion
10:11​ : Le Balcon : en toute confiance

 

 

 

 

SAMEDI 27 FEVRIER 2021 : 19h
RECITAL LYRIQUE. SONYA YONCHEVA

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yoncheva-sonya-diva-soprano-opera-the-verdi-album-review-presentation-cd-par-classiquenews-critique-cd-par-classiquenewsSONYA YONCHEVA / Metropolitan Opera (New York) – dans le cadre de la programmation digital du MET : « Met Stars Live in Concert »
en direct sur le site du Met depuis un monastère rococo allemand, puis disponible 14 jours en ligne. Filmé depuis la bibliothèque rococo du monastère de Schussenried près de Munich

Sonya Yoncheva parle du récital :
> sur Facebook : https://www.facebook.com/MetOpera/videos/746495922724275
> sur Instagram : https://www.instagram.com/p/CLpUsgilxeK/

Bande annonce : https://www.youtube.com/watch?v=s7FRv4aKpFg
Conversation entre Sonya Yoncheva et Peter Gelb sur le concert Ă  venir : https://www.youtube.com/watch?v=k4_CUpXbCWc
Ce concert était initialement prévu en novembre 2020.

Précédent récital encore dispo, visionnable en replay jusqu’au 27 février 2021
Anna Netrebko en direct du manège de l’Ecole espagnole d’équitation à Vienne est disponible jusqu’au 27 février. Des extraits de ce concert seront mis en ligne d’ici là sur la chaîne YouTube du Met.

 

 

 

 

 

 

 

 

SAMEDI 27 FEVRIER 2021 : 20h
OPERA. USHER d’après La chute de la maison Usher de Claude Debussy
THEATER â€T EILANDJE ANVERS

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USHER – VAN PARYS / OPERA DE CHAMBRE2021-usher-cannemieaugustijns-4174
VERSION REVISEE (STOCKHOLM 2019)
Annelies Van Parys (°1975)/ Claude Debussy (1862-1918)
Après disponible pour 14 jours / Billets: €10
A VOIR ici : operaballet.be

ANGOISSE DEVASTATRICE … La Chute de la maison Usher d’Edgar Allen Poe, grand classique de la littĂ©rature d’horreur, ainsi que les esquisses d’une composition sur ce thème laissĂ©es par Claude Debussy inspirent cette nouvelle production d’USHER (prĂ©cĂ©demment créé Ă  Stockholm en 2019) de la compositrice belge Annelies Van Parys et de la librettiste Gaea Schoeters.
Les deux crĂ©atrices ont dĂ©jĂ  rĂ©alisĂ© l’opĂ©ra Private View, dont l’OpĂ©ra d’Anvers a accueilli la crĂ©ation mondiale en 2015. Leur Usher a dĂ©jĂ  Ă©tĂ© applaudi Ă  l’Ă©tranger et leur a valu des critiques Ă©logieuses dans la presse internationale. En voici une nouvelle production Ă  Anvers.

Usher se dĂ©roule dans un univers dominĂ© par l’angoisse. Dans la maison de la famille Usher, qui semble en symbiose avec ses occupants, une mystĂ©rieuse maladie dĂ©chaĂ®ne la paranoĂŻa et les psychoses, encore attisĂ©es par un mĂ©decin machiavĂ©lique et manipulateur. Dehors, le peuple rĂ©clame la protection d’un dirigeant fort. Une emprise enserre les cĹ“urs, les Ă©reintent peu Ă  peu jusqu’à d’ultimes rĂ©solutions… Les parallèles avec la situation actuelle sont indĂ©niables.

Le metteur en scène français Philippe Quesne propose une scĂ©nographie oppressante, Ă©voquant l’atmosphère claustrophobe des films Ă  suspense des annĂ©es 1970.

LIVRET
Gaea Schoeters & Claude Debussy après The Fall of the House of Usher de Edgar Allan Poe
Nouvelle production – Version rĂ©visĂ©e, Stockholm 2019

Direction musicale : Marit Strindlund
Mise-en-scène et Chorégraphie : Philippe Quesne
Scénographie & Lumières : Philippe Quesne
Costumes : Philippe Quesne & Christin Haschke
Dramaturgie : Roman Reeger

RODERICK USHER : Ivan Thirion
LADY MADELINE : Alexandra BĂĽchel
L’AMI : Martin Gerke
LE MEDECIN : Daniel Arnaldos

Orchestre Symphonique Opera Ballet Vlaanderen

 

 

 

 

 

ET AUSSI….

 

PÉDAGOGIE / MOOC (1)
Embarquez pour un voyage musical à travers la France du XVIIe siècle !
MOOC de La Sorbone

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Le Centre culturel d’Ambronay, l’ensemble Correspondances, le MusĂ©e du Louvre, La Sorbonne et l’IReMus se sont associĂ©s pour vous proposer un Mooc* sur la musique française du XVIIe siècle.
Apprenez ou approfondissez vos connaissances en compagnie de Saskia de Ville, productrice Ă  France Musique et de SĂ©bastien DaucĂ©, directeur artistique de l’ensemble Correspondances/
Le MOOC « Voyage musical dans la France du 17e siècle » prĂ©sente une pĂ©riode artistique parmi les plus foisonnantes de l’histoire française. Il s’adresse Ă  un très large public et ne nĂ©cessite aucun prĂ©-requis. Vous serez plongĂ© au cĹ“ur de la richesse et de la beautĂ© du patrimoine français Ă  travers des vidĂ©os, des exercices interactifs, des images d’archives et des extraits musicaux. Ce MOOC, entièrement gratuit, va stimuler votre curiositĂ© et vous former Ă  l’écoute de la musique du XVIIe siècle. La FacultĂ© des Lettres de Sorbonne UniversitĂ© a apportĂ© son expertise scientifique Ă  ce MOOC rĂ©alisĂ© en collaboration avec nos partenaires du centre culturel d’Ambronay, du MusĂ©e du Louvre, de l’IReMus et de l’ensemble musical Correspondances.

LIRE ICI :
https://lettres.sorbonne-universite.fr/actualites/mooc-musique-17e / Le premier Ă©pisode a Ă©tĂ© diffusĂ© le 18 fĂ©vrier mais vous pouvez encore rejoindre l’aventure !
(1) De l’anglais Massive Open Online Course, aussi appelĂ© « cours en ligne ouvert Ă  tous »

 

 

 

 

WEB SERIE : La Gymnastique, sans claquage
à partir de mercredi 24 février 2021
A VOIR sur ARTE.TV ici
https://www.arte.tv/fr/videos/RC-017300/gymnastique/

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Gymnastique – La Culture sans claquage
5 Ă©pisodes inĂ©dits de la websĂ©rie documentaire d’ARTE tournĂ©s au MusĂ©e de la musique / CitĂ© de la musique, PARIS. Cinq Ă©pisodes tournĂ©s l’automne dernier au MusĂ©e de la musique sous la supervision de StĂ©phane Vaiedelich, directeur scientifique.
Comment reconstituer un instrument disparu ? Pourquoi le glassarmonica est‑il un instrument diabolique ? Comment a‑t‑on mis tous les musiciens au même diapason ? Pourquoi fabriquer une octobasse ? A quoi peut bien servir cet étrange violon-trompette ? Enigmes, doutes, interrogations trouvent ici leur réponse grâce aux équipes de conservation et de recherche du Musée, qui, en plus de partager leur savoir avec passion, illustrent les différents concepts abordés par des expériences vivantes réalisées dans les salles du laboratoire.

Créée en 2019, Gymnastique est une série documentaire diffusée tous les mercredis sur la plateforme arte.tv. A travers de courts épisodes, elle aborde un thème culturel de façon décalée : histoires singulières, sujets méconnus, légendes urbaines.

OCTOBASSE
L’instrument Ă©norme qui n’a pas fait beaucoup de bruit
C’est le mammouth des instruments Ă  cordes : 3,87 m de haut et 135 Kg… PensĂ© en1849, l’octobasse a connu son heure de gloire, mais il n’en existe plus aujourd’hui que trois exemplaires utilisĂ©s dans le monde. Comment cet instrument si imposant a-t-il pu quasiment disparaĂ®tre ?

ARMONICA DE VERRE
L’instrument qui rend fou
On a tous essayé de faire chanter un verre avec un doigt. Benjamin Franklin en a fait un instrument, l’armonica de verre. Magnifique, mais dangereux : il rendait fou ceux qui en jouaient ! 150 ans plus tard, certains bravent le danger et continuent à faire résonner ce son si particulier : Radiohead, Tom Waits, Bjork…

VIOLON STROH
Mais c’est quoi ce violon-trompette ?
Aujourd’hui, on apprend plutôt la musique avec une flûte, un piano ou une guitare. Mais dans les années 1900, vous auriez peut-être voulu à tout prix jouer du violon Stroh. Mi-trompette, mi-violon, il était alors la star des instruments. Mais à quoi sert cet étrange pavillon ?

DISPARUS
Le son des instruments disparus
Au MusĂ©e de la musique de Paris, certaines pièces sont si rares ou si anciennes qu’il est devenu impossible d’en jouer, comme la vihuela, l’ancĂŞtre de la guitare. Bravant l’érosion du temps, des chercheurs arrivent pourtant Ă  les ressusciter, en les copiant / reproduisant Ă  l’identique. Est-ce que quelqu’un sait encore en jouer ? Et comment faire pour imiter le son d’un instrument du XVIème qu’on n’a jamais entendu jouer ?

PERSONNE N’EST AU DIAPASON
Personne n’est au diapason
On connait tous l’expression “donnez le la”. Mais saviez-vous d’où ça vient ? Tout simplement car avant de jouer en orchestre, les musiciens s’accordent à partir d’une seule note : le la. C’est pratique, ça évite les fausses notes. Le problème, c’est que tous les la ne se valent pas, selon la fréquence à laquelle on les joue ! Au XIXème siècle, le débat a enflammé l’Europe. Alors, comment s’est-on mis d’accord en musique ?

 

 

 

 

 

 

 

 

ORCHESTRES. L’ON LILLE / ORCHESTRE NATIONAL DE LILLE dans les medias en FEVRIER 2021

ORCHESTRE-NATIONAL-DE-LILLE-maestro-alexandre-Bloch-concert-classiquenews-critique-annonceORCHESTRES. L’ON LILLE / ORCHESTRE NATIONAL DE LILLE dans les medias en FEVRIER 2021. 3 concerts Ă  voir dès ce soir (mercredi 24 fĂ©vrier 2021 Ă  minuit) et jusqu’au 26 fĂ©vrier dans les mĂ©dias avec les chefs d’orchestre Alexandre Bloch, Timothy Brock, Yaron Traub et les solistes Patricia Kopatchinkaja (violon), Varvara (piano). L’ON LILLE depuis le confinement de la culture fin octobre 2020, dĂ©ploie initiatives et tĂ©nacitĂ© pour conjurer les effets mortifères de la fermeture des salles de concerts. Pour preuve, ces 3 programmes diffusĂ©s par WEO, FRANCE 3 et MEZZO.

 

 

SUR WEO

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WEO chaîne NORD PAS DE CALAIS
A VOIR ici
https://www.weo.fr/video/la-joie-de-poulenc-sur-weo/

Vendredi 19 février : 22h15
Dimanche 21 février : 15h
Jeudi 25 février : 16h
LA JOIE DE POULENC
Tchaikovski / Poulenc

ORCHESTRE NATIONAL DE LILLE
Alexandre BLOCH, direction
Patricia Kopatchinkaya, violon

 

FRANCE 3

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Mercredi 24 février 2021, 2è partie de soirée (vers minuit / OhO5)
après la diffusion des Victoires de la musique classique 2021
CONCERT FAMILLISSIMO
DrĂ´le de cirque
Sauguet et Satie
L’œuvre de Sauguet est une subtile alchimie de musiques de cirque et de musiques de scène. Toutes les facettes de ce monde sont Ă©voquĂ©es avec brio et tendresse par Sauguet, digne disciple d’Erik Satie, Ă  qui il dĂ©die cette Ĺ“uvre.

ORCHESTRE NATIONAL DE LILLE
Timothy BROCK, direction
Grégoire Pont, illustrations et animations

A VOIR ici
https://france3-regions.francetvinfo.fr/hauts-de-france/emissions/concerts-spectacles/drole-cirque-orchestre-national-lille-mercredi-24-fevrier-0h05-1929242.html

 

 

MEZZO
Samedi 27 février 2021 : 22h40

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RACHMANINOV : Concertos pour piano n°1 et n°3
A VOIR ici :
https://www.mezzo.tv/fr/Classique/Varvara-Nepomnyashchaya-et-l%27Orchestre-National-de-Lille-3210
Rediffusions les 16, 18 et 25 mars 2021
Sergei Rachmaninov (1873 – 1943)
Concerto pour piano n° 2 en ut mineur, op. 18
Concerto pour piano n° 4 en sol mineur, op. 40

Enregistrement : 7 fĂ©vrier 2019 – Nouveau Siècle | Lille
Réalisation : Nicolas Foulon
Durée: 01:11

ORCHESTRE NATIONAL DE LILLE
Yaron Traub, direction
Varvara Nepomnyashchaya, piano

A VOIR aussi Vendredi 26 février 2021, 22h40
RACHMANINOV : Concertos pour piano n°1 et n°3
Sergei Rachmaninov (1873 – 1943)
Concerto pour piano n° 1 en fa dièse mineur, op. 1
Concerto pour piano n° 3 en ré mineur, op. 30

Enregistrement : 8 fĂ©vrier 2019 – Nouveau Siècle | Lille
Réalisation : Nicolas Foulon
Durée: 01:22
A VOIR ici :
https://www.mezzo.tv/fr/Classique/Varvara-Nepomnyashchaya-et-l%27Orchestre-National-de-Lille-Concertos-pour-piano-de-Rachmaninov-n%C2%B01-et-3-3208

 

 

Retrouvez les concerts de l’ORCHESTRE NATIONAL DE LILLE
sur le site YOUTUBE de l’ORCHESTRE NATIONAL DE LILLE
contenant l’offre digitale de l’Orchestre (à travers son contenu AUDITO 2.0)

 

 

STREAMING, concert, critique. Le 6 fév 2021. Wagner, Brahms : Orchestre National de Lille / Hartmut Haenchen.

wagner_hartmut haenchen maestro orchestre national de lille concert streaming Lille critique concert audito 2 classiquenews wagner wesendoncklieder brahms concert critique classiquenewsSTREAMING, concert, critique. Le 6 fĂ©v 2021. Wagner, Brahms : Orchestre National de Lille / Hartmut Haenchen. En effectif distanciĂ© – une partie des musiciens occupent le devant de la scène de l’auditorium du Nouveau Siècle Ă  Lille, Ă©tendue sur les premiers rangs de la vaste salle, l’Orchestre National de Lille après une odyssĂ©e mahlĂ©rienne qui aura marquĂ© l’annĂ©e 2019, affirme chez Wagner des accents non moins convaincants. Le cycle des 5 Wesendonck-lieder (1857) composĂ©es au moment de la conception de La Walkyrie, accordent puissance orchestrale et poĂ©tique chambriste autour du sujet central de l’amour ; ici un sentiment impĂ©rieux, omnipotent, irrĂ©pressible, qui est autant force de transcendance qu’enchaĂ®nement malĂ©fique.

LANGUEUR AMOUREUSE WAGNÉRIENNE,
GRAVITÉ TENDRE DE BRAHMS…

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La voix de la mezzo Marina Prudenskaya est d’un bon format ; elle est ample, puissante, et malgrĂ© de premiers aigus mĂ©talliques un peu dur dans le premier lied (L’Ange), les nuances et les phrasĂ©s mieux filĂ©s s’affirment dans le second, plus dramatique et exaltĂ© (« Stehe still! / ArrĂŞte-toi! ») sa sĂ©quence finale, plus caressante. Les Wesendonck prĂ©ludent Ă  l’extase de l’opĂ©ra Ă  venir, celle de Tristan und Isolde ; chef et diva s’embrasent, en couleurs et teintes ciselĂ©es (l’orchestre y est chambriste et dĂ©jĂ  tristanesque) : Hartmut Haenchel souligne la filiation entre les lieder et Tristan, en particulier dans le 3è (« Im Treibhaus » / dans la serre ») qui dĂ©veloppe dĂ©jĂ  l’atmosphère alanguie, suspendue de l’enchantement mĂ©lancolique presque mortifère du dĂ©but du IIIè acte de Tristan : profonde langueur lĂ©tale et douloureuse d’un amour consommĂ© mais impossible, maudit (celui du compositeur et de Mathilde Wesendonck). Les Ă©quilibres, le format sonore parlent sans forcer ; ce sentiment de solitude dĂ©munie, d’impuissante incantation, de gravitĂ© tragique, d’hallucination finale… se dĂ©ploie alors, cristallisant l’effroi et la dĂ©sespĂ©rance qui jaillissent dans ce sommet du cycle… le chef murmure et sculpte un chef d’oeuvre d’orchestration wagnĂ©rien. Après le 4è (« douleurs / Schmerzen ») oĂą l’effroi quasi panique, cet enchaĂ®nement des sens a trouvĂ© Ă©pisodiquement un baume dans l’enveloppe rĂ©confortante du sublime cor, triomphe la puissance nocturne de « RĂŞves / Träume », immersion dans la lyre poĂ©tique wagnĂ©rienne qui prĂ©lude lĂ  encore Ă  l’opĂ©ra Tristan und Isolde, en particulier le miracle de l’acte II, celui de la nuit, la profonde paix d’un amour enfin accompli et serein. Superbe instant suspendu hors rĂ©alitĂ©. Et très belle conclusion au cycle lyrique par ses respirations chambristes.

Puis s’affirme le mĂ©tal victorieux de la 3è symphonie de Johannes Brahms, son premier mouvement qui tout en souple ductilitĂ© dĂ©veloppe l’esprit de conquĂŞte tendre, – Brahms est le compositeur de la confidence et de la pudeur. Hartmut Haenchen fait briller l’éclat vaporeux des bois et des vents, piliers des couleurs brahmsiennes. De fait, proche et connaisseur des indications prĂ©cises et justes du compositeur, le chef dĂ©ploie des sonoritĂ©s mozartiennes chez Brahms, avec un souci de la transparence, laquelle n’écarte pas la puissance voire l’âpretĂ© des tutti comme chauffĂ©s Ă  blanc. Orchestre et chef redoublent de complicitĂ© intĂ©rieure dans le 2è mouvement, lĂ  encore amorcĂ©, colorĂ© par les sublimes vents, oĂą se meuvent, souterrains, des Ă©nergies et des flux Ă  l’énoncĂ© subtile, fruit d’un Ă©quilibrage très fin des pupitres. L’écoute intĂ©rieure, la clartĂ© conduisent la baguette du chef, très convaincant dans l’explicitation de la texture orchestrale d’un Brahms secret en effet, Ă  la très riche vie intĂ©rieure. Le propos est dense sans Ă©paisseur. En guise d’épanchement, le 3è mouvement est conduit fluide, clair, sobre, sans aucune affectation ; avec l’éloquence de la sincĂ©ritĂ© : lĂ  encore, Brahms s’y rĂ©vèle tel qu’en lui-mĂŞme, grave et tendre, pudique presque sibyllin, d’une ineffable douceur. Laquelle, force souveraine, triomphe dans la coda du dernier allegro.
STREAMING CRÉATIF A LILLE… Voilà un nouveau concert en streaming qui confirme l’imagination créative, sa résilience tenace, du National de Lille. Ses équipes sont bien sur le pont pour conjurer les effets asphyxiants de l’état d’urgence sanitaire qui pèse sur l’activité du spectacle vivant. On ne comprend toujours pas pourquoi musées, salles de concerts ou d’opéras n’ont pas réouvert, alors qu’ils ont démontré leur capacité à maîtriser les gestes et protocoles sanitaires. Heureusement pour notre mental, l’Orchestre National de Lille s’efforce de poursuivre ses activités musicales en faisant travailler ses artistes, en diffusant ses concerts sur la toile. Salvatrice proposition. Exemplaire ténacité.
Prochain concert Wagner attendu : « Enchantements », mer 31 mars / Jeudi 1er avril 2021 (Parsifal : PrĂ©lude acte I, Enchantement du Vendredi Saint / couplĂ©s avec les Quatre dernier lieder de Strauss – Kazushi Ono, direction). Mais le nombre requis d’instrumentistes pour honorer un tel programme sera-t-il adaptĂ© au contexte sanitaire de ORCHESTRE-NATIONAL-DE-LILLE-AUDITO-2.00-concert-digital-en-direct-depuis-l-auditorium-du-nouveau-siecle-lille-annonce-critique-concert-classiquenewsmars 2021 ? Gageons que le National de Lille saura trouver une solution alternative. A suivre… EN REPLAY : CONCERT WAGNER / BRAHMS Ă  revoir en replay sur le site YOUTUBE de l’ON LILLE / ORCHESTRE NATIONAL DE LILLE

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Programme « Wagner amoureux »

WAGNER : Wesendonck-Lieder
BRAHMS : Symphonie n°3
Hartmut Haenchen, direction  /  
Marina Prudenskaya, mezzo-soprano

Plus d’infos sur le site de l’ON LILLE / Orchestre National de LILLE :
https://www.onlille.com/saison_20-21/concert/wagner-amoureux/

 

 

 

 

LIRE aussi notre présentation / annonce du concert WAGNER AMOUREUX / 3è de BRAHMS ici

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REPORTAGE VIDEO
L’Orchestre national de Lille à l’épreuve de la pandémie. Comment le National de Lille résiste et s’adapte à la crise sanitaire en poursuivant coûte que coûte son activité…

http://www.classiquenews.com/lancement-de-la-nouvelle-saison-2020-2021-de-lon-lille-orchestre-national-de-lille/

ONL-Orchestre-National-de-Lille-confinement-hitchcock-symphonique-critique-concert-classiquenewsREPORTAGE VIDEO. L’ONL Orchestre National de Lille à l’épreuve de la covid 19. Comment l’Orchestre a t il lancé sa nouvelle saison 2020 2021, comment s’adapte-t-il aux contraintes nouvelles imposées par les mesures sanitaires ? Quel est son fonctionnement en terme de relation au public, de programmation et de billetterie ? Comment le travail des musiciens se poursuit-il avant le retour de l’Orchestre au complet sur la scène ? Reportage exclusif PARTIE 1 / 2 © studio CLASSIQUENEWS 2020 – Réalisation : Philippe-Alexandre PHAM – Entretiens avec François Bou (Directeur Général), Alexandre Bloch (directeur musical), Fabio Sinacori (délégué artistique), Edgar Moreau (violoncelle / Concerto pour violoncelle n°1 de Haydn, concert d’ouverture du 24 sept 2020 au Nouveau Siècle à Lille)…

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CD critique, HAHN : Ă” mon bel inconnu (Samuel Jean, 1 cd Palazzetto Bru Zane, 2019)

HAHN-o-mon-bel-inconnu-cd-livre-Bru-zane-samuel-Jean-pancrazi-dolie-critique-cd-opera-opera-review-CLASSIQUENEWS-critique-cdCD critique, HAHN : Ă” mon bel inconnu (Samuel Jean, 1 cd Palazzetto Bru Zane, 2019) – ComĂ©die sincère des annĂ©es 30… Hahn affectionne la lĂ©gèretĂ© suggestive ; l’art d’une finesse savoureuse qui se lit Ă  plusieurs degrĂ©s ; ainsi la partition d’Ô mon bel inconnu cultive cette couleur opĂ©ra comique, comĂ©die lĂ©gère voire opĂ©rette. Après « Mozart », le duo Hahn / Guitry se retrouve sur le thème d’une tribu pas si convenable que cela. La famille Aubertin, père, mère et fille, clan anecdotique de la petite bourgeoisie commerçante (Prosper est chapelier) s’émoustille de fantasmes nĂ©s de correspondances Ă©pistolaires, propres Ă  effacer la routine domestique et familiale. L’ennui guette cette communautĂ© apparemment respectable, qui en proie au dĂ©sordre Ă©motionnel, est victime des frivolitĂ©s parisiennes. Le dĂ©sir et le fantasmes menacent sĂ©vèrement cet Ă©quilibre clanique ; l’excitation, les propos Ă©grillards font imploser les biensĂ©ances sociales (« pinson » Ă©pineux, salace, bien dans l’esprit de Guitry qui signe ici sa nouvelle coopĂ©ration avec Hahn : « Mais vous m’avez pincĂ© le derrière », s’écrie Antoinette Ă  Jean-Paul : on pourrait s’étonner aujourd’hui d’une telle naĂŻvetĂ© emblĂ©matique de l’Entre-Deux guerres, un rien ridicule dans son Ă©noncé…).
Ce qui sauve ici Hahn, c’est la profondeur et la finesse sous le masque d’une apparente indifférence (en cela le personnage de Claude, faux soupirant et vrai coeur irradié : excellent Yoann Dubruque, intelligible, naturel, nuancé, éclaire cette seconde nature de l’écriture). Hahn rivalise ainsi entre sincérité et drame avec son grand modèle, le Mozart des Noces. On notera ainsi de même, l’indiscutable gouaille mesurée d’Éléonore Pancrazi dans le rôle de la bonne Félicie. Voici deux tempéraments dramatiques, au français impeccable, à l’expressivité subtile et changeante… qui se démarquent nettement du reste de la distribution.

Le chef soigne cette ambiance suave et drôlatique, badine mais sincère, en particulier pour l’ouverture, chaque intermède et entracte où seuls les instruments de l’orchestre chantent cette frivolité délicieuse (à noter clin d’oeil au romantisme hexagonal, le saxo, clair emprunt à l’orchestre de Thomas). La lecture est soignée, vive, s’appuyant sur des caractères bien restitués ; de quoi nous éclairer sur le duo Guitry / Hahn à la scène, qui illumine en oct 1933, le paysage musical parisien (Bouffes-Parisiens).

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CD, critique. HAHN : O mon bel inconnu, 1933 (Gens, Pancrazi, Dubruque, Dolié… Orch nat. Avignon-Provence, Samuel Jean). 1 cd Palazzetto Bru Zane, enregistré en sept 2019.

 

 

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Autres opéras de Reynaldo HAHN critiqués sur classiquenews.com :

 

 
 

 

ile-du-reve-hahn-cd-niquet-dubois-cd-critique-classiquenews-CLIC-de-classiquenews-octobre-2020-BZ-1042-PHYSICAL-front-OK-654x1024-cd-classiquenews-opera-critiqueCD événement. REYNALDO HAHN : L’île du rêve (Dubois, Sargsyan… Niquet, 2020) 1 cd Opéra français Pal Bru Zane. L’île du rêve (« idylle polynésienne créé en 1898), c’est assurément l’extase amoureuse qui lie dès le premier acte, Mahénu et Loti, la jeune polynésienne de … 16 ans, et l’officier français plus mûr, excité évidemment de s’offrir ainsi les charmes d’une adolescente indigène. Il y a du Massenet dans cette écriture tendre et envoûtée ; le second acte commence comme une ouverture néobaroque, où règnent surtout la volupté capiteuse des cordes : la direction très kitsch du chef soigne de fait le lyrisme sucré et la séduction chantante des mélodies, moins le raffinement millimétré du style du jeune Hahn, très français dans son sens des couleurs à la fois suaves, et tendres et d’un lyrisme éperdu.

http://www.classiquenews.com/cd-evenement-reynaldo-hahn-lile-du-reve-dubois-sargsyan-niquet-2020-1-cd-opera-francais-pal-bru-zane/

 

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Ciboulette-Fra-Musica-DVD_1_155x225CLIC D'OR macaron 200DVD. Reynaldo Hahn : Ciboulette, 1925. (Fuchs, Opéra Comique février 2013. 2 dvd FRA Musica). En 1925, au cœur des années folles, celles de l’entre deux guerre, Reynaldo Hahn (1874-1947) revivifie l’esprit enivré des opérettes de Johann Strauss et d’Offenbach : c’est une succession de tableaux populaires et collectifs d’où jaillissent de subtiles personnalités (Ciboulette, Antonin), qui évoque aussi en une fresque sociale et politique, le Paris des Halles et de l’Opéra : mixité des classes comme si elles étaient à bord du Titanic : emportées malgré leurs différences qui s’entrechoquent mais acculées à l’inéluctable, non pas fractionnées ni opposes mais fusionnées des officiers de hussards aux maraîchers des Halles, des courtisanes aux aristos… : un traumatisme vécu par tous sans distinction en 1914 et 1918, bientôt à venir en 1939… La nostalgie d’une ère bénie perdue, celle des premiers amours – ivresse de l’innocence bercée d’illusion amoureuse (le baryton soudainement grave et sombre et très tendre du contrôleur Duparquet), surtout cet état choqué, celui des lendemain de griseries et d’orgies conduisant à un réveil difficile : on pense constamment aux climats de La Chauve souris (même confusion des classes grâce au truchement des masques et du carnaval, même difficulté face au réel… avec cet épanchement éperdu, sincère vers l’amour). Tout l’opéra est construit sur la lente et progressive révélation du pur amour, le vrai, le plus authentique, celui qu’éprouve le jeune richard Antonin et la belle maraichère aux Halles, Ciboulette, si piquante et astucieuse du haut de ses 21 ans. La délicatesse et le raffinement du style de Hahn éclate au grand jour : une intelligence des contrastes, une sensibilité surtout qui en font un génie de la légèreté grave. Evidemment, les airs de Ciboulette qui exige un soprano agile, ne comportent malheureusement aucune coloratoure ni vocalises car le style verse toujours dans la chanson, la revue, et la comédie musicale, époque oblige. EN LIRE PLUS

 

 

 

 
 

 

Dossier SAINT-SAËNS : centenaire 2021 (entre liberté et classicisme)

SAINT-SAENS-camille-portrait-centenaire-mort-de-camille-saint-saens2021 marque le centenaire de la mort de Camille Saint-SaĂ«ns : esprit libre, Ă©lectron gĂ©nial, dĂ©fenseur de la musique française (contre l’hĂ©gĂ©monie des Allemands et de Wagner). Le musicien fut pianiste et compositeur, d’une rare culture, voyageur rĂ©gulier, solitaire polĂ©miste dont l’acuitĂ© de l’esprit inspire toujours. Ayant connu Berlioz, tĂ©moin des Ĺ“uvres de Debussy et Ravel, Saint-SaĂ«ns traverse le XIXè avec Ă©clat par ses audaces formelles, son goĂ»t du théâtre oĂą se dĂ©ploie la passion des anciens. C’est un Baroqueux avant l’heure : passionnĂ© par Lully et Marc Antoine Charpentier, Rameau et Gluck (comme Berlioz)… Voici quelques thĂ©matiques clĂ©s pour mieux approcher la diversitĂ© d’un gĂ©nie romantique difficile Ă  classer.

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SAINT-SAËNS ET LE MILIEU PARISIEN. S’il est populaire, sa musique jouée et appréciée, connue et célébrée en Province comme à Paris, Saint-Saëns est « boudé » par les autorités parisiennes qui font et défont la gloire des artistes. En réalité, son génie l’a propulsé naturellement au devant de l’estrade jusqu’à devenir le compositeur officiel de la IIIè République. Pianiste et organiste virtuose, Saint-Saëns a composé dans tous les genres, innovant souvent en créateur sans entraves et doué d’une imagination féconde : Danse Macabre, IIIème symphonie pour orgue (dédiée à la mémoire de Liszt). Ses opéras sont à redécouvrir, saisissant tous par leur originalité et leur parure d’un raffinement inouï : orientalisme (Samson), historicisme (Ascanio, Henry VIII, …)…

 

2021, annĂ©e d’une rĂ©habilitation espĂ©rĂ©e…

Camille SAINT-SAËNS :
le plus grand génie romantique français
après BERLIOZ ?

 

 

 

Voyageur régulier, ambassadeur du goût français

Mobile, actif, Saint-Saëns voyage beaucoup ; aimant passionnément l’Orient, surtout l’Afrique : il meurt à Alger. Partout, il joue ses œuvres, exporte ainsi le goût et l’élégance française. Encore en 1915, pour l’exposition musicale de San Francisco, il est présent, pourtant octogénaire, incarnant l’excellence française tel un envoyé officiel.

 

 

 

Saint-Saëns écrivain

Personnalité publique et polémiste, Saint-Saëns comme Berlioz sait écrire et il est publié dans les medias d’alors, moins la presse grand public que spécialisée ; il prend la parole, participe au débat, n’hésite pas à affronter et répondre, en défenseur du bon goût. Ce qui lui a collé à la peau, surtout à la fin de sa carrière où il paraissait conservateur et obtus, étranger à la modernité naissante (Pelléas de Debussy). Mais il s’obstine contre la critique parisienne, arrogante et cassante car il a pour lui, l’adhésion populaire, et comme sa musique, un style ardent, clair et construit.

En 1890, l’écrivain qui se fixe à Dieppe, se fait aussi poète et dramaturge : il écrit un recueil de poème (Rimes familières) et la comédie « La Crampe des écrivains », soulignant son humour, trait toujours gommé chez les biographes, et qui le rapproche d’un Rossini ; suivra encoreLe Roi Apepi, créé à Béziers en 1903.

La correspondance privée commence à révéler ses trésors, soit plus de 18 000 lettres dont celles avec son éditeur Auguste Durand, bien documentée de 1835 à sa mort. Entre les affaires d’édition et le travail musical, le compositeur dévoile l’homme : un esprit curieux, esthète, universaliste qui attend toujours une biographie fidèle et plus nuancée. L’aisance épistolaire et la vitalité de son style écrit paraissent au grand jour grâce à deux ouvrages édité par Actes Sud : Correspondance avec Fauré et Saint-Saëns globe trotter.

 

 

 

Saint-Saëns et l’opéra

C’est à l’égal de Vivaldi, un chantier encore vierge tant les ouvrages sont nombreux et pourtant méconnus. Aux côtés du célèbre Samson et Dalila, à juste titre joué régulièrement (et qui fut créé grâce à l’aide de son ami Liszt à Weimar), il faut absolument réécouter et réévaluer Frédégonde, La Princesse jaune, Les noces de Prométhée, Phryné, Etienne Marcel… ou Proserpine, Les Barbares, Le Timbre d’argent, surtout Ascanio récemment enregistrés. La reconnaissance du Saint-Saëns lyrique a souffert du fait que le trop jeune musicien (16 ans) n’obtint pas le Prix de Rome (tremplin pour le genre), même s’il fut l’élève lumineux d’Halévy (l’auteur vénéré de La Juive). Une seconde tentative pour Rome à 28 ans se solde là encore par un échec (pas assez inexpérimenté, selon une formule attribuée à Berlioz ou à Gounod). On comprend que Saint-Saëns ait dès lors choisi de suivre son propre chemin.

Avec Samson et Dalila, Saint-Saëns offre avant Carmen, une figure féminine vénéneuse et toxique, amoureuse libre et passionnée et voix de contralto (Pauline Viardot) ; un portrait qui ne colle pas avec la France post 1870, puritaine et patriote, d’autant que soutenu par Liszt, Saint-Saëns est considéré comme germanique.

 

 

Saint-Saëns et les sujets lyriques

Pour l’exposition universelle de 1867, il compose la cantate Les noces de PromĂ©thĂ©e (1er Prix dĂ©cernĂ© par le jury qui rĂ©unit alors Verdi, Gounod, Rossini, Auber, Berlioz !). PromĂ©thĂ©e est créé aussi Ă  Weimar en mai 1870 grâce Ă  Liszt qui encourage Saint-SaĂ«ns dans l’élaboration de Samson. Outre son affection pour la Renaissance, source historique et française qui offre une belle alternative au wagnĂ©risme ambiant, le compositeur, amateur des anciens, de Lully Ă  Rameau, affectionne particulièrement les sujets mythologiques : en tĂ©moignent Les Noces de PromĂ©thĂ©e (1867), Proserpine (1887), PhrynĂ© (1893), DĂ©janire (1898, créé au théâtre des Arènes de BĂ©zier pour refonder localement une tradition musicale et lyrique) ; puis les Barbares (1901 : relecture nĂ©o antique de l’histoire romaine auquel l’auteur apporte sa lecture du conflit franco-prussien : Rome est assiĂ©gĂ© par les teutons) ; les musiques de scène pour Andromaque de Racine (1903) ; HĂ©lène (1904)… Sur le plan symphonique aussi les 4 poèmes symphoniques : Le Rouet d’Omphale (1871), PhaĂ©ton (1873), La Danse macabre (1874), La Jeunesse d’Hercule (1877), offre fĂ©conde certainement inspirĂ© par le crĂ©ateur du genre Liszt, son ami de toujours. Outre son opĂ©ra biblique, dĂ©sormais cĂ©lèbre, Samson et Dalila (1877), Saint-SaĂ«ns laisse un important corpus inspirĂ© par la Renaissance française : Etienne Marcel (1879), Henry VIII (1883), Ascanio (1890), …

 

 

 

Saint-Saëns mélodiste

Le compositeur cultivé, esthète qui avait le goût des textes et de la poésie a laissé environ 160 mélodies, dont le cycle La cendre rouge, écrit pendant la première guerre mondiale… des perles qui elles aussi, comme ses opéras, sont à redécouvrir. C’est un chantier pourtant essentiel comptant des chefs d’oeuvres aussi marquants que les œuvres de Gounod, Fauré (l’élève de Saint-Saëns) et Massenet.

 

 

 

Ardent défenseur de la musique française

Patriote, Saint-Saëns s’engage très tôt pour la redécouverte des auteurs anciens ; inaugurant même le mouvement baroque avant l’heure ; s’il crée la Société Nationale le 25 février 1871, favorisant les compositeurs français contemporains, Camille collectionne les partitions anciennes et organise leur édition critique moderne : ainsi les rééditions de Gluck (à la suite de Berlioz), Charpentier et de Rameau. Mais aussi Lully dont il réorchestre Armide pour les Arènes de Béziers en 1904. Il s’intéresse déjà aux notions d’ornementation, d’organologie (président de la société des instruments anciens), préfigurant le souci actuel de restitution sonore historique. Il s’interroge sur l’interprétation des oeuvres de Leclair et Mondonville, comme celles de Corelli et Bach. Rameau est une source régulière pour l’interprète comme le compositeur : Saint-Saëns pianiste a joué du Rameau dans ses récitals ; comme compositeur, il a écrit à la manière Baroque, plusieurs ballets « historiques », néo baroques et aussi néo Renaissance, pour Henry VIII et pour son chef d’oeuvre à redécouvrir, Ascanio (page des plus raffinées). Enfin, Marc-Antoine Charpentier lui doit sa première résurrection, comme génie méconnu, « contemporain de lully », enfin redécouvert grâce entre autres à son enthousiasme pour Médée dont il souligne l’écriture « impeccable »…

 

 

SAINT-SAËNS et WAGNER

Camille-Saint-Saens DRJusqu’en 1885, lors d’une tournée en Allemagne, Saint-Saëns alors reconnu comme l’ambassadeur du bon goût français, se rebiffe définitivement contre le wagnérisme et surtout contre les wagnériens.  Quand Carvalho, directeur de l’Opéra-Comique lui propose de reprendre Lohengrin, l’auteur de Samson et Dalila s’oppose nettement. Depuis la défaite de 1870 de la France face à la Prusse, Wagner ne cesse d’être instrumentalisé comme emblème de la supériorité du génie germanique vis à vis des autres cultures, dont évidemment la culture et la musique française. Un revers mal vécu par Saint-Saëns qui soldat rejoint le 4è bataillon de la garde nationale ; il sera alors très affecté par le mort de son ami, le peintre orientaliste et chanteur Henri Regnault (la Marche héroïque lui est dédiée).

WAGNER : le Ring Jordan sur France MusiquePourtant, presque 10 ans auparavant, dès 1876, Saint-Saëns fait le pèlerinage à Bayreuth, assistant au festival inaugural ; témoignant son enthousiasme pour l’opéra wagnérien : il est peut remercié en retour ; Wagner reconnaissant surtout l’excellent pianiste, moins le faiseur d’opéras ! Peu à peu, Saint-Saëns que la reconnaissance du patrimoine musical français préoccupe, mène un combat de plus en plus aigu contre la wagnérite qui s’empare de la France dans les décades 1880 et 1890. Autre manifestation du « combat » antiwagnérien de Saint-Saëns : la création du conservatoire américain de Fontainebleau (dans l’aile Louis XV du château), en 1921, destiné à rompre l’habitude des jeunes musiciens américains à se former en Europe à Berlin ou Leipzig, cité musicale internationale où Bach, Mendelssohn, et tant d’autres ont ébloui le monde. Après 1918, les Français souhaitent imposer le leadership culturel et musical d’autant plus face à l’Allemagne affaiblie.

 

 

 

Longévité florissante

saint saens camille portrait pour classiquenews camille-saint-sans-1Saint-Saëns né l’année de la création au Théâtre Italien des Puritains de Bellini (1835), compose encore l’année de sa mort, 1921. Le 16 décembre 2021 marque donc le centenaire de sa mort. Une longévité impressionnante pour ce reptile tenace et combattif qui aura vécu 86 ans, connu tous les régimes, les genres, les styles, les époques et aussi Rossini, Berlioz, Meyerbeer, Debussy, Ravel. C’est le dernier des classiques romantiques, qui assure le pont entre Berlioz et Ravel. La mémoire incarnée de la musique française au XIXè jusqu’à la révolution symboliste et impressionniste du début du XXè.

Un malade chronique

De santé fragile, tuberculeux depuis la naissance, Camille cultive un rapport singulier avec la faucheuse ; d’autant qu’il a perdu ses deux fils en bas âge (1878). Conscient de sa faiblesse constitutive, mais toujours combatif ; préférant le vertige des océans à celui de la maladie ; ses voyages (en Algérie et en Egypte surtout où il séjourne presque 20 fois, d’où le Concerto pour piano n°5 dit « l’égyptien ») entretiennent une résistance à toutes épreuves : à 80 ans, il embarque pour l’Amérique latine ; celui qui a vu tous ses amis partir, meurt sur le métier, au travail, à Alger, le 16 décembre 1921, orchestrant alors la Valse nonchalante.

 

 

 

Saint-Saëns et la célébrité

Voyageur permanent, Camille a toujours su se préserver des paparazzi et autres demandeurs en tout genre ; l’identité inventée de « Charles Sanois » lui garantit ainsi un anonymat primordial à la bonne réalisation de ses séjours. Loin du milieu parisien, il compose en tranquillité.

De mars à avril 1890, sa supposée disparition, en terre lointaine, est montée de toute pièces et alimentée par la presse à sensation, toujours apte à brûler ses idoles pourvu qu’elle vende des milliers d’exemplaires (dont le quotidien Le Matin). Dans les faits, le compositeur est aux Canaries, isolé, protégé, après le décès de sa mère (1888) et aussi le report de la création à l’Opéra de Paris de son opéra Ascanio. Revenu en 1890 à Dieppe où en son honneur un musée lui est dédié ; mais il repart aussitôt pour Ceylan. On ne change pas un esprit qui a le goût des voyages. Tout Saint-Saëns est là, dans ce mouvement perpétuel ; celui d’un pur esprit mobile, libre, jamais convenu ni prévisible ; toujours original et pertinent : en 1908, il compose la première musique de film pour le cinéma, tout en servant son goût pour la Renaissance française : L’assassinat du duc de Guise. Un moderne sous couvert d’élégance classique. Saint-Saëns est comme Berlioz qui réformateur, adepte de Gluck, se disait « classique ».

 

 

 

 

 

 

Approfondir

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Société Camille Saint-Saëns

Exposition « Saint-SaĂ«ns : un esprit libre » / BnF et lâ€OpĂ©ra national de Paris, au Palais Garnier, Ă  partir du 5 mars 2021 – jalon fĂ©dĂ©rateur des cĂ©lĂ©brations pour le centenaire de la disparition du musicien en 1921. Jusqu’au 20 juin 2021. PARIS, Bibliothèque-musĂ©e de l’OpĂ©ra de Paris, Palais Garnier : tous les jours 10h-17h.

 

 

 

A redécouvrir

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ASCANIO critique cd annonce review par classiquenews St-Saens-ASCANIO-parution
CD, événement, critique. SAINT-SAËNS : Ascanio, 1890 (Tourniaire, 2017, 3 cd B records)
. Le label B-records crée l’événement en octobre 2018 en dédiant une édition luxueuse à l’opéra oublié de Saint-Saëns, Ascanio, créé en mars 1890 à l’Opéra de Paris. C’est après le grand opéra romantique fixé par Meyerbeer au milieu du siècle, l’offrande de Saint-Saëns au genre historique, et comme les Huguenots de son prédécesseur (actuellement à l’affiche de l’Opéra Bastille), un ouvrage qui s’inscrit à l’époque de la Renaissance française sous la règne de François Ier, quand le sculpteur et orfèvre Benvenuto Cellini travaillait pour la Cour de France. Saint-Saëns sait traiter la fresque lyrique avec un sens maîtrisé de la couleur et de la mélodie : d’autant que, au moment où il fait représenter Ascanio, le genre, objet de critiques de plus en plus sévères, se cherche une nouvelle forme, capable de présenter une véritable alternative au wagnérisme ambiant. Après Etienne Marcel (1879), Henri VIII ( 1883), Ascanio revitalise un sujet français et historique, tout en prenant référence au Benvenuto Cellini de Berlioz qui a précédé et dont lui aussi, la carrière à l’Opéra sera brève.

 

Requiem, dédié à la mémoire de son mécène Albert Libon (qui lui avait fait avant de mourir un don de 100 000 francs en 1877)

 

 

 

 

 

CATALOGUE

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5 concertos pour piano,
5 symphonies dont une avec orgue,
4 poèmes symphoniques (dont Danse macabre),

Opéras

Samson et Dalila (1877)
Le Timbre d’argent (1877)
Henry VIII (1883)
Proserpine (1887)
Ascanio (1890)
Les Barbares (Opéra de Paris, 1901)

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 LIVRES

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LIVRE événement, compte-rendu critique. Stéphane Leteuré : Camille Saint-Saëns, le compositeur globe-trotter (1857 – 1921), Actes Sud. MUSIQUE et POLITIQUE.  Voici l’étendue des déplacements et un premier portrait du Saint-Saëns voyageur, en Europe (Allemagne, Angleterre, Italie), dans cet Orient « africain » qu’avant lui Delacroix ou Félicien David ont parcouru (Algérie et Egypte), mais aussi en USA. L’auteur entend nous dévoiler à travers l’expérience du compositeur romantique français, une première analyse inédite celle développée sous le prisme d’une « géopolitique musicale ». A l’heure de la mondialisation artistique, et aux projets esthétiques qui s’expatriant en atteignant une internationalisation standardisée, le cas Saint-Saëns confronté aux convulsions politiques de son époque, met a contrario en avant l’obligation pour l’artiste créateur de prendre parti, selon le mouvement des nationalismes affrontés (en particulier entre France et Allemagne), selon les postures de la diplomatie dont, dans ses propres déplacements, il ne peut écarter les implications. Intéressant d’interroger ainsi la conscience politique d’un compositeur au hasard de ses déplacements… Surtout à notre époque où bien peu (trop peu) de musiciens, artistes ou compositeurs, prennent parti pour tel ou tel combat : ce n’est pourtant pas les causes qui manquent dans notre monde déréglé, perverti, corrompu. Bref. Ici, le monde de Saint-Saëns ne connaît pas l’horreur de nos temps présents.

Actes sud, camille saint saens globe trotter politique et musique CLIC de classiquenews, review critique presentation livres de CLASSIQUENEWS 9782330077464La mission « volontaire » et assumée de Saint-Saëns favorise le rayonnement de la culture française à travers la diffusion de sa musique, c’est bien ainsi que l’auteur entend privilégier cette préférence nationale, cette volonté de suprématie dans le goût international, surtout à partir de 1905, quand il rejoint les membres du Conseil supérieur des Beaux-Arts. D’autant que les deux Amériques, vers cet Ouest « futuriste et résolument moderniste » sont par exemples estimées tels de nouveaux eldorados, – opportunes issues aux compositeurs français qui peinent à se faire entendre et jouer dans leur propre pays. D’ailleurs l’axe France-USA se cristallise encore après la première guerre avec la création du Conservatoire américain de Fontainebleau.
Dans ce concert des nations où Saint-Saëns veut jouer sa propre partition, l’auteur montre par exemple s’agissant des relations avec l’Allemagne, comment le Français renforce peu à peu un combat direct contre le wagnérisme, s’insurgeant contre la divinisation du maître de Bayreuth dont il a été l’un des premiers festivaliers. Après la mort de Wagner, en 1882, et avec l’essor du wagnérisme, Saint-Saëns s’affirme en défenseur de l’art français, oeuvrant pour la création d’un réseau francophile international où des chefs sensibilisés / alliés sont nommés à des postes clés pour favoriser la musique romantique hexagonale, la soutenir, l’encourager, la faire jouer. Comment alors ne pas justement considéré ce goût pour l’orient comme la réponse du Français, au wagnérisme envahissant de son époque ?

 

saint-saens et rouche la correspondance 1913-1921 presentation par Marie-Gabrielle Soret compte rendu critique de CLASSIQUENEWS editions ACTES SUD livre evenement clic de classiquenews 9782330065812LIVRES, compte rendu critique. Camille Saint-SaĂ«ns et Jacques RouchĂ© : correspondance de 1913 Ă  1921. Actes Sud enrichit sa collection dĂ©diĂ©e aux tĂ©moignages et correspondances d’un romantisme tardif, dĂ©jĂ  Ă©bloui par l’impressionnisme de Debussy, et la syncope frĂ©nĂ©tique d’un Stravinsky (qu’en bon père conservateur St-SaĂ«ns dĂ©testait en le faisant savoir). Les deux hommes de lettres : RouchĂ© / Saint-SaĂ«ns qui Ă©changent, croisent idĂ©es et projets, sont chacun dans une pĂ©riode très active de leur existence. Le Quinqua Jacques RouchĂ© (1862-1957) est le rĂ©cent directeur de l’OpĂ©ra de Paris ; il s’adresse ici Ă  un Saint-SaĂ«ns, vieux (presque octogĂ©naire) maĂ®tre des excellences romantiques, douĂ© d’une invention et d’un classicisme « moderne » qui n’a plus rien Ă  prouver. Face au germanisme wagnĂ©rien croissant (lui qui fut nĂ©anmoins un adepte de Bayreuth dès les premières heures du Festival allemand), Saint-SaĂ«ns se dresse en dĂ©fenseur de l’art musical français. En esprit curieux et fĂ©dĂ©rateur, RouchĂ© accepte de (re)crĂ©er nombre d’ouvrages de Saint-SaĂ«ns sur la scène de l’opĂ©ra de Paris qui ne compte alors que Samson et Dalila : ainsi grâce au jeune directeur, sont montĂ©s : Les Barbares (1914), Etienne Marcel (extraits en 1915 et 1916), Henry VIII (1917), HĂ©lène (1919), Ascanio (1921)… autant d’ouvrages qui suscitent Ă©videmment de constantes coopĂ©rations, oĂą le cher monsieur de 1013 est devenu « mon cher directeur », Saint-SaĂ«ns signant en « ….

 

 

 

leteure stĂ©phane saint saens croquer saint saens critique classiquenews livres actes sudCOMPTE-RENDU, livre Ă©vĂ©nement. StĂ©phane LeteurĂ© : Croquer Saint-SaĂ«ns: Une histoire de la reprĂ©sentation du musicien par la caricature (Actes Sud). Le centenaire Saint-SaĂ«ns commence au mieux. LIRE ici notre dossier spĂ©cial CENTENAIRE CAMILLE SAINT-SAĂ‹NS 2021. Actes Sud fait paraĂ®tre ainsi en fĂ©vrier un opuscule original qui aborde l’image et la reprĂ©sentation de Saint-SaĂ«ns Ă  son Ă©poque. Le compositeur pianiste Ă©tant cĂ©lèbre voire très cĂ©lèbre, fut le sujet de caricatures diverses Ă©pinglant certains traits apparemment emblĂ©matiques (comme son nez disproportionné…), son piano Ă©videmment, sa culture classique, -poussiĂ©reuse forcĂ©ment- qui puise dans l’AntiquitĂ© et la Renaissance… Le dĂ©lire graphique des dessinateurs et des caricaturistes ne connaĂ®t pas de limite et Saint-SaĂ«ns fait les frais de leur imagination impertinente, Ă©lectrisĂ©e avec d’autant plus d’acuitĂ© que le pianiste-compositeur passe pour un pilier de l’art français, l’ambassadeur de la IIIè RĂ©publique : un compositeur incontournable, incarnant le bon goĂ»t, le sĂ©rieux, le classicisme le plus Ă©lĂ©gant. Massenet avait sa moustache gauloise … EN LIRE PLUS ici

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

CD

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ASCANIO critique cd annonce review par classiquenews St-Saens-ASCANIO-parution
CD, événement, critique. SAINT-SAËNS : Ascanio, 1890 (Tourniaire, 2017, 3 cd B records)
. Le label B-records crée l’événement en octobre 2018 en dédiant une édition luxueuse à l’opéra oublié de Saint-Saëns, Ascanio, créé en mars 1890 à l’Opéra de Paris. C’est après le grand opéra romantique fixé par Meyerbeer au milieu du siècle, l’offrande de Saint-Saëns au genre historique, et comme les Huguenots de son prédécesseur (actuellement à l’affiche de l’Opéra Bastille), un ouvrage qui s’inscrit à l’époque de la Renaissance française sous la règne de François Ier, quand le sculpteur et orfèvre Benvenuto Cellini travaillait pour la Cour de France. Saint-Saëns sait traiter la fresque lyrique avec un sens maîtrisé de la couleur et de la mélodie : d’autant que, au moment où il fait représenter Ascanio, le genre, objet de critiques de plus en plus sévères, se cherche une nouvelle forme, capable de présenter une véritable alternative au wagnérisme ambiant. Après Etienne Marcel (1879), Henri VIII ( 1883), Ascanio revitalise un sujet français et historique, tout en prenant référence au Benvenuto Cellini de Berlioz qui a précédé et dont lui aussi, la carrière à l’Opéra sera brève.

 

 

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saint-saens-timbre-argent-roth-cd-critique-opera-review-opera-classiquenews-les-siecles-FX-RothCD, opéra, événement. SAINT-SAËNS: Le timbre d’argent (Roth, 2 cd P. Bru Zane, 2017). Perle lyrique du Romantisme français : premier opéra de Camille Saint-Saëns, écrit en 1864-65, Le Timbre d’argent renaît ainsi par le disque et mérite la timbale d’or. Tout le mérite en revient au chef et à son orchestre sur timbres d’époque : François-Xavier Roth et ses « Siècles ». Venu tard à l’opéra, Camille compose la même année, Samson et Dalila, son plus grand succès encore actuel, et Le Timbre d’argent, totalement oublié depuis 1914. Entre romantisme et fantastique, l’action relève de Faust et de Pygmalion à l’époque du wagnérisme triomphant. Pourtant Saint-Saëns réinvente l’opéra romantique français avec une verve et un imaginaire inédit, qui se moque des conventions et apporte une alternative exemplaire aux contraintes du temps. Le compositeur use de collages, multiplie les clichés décalés, en orfèvre érudit.

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Saint saens proserpine critique compte rendu sur classiquenews opera veronique gens frederic antoun edicionessingulareses1027CD, critique. SAINT-SAĂ‹NS : PROSERPINE (1887). VĂ©ronique Gens, FrĂ©dĂ©ric Antoun, Andrew Foster-Williams… Ulf Schirmer, direction (2 cd ediciones singulares / Pal. Bru Zane, 2016). En couverture du livre cd, le corset de la courtisane Proserpine, et son prĂ©nom en lettres d’or, inspirant un drame tragique qui créé en 1887, sans trop de succès malgrĂ© l’estime que lui portait Saint-SaĂ«ns (qui le tenait pour son meilleur opĂ©ra, ou l’un de ses meilleurs), offre un rĂ´le fĂ©minin d’une ampleur aussi accomplie que celle des hĂ©roĂŻnes de Massenet. D’ailleurs, le style parfois ampoulĂ© et souvent pompier du compositeur, se rapproche de l’auteur de Manon (1884) ou de ThaĂŻs (autre pĂŞcheresse repentie magnifique, créé en 1894)… voire la rare Esclarmonde (OpĂ©ra-Comique Ă©galement, créé en 1889). RĂŞvant son hĂ©roĂŻne comme Bizet avait conçu Carmen, Saint-SaĂ«ns souhaitait une voix large, puissante, dramatique, … Ă  la Falcon. Mais la rĂ©alitĂ© fut plus sournoise et l’auteur dut faire avec les interprètes Ă  sa disposition ; il sopranisa le rĂ´le. D’emblĂ©e l’intonation et le style de VĂ©ronique Gens (au français impeccable qui affirme toujours la diseuse / cf ses rĂ©cents albums de mĂ©lodies françaises romantiques, dont l’excellent “Néère”), son style altier voire aristocratique (elle n’a pas chantĂ© toutes les hĂ©roĂŻnes mythologiques de Gluck, ou presque, pour rien), la finesse de l’incarnation permettent de facto d’exprimer l’épaisseur du personnage : une courtisane vĂ©nĂ©rĂ©e comme VĂ©nus, qui tombant amoureuse d’un jeune homme, Sabatino…

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SAINT SAENS opus33 damien Ventula violoncelle klarthe cd critique cd review classiquenews ravel Huillet CLIC de classiquenewsCLIC D'OR macaron 200CD événement, critique. SAINT-SAËNS, HUILLET : Concertos. Damien Ventula, violoncelle (1 cd Klarthe records, 2020) – Belle vitalité de l’orchestre de cordes, éloquence contrastée, vivace du soliste toulousain… le rare Concerto pour violoncelle opus 33 de Saint-Saëns (arrangé ici par le chef Gilles Colliard) s’impose par sa carrure énergique voire échevelée, ce dès le premier Allegro (non troppo) ; une volonté conquérante que compense l’Allegretto central, conçu comme un menuet où brille la tendresse plus intériorisée du violoncelle (ici un somptueux Antoine Médard de … 1675); orfèvre d’un jeu tout en accents et fluidité, Damien Ventula affronte défis et points extrêmes d’une écriture virtuose mais très équilibrée, où partout rayonne un absolu sens de l’équilibre (n’est pas Saint-Saëns qui veut). CLIC DE CLASSIQUENEWS de janvier 2021 

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saint saens symphonies cristian macelaru critique cd review classiquenewsCD, événement. SAINT-SAËNS : Intégrale des 5 Symphonies (Cristian Macelaru, National de France, 3 CD Warner classics). Cette intégrale conduite par le bouillonnant et très détaillé Cristian Macelaru (né en 1980 en Roumanie) définit désormais une nouvelle référence pour la répertoire symphonique français : heureux interprète qui a la puissance et le sens du détail, doué aussi d’une énergie intérieure assez fabuleuse. Directeur musical du National de France depuis septembre 2020, Cristian Macelaru se distingue de toute évidence par cette intégrale ainsi constituée en 2020 et 2021, qui scelle l’évidente alchimie entre le chef et l’orchestre parisien au moment où est célébrer le centenaire de la mort de Camille Saint-Saëns (1921 – 2021). CLIC de CLASSIQUENEWS Hiver 2021.

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ACTES SUD : Camille Saint-Saëns, compositeur globe-trotter

 

 

 Approfondir 

LIRE notre dossier biographique thĂ©matisĂ© Dossier Camille SAINT-SAĂ‹NS : centenaire SAINT-SAĂ‹NS 2021 : entre libertĂ© et classicisme, patriotisme et Ă©clectisme…

 

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Dossier rĂ©gulièrement actualisĂ© pendant l’annĂ©e SAINT-SAĂ‹NS 2021.

 

 

 

 

 

OPERA EN LIGNE. Fragments, part I : TEODOR CURRENTZIS JOUE DES EXTRAITS DE LA TRAVIATA DE VERDI

currentzis confinement audio video TRAVIATA fragments critique annonce classiquenews opera critique reviewOPERA EN LIGNE. TEODOR CURRENTZIS JOUE DES EXTRAITS DE LA TRAVIATA DE VERDI. PUDEUR mortuaire et ciselée de Currentzis et de la soprano Nadezhda Pavlova. Pour conjurer les effets asphyxiants du confinement (et la fermeture des maisons d’opéras), le chef Teodor Currentzis et son orchestre MusicAeterna enregistrent plusieurs séquences intitulées « Fragments », à Saint-Petersbourg, dédiées à quelques scènes marquantes de l’opéra ; la première est révélée le 4 déc 20 sur youtube et incarne les derniers instants de La Traviata sur scène… Finesse, pudeur du prélude de l’acte III, aux vibrations arachnéennes qui expriment les attentes d’un cœur éprouvé, celui de la jeune courtisane Violetta Valery. Currentizs joue l’ouverture, puis la dernière scène (« Addio del Passato bei sogni ridenti ») , celle de la femme sacrifiée qui appelle dans son appartement parisien, sa servante « Annina » : malade, aux portes de la nuit, la jeune âme expirante est prête à mourir sur l’autel de la pensée hypocrite bourgeoise. Elle a dû renoncer au seul amour sincère qu’elle connut jamais, celui du jeune Rodolfo qu’elle a quitté à la demande du père de ce dernier, Germont.

 

 

 

NOIR tragique et romantique
La Traviata par Teodor Currentzis et Nadezhda Pavlova

 

 

 

Traviata-currentzis-pavlova-addio-del-passato-critique-opera-review-opera-critique-classiquenewsLa séquence est courte (18mn), filmée en noir et blanc, ralentis, effets d’ombre, serrant de près les instrumentistes et les chanteurs (jamais de face), du chef aux gestes amples, suspendus, dans des ténèbres persistantes et vaporeuses (pas d’issue pour la pêcheresse). Dans une atmosphère d’étuve, presque suffocante, Violetta et sa servante dialoguent comme deux aveugles dans le noir de la solitude et de la souffrance. Currentzis ralentit les tempi ; la prise valorise surtout le chant incarné, tragique « è tardi !… attendo, attendo… » de la soprano aux portes de la mort ; les phrasés sont ciselés, chaque mesure énoncée jusqu’au bout du souffle. La prière « Addio del passato » est comme syncopée (avec hautbois obligé), conçue comme l’ultime respiration d’une mourante (timbre clair et filigrané de la cantatrice Nadezhda Pavlova qui cependant gagnerait à articuler davantage l’italien), rêvant à sa dernière étreinte avec l’être qu’elle aurait jamais aimé vraiment.

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FRAGMENTS / Part I : La Traviata
Teodor Currentzis, MusicAeterna
Avec Nadezhda Pavlova (Violetta Valery, La Traviata) et Julia Saifulmuliukova (Annina)

 

 

 


VOIR la séquence vidéo LA TRAVIATA

/ « Addio del Passato bei sogni ridenti »
par Teodor Currentzis et Nadezhda Pavolova
https://teodorcurrentzis.lnk.to/traviata

 

 

 

 

 

 

CD événement, critique. BEETHOVEN / LISZT : Symphonie n°9 : C Pescia / P. Cassard, pianos (La Dolce Volta)

1602688820_philippe-cassard-cedric-pescia-beethoven-symphony-no_-9-transcribed-for-2-pianos-by-franz-liszt cd review critique cd classiquenews LISZT Beethoven Symphonie n 9 DOLCE VOLTA-2020CD Ă©vĂ©nement, critique. BEETHOVEN / LISZT : Symphonie n°9 : C Pescia / P. Cassard, pianos (La Dolce Volta) – Les pianistes Philippe Cassard et CĂ©dric Pescia s’associent et dĂ©frichent la version (peu jouĂ©e peu connue) de la 9è symphonie de Beethoven, pour 4 mains. En 1850, Franz Liszt (1811-1886) gĂ©nie du clavier avait trouvĂ© partition Ă  la mesure de son imagination transcriptrice. Ou comment 20 doigts peuvent-ils exprimer et nuancer autant que 50 musiciens d’orchestre ? Deux pianos pas moins pour restituer l’ampleur orchestrale, la dĂ©mesure poĂ©tique, l’élan fraternel d’un continuum musical parmi les plus marquants de l’histoire de la musique europĂ©enne et romantique.

La verve et le tempĂ©rament des deux interprètes se combinent en naturel et en prĂ©cision, en dialogue et en complicitĂ©. Les deux compères trouvent chacun leur place, leur chant spĂ©cifique et complĂ©mentaire pour faire parler leur instrument (ineffable effusion de l’Adagio qui s’écoule comme une dĂ©tente sereine). Les 20 doigts articulent, Ă©clairent, murmurent ou rugissent ; le dragon Beethoven se cabre et conquiert des horizons jamais imaginĂ©s avant lui : le temps musical devient esprit de conquĂŞte, dĂ©termination, volontĂ©, puissance ; une force irrĂ©sistible se dresse pour des lendemains qui bouleversent l’ordre du vieux monde. Dans ce chant Ă  2 pianos, c’est toute l’âme volontaire de Beethoven qui se libère et saisit. Et mĂŞme sans les paroles de l’Ode Ă  la joie de Schiller, l’habiletĂ© chantante et CLIC_macaron_2014l’éloquence frĂ©nĂ©tique et tendre du duo offrent un sublime flux pianistique dans les quatre sections du Finale (presto puis 2 allegros : assai, alla Marcia, energico) ; la 9è mĂŞme sans le quatuor vocal soliste et les chĹ“urs, irradie dans son final, de cette flamme bouleversante qui est appel Ă  la fraternitĂ© des peuples pour qu’un monde nouveau enfin paraisse. Magistrale rĂ©alisation. Et offrande pertinente au moment des 250 ans du grand Ludwig en 2020.

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CD Ă©vĂ©nement, critique. BEETHOVEN / LISZT : Symphonie n°9 : Philippe Cassard, CĂ©dric Pescia, pianos (La Dolce Volta – enregistrĂ© en 2020)

 

 

Tracklist

01. Symphony No. 9, Op. 125 I. Allegro ma non troppo, un poco maestoso (Transcribed for 2 pianos by Franz Liszt)

02. Symphony No. 9, Op. 125 II. Molto vivace – Presto (Transcribed for 2 pianos by Franz Liszt)

03. Symphony No. 9, Op. 125 III. Adagio molto e cantabile – Andante moderato – Adagio stesso tempo (Transcribed for 2 pianos by Franz Liszt)

FINALE
04. Symphony No. 9, Op. 125 IV. Finale. Presto (Transcribed for 2 pianos by Franz Liszt)
05. Symphony No. 9, Op. 125 V. Finale. Allegro assai – Presto – Recitativo – Allegro assai (Transcribed for 2 pianos by Franz Liszt)
06. Symphony No. 9, Op. 125 VI. Finale. Allegro assai vivace alla Marcia – Andante maestoso – Adagio ma non troppo ma devoto (Transcribed for 2 pianos by Franz Liszt)
07. Symphony No. 9, Op. 125 VII. Finale. Allegro energico – Allegro ma non tanto – Prestissimo (Transcribed for 2 pianos by Franz Liszt)

 

 

 

 

CD Ă©vĂ©nement. BOISMORTIER : Les voyages de l’Amour, 1736 (Orfeo orchestra, G Vashegyi, sept 2019 – 2 cd Glossa)

BOISMORTIER GLOSSA voyages de l amour vashegyi 2 cd critique review cd classiquenews CLIC de classiquenewsCD Ă©vĂ©nement. BOISMORTIER : Les voyages de l’Amour, 1736 (Orfeo orchestra, G Vashegyi, sept 2019 – 2 cd Glossa) – CLIC dĂ©couverte / hiver 2020. En 1736, 3 ans après le choc du scandaleux Hippolyte et Aricie de Rameau, Boismortier aborde Ă  son tour l’opĂ©ra ballet dans le sillon de Campra, Leclair, Rebel et… Rameau Ă©videmment dont Les Indes galantes marquent le contexte de crĂ©ation des Voyages de l’amour. Mais ce premier coup d’essai dans ce genre pathĂ©tique et tendre, pastoral et langoureux est un coup de maĂ®tre. Le compositeur bĂ©nĂ©ficie d’un livret solide, produit d’un jeune « prodige » (de 20 ans) : La Bruère.

En outre, la valeur de ce Boismortier lui inspire des personnages qui touchent par leur profondeur : ici l’Amour désemparé malgré sa puissance, aimerait que l’on aime pour ce qu’il est et non pour sa nature divine. C’est tout l’enjeu de ses 3 séquences, au village, à la ville, à la cour. Contre le mensonge et la déloyauté, les faux semblants et les serments inconstants, Boismortier caractérise un Cupidon ivre de vérité : qui éprouve les sentiments de Daphné par le truchement de son travestissement en Sylvandre : Amour parviendra-t-il a touché le cœur de son aimée pour ce qu’il est ? C’est tout le défi du dernier tableau : « le retour » (Acte IV).

La musique affirme une claire ambition orchestrale Ă©gale au gĂ©nie ramĂ©lien, offrant de superbes caractĂ©risations que sert ici une assez bonne distribution, surtout fĂ©minine car il ne faut pas rater le trio de tĂŞte : Amour, ZĂ©phire, DaphnĂ© ; comme les seconds rĂ´les dont surtout ceux de BĂ©roĂ© (version 2 de l’Acte II), Julie (magnifiquement incarnĂ©es par l’excellente ElĂ©onore Pancrazi qui nous gratifie d’un chant souverain d’une fluiditĂ© enivrante, au texte mordant et impeccablement projetĂ© : un modèle du genre). AssurĂ©ment au jeu des cartes (qui s’affiche en couverture) c’est Ă©videment « La Pancrazi » dont le nom ne figure mĂŞme pas, qui reste le joker de la rĂ©alisation. On ne peut en dire de mĂŞme de ses consĹ“urs qui certes ont le caractère de chaque personnage mais diluent le texte et restent continument inintelligibles. Chantal Santon (Cupidon ou l’Amour languissant, insatisfait) ; Katherine Watson (ZĂ©phire, suivant de l’Amour) Judith van Wanroij (DaphnĂ©, rĂ©sistant Ă  Apollon jusqu’à l’acte IV…) – un comble pour une restitution qui se veut Ă  la pointe du chant baroque français. C’est d’un coup le relief du texte qui est perdu.

C’est là la seule réserve d’une lecture où brille la ductilité chorégraphique, la soie flexible de l’Orfeo Orchestra qui sous la direction de l’enchanteur Vasgeyi captive du début à la fin. L’articulation, la subtilité, l’expressivité sans aigreur ni tension, sont depuis ses premiers pas dans le Baroque français, sa marque de fabrique. Le chef hongrois maîtrise le sens de la grandeur (Boismortier semble développer l’opéra ballet dans un style héroïque et tragique propre à la tragédie en musique).
Les liens avec Rameau sont d’autant plus manifestes quand on sait les détails de la genèse et de la création des Voyages de l’Amour : ce sont deux interprètes familiers de Rameau qui créent les personnages principaux imaginés par Boismortier : l’excellent Pierre Jélyotte (haute-contre en Amour), Antoine Cuvillier (taille en Zéphyre ; Adario dans les Indes Galantes). Dommage que ces deux tessitures n’ont guère été maintenues pour cette lecture qui se veut réhabiliter l’œuvre. On aurait goûter ces nuances particulières qui font passer des suavités d’un Watteau à la sincérité d’un Fragonard.

CLIC_macaron_2014Le compositeur ainsi révélé maîtrise une écriture et une orchestration proche de Rameau dont il n’a certes pas les vertiges dramatiques, mais partage dans la veine amoureuse, une nostalgie et une poésie, égales. Le Purcell Choir a la respiration juste, une élégance naturelle toujours aussi superlative. Ce nouvel apport réalisé par György Vashegyi mérite donc des louanges et le CLIC découverte de classiquenews.

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CD Ă©vĂ©nement. BOISMORTIER : Les voyages de l’Amour, 1736 (Orfeo orchestra, G Vashegyi, sept 2019 – 2 cd Glossa) – CLIC dĂ©couverte / hiver 2020.

CD événement, critique. RAMEAU : Les Boréades (Luks, 3 cd Château de Versailles, janv 2020)

RAMEAU-cd-boreades-vaklav-luks-cd-critique-classiquenewsCD, critique. Rameau : Les Boréades (Cachet, Weynants, Kristjánsson… Luks, 3 cd Château de Versailles, janv 2020). Pour célébrer la fin de la guerre de Sept ans en 1763, victoire de Louis XV, Rameau, compositeur officiel compose son dernier ouvrage Les Boréades, sans pouvoir accompagner jusqu’à sa création, ce chef d’oeuvre du XVIIIè, car il meurt en répétitions (sept 1764). Jamais l’ouvrage ne sera créé sur la scène de l’Académie royale. Les dernières recherches ont montré que l’opéra était achevé en réalité dès juin 1763 devant être créé à Choisy. Le livret de Cahusac trop subversif (osant même montrer l’arbitraire cruel d’un souverain : torture et nouveau supplice d’Alphise par Borée le dieu des vents nordiques) ; héritier des Lumières, Rameau octogénaire dénonce alors la torture. Audacieuse et visionnaire intelligence propre aux philosophes français.
La redoutable difficulté des récits accompagnés, la tenue de l’orchestre où brillent les timbres instrumentaux d’une manière inédite (cors et clarinettes dès le début), exprimant cet imaginaire sans équivalent d’un Rameau, génial orchestrateur. Le Praguois Václav Luks et son Collegium 1704 aborde la partition avec un appétit rafraîchissant, une vivacité régulière qui cependant manque de la séduction élégantissime d’un Christie (Opéra de Paris, 2003) ou d’un McGegan. Or ici règne à travers les multiples suite de danses qui composent les ballets omniprésents d’acte en acte, la pure inventivité orchestrale (le V et son ballet du supplice est particulièrement expressif ) ; Rameau atteignant même un absolu poétique jamais écouté auparavant. Pour autant les interprètes ne manquent pas de qualités. Nervosité, éloquence, onirisme : Luks exploite et guide les facultés de son orchestre. Le début exulte de rebonds sylvestres grâce à l’accord magicien des instruments où percent et rayonnent la caresse amoureuse des cors, l’aubade enchantée des clarinettes : emblème de cette inclination d’Alphise pour Abaris, malgré la déclaration des princes Boréades. Tout est dit et magnifiquement maîtrisé dans cette ouverture au charme pastoral persistant. Rameau immense orchestrateur et poète lyrique se révèle dans toutes ses nuances. Le héros isolé confronté à un destin qui le dépasse et l’éprouve, c’est Alphise « forcée » et inquiété par les Boréades ; c’est déjà au I, le souffle fantastique de l’ariette de Sémire « un horizon serein » où la suivante d’Alphise souligne la fragilité du sort quand orage et tempête éprouvent la sincérité des cœurs justes. Opéra des saisons, Les Boréades est un chef d’oeuvre français qui fait rugir les timbres de l’orchestre dans une pensée poétique et universelle inédite. Vaklav Luks dont le geste exploite les tempéraments des chanteurs solistes, frappe un grand coup : maîtrise des nuances, direction claire, raffinée, particulièrement souple comme expressive (vitalité fluide des danses et des divertissements) ; l’orchestre de Rameau respire, s’enivre, exulte…

De toute Ă©vidence, ce sont les chanteuses qui forment l’argument principal de la distribution : heureux choix de Deborah Cachet en Alphise, la princesse sujet de tractations Ă  rebondissements et donc d’une scène de torture inoubliable par sa cruautĂ© barbare (acte V, scène II) – quel contraste Ă©loquent et mĂ©morable avec le final amoureux et tendre du IV ; de mĂŞme la SĂ©mire (sa suivante) de Caroline Weynants touche par son angĂ©lisme naturel, par la clartĂ© d’un chant sincère sans artifices. L’orchestre a le nerf solide, l’articulation honnĂŞte, mais pĂŞche par une absence de respirations justes, d’accents architecturĂ©s qui ont fait l’expressivitĂ© ardente de Christie (en particulier dans les effets spatialisĂ©s avec choeur, et dans ce laboratoire des timbres aux harmonies imprĂ©visibles au dĂ©but du V pour caractĂ©riser le dĂ©monisme de BorĂ©e et de ses deux fils haineux, BorilĂ©e et Calisis).

Néanmoins les suites du II (Loure et gavottes), du III (menuets et gavottes), du IV surtout (Rigaudons), préparent à la souplesse savoureuse du final du V (ultimes contredanses), où triomphe la lumière (et la victoire d’Abaris qui sauve son aimée Alphise). L’intégrale captée à Versailles (Opéra royal) séduit par la franchise du geste collectif qui laisse se déployer les somptueux tableaux climatiques d’un opéra décidément inclassable où la fureur sauvage des vents doit souffler et rugir avec intensité, panache, dans le sens du spectaculaire et de l’élégance. Equation à demi réalisée ici. Pour autant, l’engagement des instrumentistes sous la direction vive du chef Václav Luks, fait mouche (tempête, orage et tremblements de terre du III).

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CLIC D'OR macaron 200CD, critique. Rameau : Les BorĂ©ades (Cachet, Weynants, Kristjánsson… Luks, 3 cd Château de Versailles, janv 2020) – CLIC dĂ©couverte de CLASSIQUENEWS hiver 2020. Lire aussi notre annonce du coffret Les BorĂ©ades par Vaclav Luks : http://www.classiquenews.com/cd-evenement-annonce-rameau-les-boreades-vaclav-luks-3-cd-cvs/

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VIDEO : Les Boréades par Václav Luks
(Utrecht Early Music Festival aoĂ»t 2018) – intĂ©grale en version de concert

https://www.youtube.com/watch?v=eTwohoV0w2g

 

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Québec. CLASSICA lance la première intégrale discographique des mélodies de Massenet

Massenet jules cherubin Jules_Massenet_portraitCD intégrale événement : 1ère mondiale des mélodies de Massenet par le Festival CLASSICA et Marc Boucher, son fondateur et directeur artistique. Portée par le festival CLASSICA au Québec, l’intégrale des mélodies de Jules Massenet a réuni à partir de la rentrée 2020, les plus belles voix québécoises, naturellement calibrées pour la mélodie française. Le cycle s’annonce comme l’une des contributions majeures au genre de la mélodie française. Proposant depuis 3 années, le Récital Concours international de Mélodies Françaises à chaque édition de son festival de printemps, CLASSICA avait toute légitimité pour porter cette intégrale événement, « le plus important projet lyrique jamais réalisé au Canada ». Le vaste chantier discographique qui se profile prolonge ainsi le dessein du Récital-Concours conçu par CLASSICA pour faire rayonner l’art si spécifique de la mélodie française. Le projet a pu être amorcé malgré les mesures sanitaires imposé par la pandémie de la covid 19.

UNE INTÉGRALE EN 319 MÉLODIES… Jules Massenet (1842-1912) a marqué la scène lyrique française d’Esclarmonde à Werther, de Thaïs à Cléopâtre… Sa facilité dramatique, ses dons mélodiques ont aussi favorisé une œuvre de mélodistes chevronné, produisant quelques … 319 mélodies. L’intégrale MASSENET comprendra au total 12 coffrets de 3 cd chacun, proposant solos, duos, trios et quatuors, « près d’une vingtaine d’œuvres inédites, dont la plupart dans les tonalités originales, des « premières » telles les Expressions lyriques et l’ensemble des mélodies pour contralto dédiées à Lucy Arbell, dernière égérie du compositeur. » Décédée en 1947, la mezzo soprano Lucy Arbell incarne l’âge d’or des divas au début du XXè : celle qui chante Dalila de Saint-Saëns, Maddalena (Rigoletto de Verdi) ou Amnéris (Aida du même Verdi), tout en marquant le rôle de Charlotte (Werther), crée les ultimes grands rôles des opéras de Massenet : Perséphone (Ariane, 1906), Thérèse (1907), Dulcinée (Don Quichotte, 1910, aux côtés de Chaliapine)…
D’ailleurs toute l’oeuvre lyrique de Jules Massenet est marquée par les divas françaises qui lui ont inspiré les figures de grandes amoureuses, tragiques, mystiques, extatiques. Esclarmonde, Thaïs, Hérodiades, Thérèse, Cléopâtre… le catalogue opératique de Massenet fourmille d’héroïnes attachantes au destin oppressé.

classica-festival-canada-logo-vignette-classiquenews-annonce-concerts-festivals-operaLe baryton Marc Boucher, directeur artistique et fondateur du festival CLASSICA, assure la direction artistique de l’intégrale, tout en étant lui-même interprète de l’intégrale Massenet aux cotés des grandes voix québecoises tels Marie-Nicole Lemieux, Karina Gauvin, Michèle Losier, Julie Boulianne, Magali Simard-Galdès, Anna-Sophie Neher, Florence Bourget, Frédéric Antoun, Étienne Dupuis, Philippe Sly, Antonio Figueroa et Joé Lampron-Dandonneau. La partie instrumentale est assurée par le pianiste Olivier Godin, avec le complicité du violoncelliste Stéphane Tétreault, du violoniste Antoine Bareil, du guitariste David Jacques et de la harpiste Valérie Milot.
« C’est un rêve qui prend forme. Le budget global de ce projet avoisinera les 275 000 $. Nous y travaillons depuis déjà trois ans. En l’espèce, la pandémie constitue une opportunité dans la mesure où tous ces artistes, habituellement en tournée à travers le monde, seront au Québec pour les premiers enregistrements, d’une durée de 18 jours, qui auront lieu à l’automne 2020. Plus du tiers des mélodies seront enregistrées et la parution du premier coffret est prévue au printemps 2021 », a souligné Marc Boucher.

Marc Boucher retrouve ainsi Olivier Godin dont la complicité est à l’origine des précédentes intégrales des mélodies de Poulenc (2013), de Fauré (voix et piano, 2018), deux cycles majeurs édités par Atma Classique.

UN ERARD HISTORIQUE. L’intégrale Massenet bénéficie du piano ERARD de concert 1854, accordé au diapason 435 Hz, c’est à dire le diapason de l’époque du compositeur, « conformément à l’arrêté ministériel de Paris de 1859. L’esthétique, la mécanique et la sonorité de cet instrument d’exception apporteront une grande valeur à cet album ». L’instrument historique a été acquis en 2018 à Paris, « chez Pianos Nebout & Hamm. Son directeur Jacques Nebout l’a entièrement remis en état, conservant, les pièces d’époque datant de 1854, comme sa table d’harmonie, son clavier en ivoire et ses marteaux d’origine. Les cordes et les feutres ont été remplacés par des matériaux qui reproduisent la large palette des sonorités de l’époque », précise Marc Boucher. Ce même instrument est utilisé depuis l’année dernière lors du Récital Concours international de mélodies françaises, un élément important voire primordial dans la réalisation du concours québécois, qui le classe parmi les compétitions les plus exigeantes et légitimes du genre de la mélodie française. Premier volume à paraître donc, au printemps 2021. A suivre.

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Québec : Festival CLASSICA 2019, jusqu'au 16 juin 2019Fondé en 2011, LE FESTIVAL CLASSICA s’est donné pour mission de promouvoir un espace public qui provoque la rencontre entre la musique classique au sens large, les artistes, la relève musicale et le grand public, tout en privilégiant l’embauche prépondérante d’artistes québécois et canadiens. Le Festival Classica propose, du 11 au 20 décembre 2020, une édition spéciale, « en rappel » au cours de laquelle une quinzaine de concerts de l’édition 2020 sous le thème De Beethoven à Bowie, qui n’a pu avoir lieu en raison de la pandémie, seront présentés. Ces concerts constitueront sous réserve du contexte sanitaire, la première génération de contenus dédiés de la plateforme numérique immersive leconcertbleu.com destinée au milieu de la musique classique du Québec. VOIR notre REPORTAGE VIDEO Festival CLASSICA 2019 : immersion dans le classique accessible et fédérateur

NAPOLÉON 1er et l’OPÉRA (1804 – 1814)

SPONTINI_buste_190NAPOLÉON 1er et l’OPÉRA. 2021 marque le bicentenaire de la mort de l’Empereur Napoléon 1er (5 mai 1821 à saint-Hélène). Sacré Empereur en décembre 1804, l’ex Premier Consul à vie (août 1802) réorganise en profondeur la société française qu’il adapte au format nouveau du rêve impérial. La vie des théâtres et surtout l’opéra sont remodelés. Quel est le goût de Napoléon en matière de musique et de théâtre lyrique ?
Le divertissement le plus spectaculaire alors est restructurĂ© et acclimatĂ© au goĂ»t de l’Empereur. PaĂ«r, Paisiello, Lesueur et Spontini (portrait ci contre) façonnent ainsi le style napolĂ©onien qui demeure très italophile. Les campagnes italiennes du GĂ©nĂ©ral Bonaparte n’y sont pas Ă©trangères. La chanteuse Giuseppina Grassini fut la maĂ®tresse de l’Empereur… A la Cour, dans les théâtres parisiens, l’opĂ©ra romantique et nĂ©oclassique se prĂ©cise, dans la vĂ©nĂ©ration du nouvel hĂ©ros Ossian (Lesueur, 1804), alors que sont créés dans la capitale les opĂ©ras de Mozart (Don Juan, 1805). Les figures de l’opĂ©ra napolĂ©onien paraissent : de Trajan Ă  la Vestale, d’Adam Ă  Fernand Cortez ; MĂ©hul, Kreutzer se distinguent quand Ă  la fin du règne, Cherubini (qui avait composĂ© MĂ©dĂ©e dès 1797) indique en 1813, de nouveaux accents avec Les AbencĂ©rages (empruntĂ©s Ă  Chateaubriand). A travers le choix des tableaux et situations dramatiques abordĂ©s, la scène lyrique ambitionne d’égaler l’impact visuel et expressif de la peinture d’histoire alors sublimĂ©e par les artistes officiels de l’Empire Girodet et Jacques-Louis David (portraitiste de l’Empereur). Dossier spĂ©cial, nouveau feuilleton Ă  lire… chaque lundi ici, Ă  partir du 9 novembre 2020.

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Le gĂ©nĂ©ral Bonaparte devenu Premier Consul – portrait de Gros (DR)

 

 

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L’Empereur NapolĂ©on Ier Ă  partir de 1804 (Portrait officiel de David Ă  partir de 1804, DR)

 

 

 

RESTRUCTURATION PARISIENNE
Napoléon Ier réorganise les lieux du divertissement parisien. Comme Louis XIV qui a fait du spectacle un formidable organe de propagande et une sacralisation spectaculaire du pouvoir, l’Empereur , deux ans après son sacre, réduit les sites et leur affecte un répertoire particulier (Règlement pour les théâtres de 1806). Paris compte désormais 4 « grands théâtres » : Opéra, Théâtre-Français, Opéra-Comique, Théâtre de l’Impératrice ; puis 5 de second plan mais d’une grande richesse de genres : le Vaudeville pour les pièces du même nom; les Variétés pour le grivois et le poissard ; La Porte Saint-Martin pour le mélodrame, remplacé en 1807 par l’Ambigu-Théâtre ; la Gaieté / Gaîté pour pantomimes, pantalonnades et farces, sans ballets ni musique. En organisant par genre et de façon hiérarchique les théâtres, il s’agit de les contrôler.

Le Théâtre de l’Impératrice présente surtout l’opéra buffa. La crème de la crème c’est à dire l’opera seria est réservé aux spectacles de cour, dans un théâtre dédié aux Tuileries ou à Saint-Cloud.
Le genre noble est présenté ordinairement à l’Opéra, alors sis rue Richelieu dans le théâtre créé pour la troupe Montansier en 1794, ainsi actif jusqu’en 1820. Napoléon en confie l’administration au comte de Rémusat, surintendant des spectacles à partir de 1807 quand le lieu devient sur le modèle de Louis XIV, l’Académie impériale de musique. C’est la chasse gardée du pouvoir officiel qui y souhaite cultiver la représentation de sa gloire selon le modèle politico culturel fixé par Louis XIV-Lully. Les ballets de Gardel et Vestris s’y déploient. Les moyens sont illimités : l’Opéra impérial récupère 1/20è des recettes des spectacles et bals de la capitale, dès 1811.
Sont créés ainsi sur la scène de l’Opéra Richelieu, les grands ouvrages qui sont les marqueurs du goût napoléonien : ossianesque (fable nordique et scandinave), biblique, surtout néoantique auquel se joignent la découverte des opéras de Mozart, la reprise d’ouvrage baroques et classiques (Rameau, Piccinni). Les grands compositeurs du règne sont Le Sueur, Spontini, Kreutzer (qui est aussi musicien de la chapelle privée de l’Empereur), Méhul, Chérubini, Catel (dont l’orientalisme séduit avec Sémiramis et Les Bayadères)…

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Créations à l’Opéra / Académie impériale de musique

1804 : Ossian ou les bardes (Dercy / LE SUEUR)
1805 : Don Juan (Da Ponte / MOZART, arrangement Kalkbrenner)

1806 : Nephtali ou les Amonites (AIgnan / BLANGINI)
1806 : Castor et Pollux (Rameau : arrangement de Chédeville / Von Winter)

1807 : Le Triomphe de Trajan (EsmĂ©nard / LE SUEUR) – cĂ©lĂ©bration de la victoire d’IĂ©na.
1807 : La Vestale (de Houy / SPONTINI)

1808 : Aristippe (Giraud / KREUTZER)

1809 : La Mort d’Adam et son apothéose (Guillard / LE SUEUR)
1809 : Fernand Cortez (de Jouy / SPONTINI)

1810 : Hippomène et Atalante (Lehoc / PICCINI)
1810 : Abel (Hoffmann / KREUTZER)
1810 : Les Bayadères (de Jouy / CATEL)

1811 : Sophocle (Morel / FIOCCHI)
1811 : Les Amazones ou la fondation de Thèbes (de Jouy / MÉHUL)

1812 : Oenone (Le Bailly / Kalkbrenner)
1812 : Jérusalem délivrée (Baout-Lormian / de PERSUIS)

1813 : Le Laboureur chinois (Morel, Mozart réarrangé : Cosi fan tutte…)
1813 : Les Abencérages d’après Chateaubriand (Jouy / CHERUBINI)
1813 : Médée et Jason (de Milcent / DE FONTENELLE)

1814 : L’oriflamme (pastiche, divers compositeurs)
1814 : Alcibiade (Cuvelier / PICCINNI)

 

 

 

Tout livret et partition sont soumis à la censure officielle : le comité de lecture dont les membres sont nommés directement ou indirectement par l’Empereur. Au total de 1800 à 1815, seuls 3% des 3000 créations tout genre confondu sont retoquées, obligées à une refonte corrective. Exit les références à l’ancien régime monarchique (dans la suite d’Henri IV) sauf citation de Charlemagne ; exit aussi les références religieuses (cloches et signes sacerdotaux sont proscrits). Effets des défaites militaires, des signes d’un relâchement de la censure se réalisent en 1813 (L’intrigante d’Etienne est présentée au Théâtre-Français alors que l’ouvrage développe une satire féroce de la Cour impériale). Les livrets de Jouy, Morel de Chedeville, du républicain Baour-Lormian citent l’Antiquité pur insister sur la filiation entre Napoléon et les dieux et les héros de la mythologie grecque.

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UNE AFFECTION POUR LES ITALIENS… Dans les faits, l’Empereur se montre à l’Opéra-Comique et au Théâtre-Italien ; il s’enthousiasme pour les ouvrages légers, ainsi dès 1801, L’Irato ou l’Emporté de Méhul (Opéra Comique) drame en un acte qui est dédié à l’Empereur lequel attribue la légion d’Honneur au compositeur qui reçoit nombre de commandes officielles. De même Napoléon nomme l’italien Fernando Paër directeur de l’Opéra-Comique en 1810.
Le goût de Napoléon en dehors d’une théâtralisation politique du spectacle et des références compréhensibles à l’Antiquité grecque, privilégie les Italiens, le goût du chant, de la virtuosité mélodique ; pour autant les harmonies savantes des allemands sont présentes dans ce paysage musical impérial : la redécouverte des opéras de Mozart se réalise sous le règne de Napoléon.

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L’OPÉRA, MIROIR DU POUVOIR OFFICIEL… Napoléon Ier ne paraît à l’Opéra que… 3 fois. L’arrivée du souverain en plein spectacle est scrupuleusmeent scénographiée donc spectaculaire comme en témoigne sa « participation » lors du Triomphe de Trajan en 1810 (reprise) où Napoléon marche sur la musique de son propre sacre (Le Sueur) quand le héros de l’opéra défile victorieux vers le Capitole. SI Louis XIV dansait, Napoléon surreprésente sa propre grandeur en s’identifiant au héros vainqueur de l’Opéra.

Du reste, chaque choix artistique souligne les enjeux politiques et renforce toujours la solidité du pouvoir impérial : le ballet pantomime Persée et Andromède (1810) souligne la puissance invincible de l’Empereur au moment de son mariage avec Marie-Louise ; Le laboureur chinois (1813) fait écho à la crise agricole du pays ; L’Oriflamme de 1814 est l’étendard qui rassemble les opposants aux sarrasins quand les Alliés s’approchent de Paris…

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  QUELQUES OUVRAGES MAJEURS

Des brumes celtiques à l’orientalisme grandiose…

 

 

 

OSSIAN, une figure celtique nordique à l’Opéra. Le Sueur met en musique un sujet adulé par l’Empereur qui s’est toujours passionné pour le grand opéra français et le cas des légendes scandinaves. Ossian est en réalité une invention littéraire « commise » par le poète James Macpherson qui publie ainsi entre 1760 et 1763 le cycle des poèmes gaéliques d’Ossian, (petit faon en irlandais), poète barde écossais du IIIè, lui même fils de Fingal et Sadhbh… Qu’il s’agisse de vrais poèmes antiques et celtes, ou d’une supercherie sublime, Ossian suscite un immense succès en Europe, en particulier auprès du général Bonaparte, acteur majeur de cette celtomanie… En invoquant les figures de guerriers admirables, le texte ossianesque fournit une galerie de nouveaux héros auxquels s’identifient les soldats impériaux.
Dès 1795, Palat Dercy adapte le texte de Macpherson, un texte fétiche pour Bonaparte. Finalement Le Sueur nommé en 1804, directeur de la chapelle des Tuileries, reprend l’ouvrage avec un nouveau librettiste (Deschamps) et Ossian, tragédie en 5 actes, est créé en juillet, portant comme un emblème, l’idéal musical de l’Empire décrété en mai. Un statut iconique que lui dérobera La Vestale de Spontini en 1807. Ossian, barde écossais aime Rosmala et s’oppose aux scandinaves qui adorent Odin,… l’ouvrage incarne une passion française, napoléonienne pour les bardes celtiques qui célèbrent les héros morts. Le songe d’Ossian qui rêve de sa propre apothéose parmi les guerriers défaits (acte IV) est le tableau le plus spectaculaire d’une action héroïque et virile (traité en peinture par Ingres, à la demande de Napoléon, vraie alternative au néoclassicisme mythologique) et sur le plan technique, accomplissement ultime de ce que pouvait réaliser la scène lyrique. Le Sueur imagine même une « symphonie fantastique » (avant Berlioz qui fut son élève) pour exprimer l’onirisme du héros parvenu au Temple du Tonnerre. Une même élévation, reposant sur des prodiges techniques et de machineries conclura La mort d’Adam (Le Sueur, 1809). L’ambition des décors, les effets de machinerie, la caractérisation instrumentale des Ecossais, des Scandinaves, les harmonies particulières affiliées au Rêve d’Ossian… préparent l’émergence du grand opéra français de Meyerbeer.

En 1806 (Opéra-Comique), Uthal de Méhul adapte un autre épisode de la légende ossianesque : L’époux de Malvina, Uthal a destitué le père de cette dernière, le roi Larmor. Mais grâce aux guerriers de Fingal, Larmor reprend le dessus et vainc Uthal. Berlioz applaudit aux innovations de Méhul en particulier son orchestration qui écarte les violons, préférant le timbre « terne et mélancolique » des seuls altos (l’effet de brume nordique ?). Chaque hymne des bardes est caractérisé instrumentalement (cor, basson, harpe) afin de créer ce réalisme historique propre à l’épopée ossianesque.

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SPONTINI arrivĂ© en France en 1803, – favorisĂ© par JosĂ©phine, compose son chef d’oeuvre La Vestale qui en traitant un Ă©pisode antique avec un rĂ©alisme dĂ©sormais historique, rompt avec le fantastique magique de la TragĂ©die lyrique. La Vestale Julia sacrifie son vĹ“u de chastetĂ© par amour pour le gĂ©nĂ©ral Licinius : elle est condamnĂ©e Ă  mort. Le librettiste De Jouy en fixant le lieu du drame Ă  Rome en 269, s’inspire directement des Monumenti veteri inediti du nĂ©oantique Winckelmann. Spontini cultive l’évocation spectaculaire de la Rome antique, avec force chĹ“urs, scènes collectives, et multiples simultanĂ©es (entre l’action principale et les marches en coulisse)… la difficultĂ© Ă  scĂ©nographier les effets de masse, d’actions croisĂ©es, la succession des tableaux qui tentent Ă  fusionner airs, chĹ“urs, en un drame puissant et unifiĂ© dĂ©voilent le gĂ©nie de Spontini dont l’intuition dramaturgique conçoit l’opĂ©ra comme le cinĂ©ma: La vestale est l’opĂ©ra dont a Ă©tĂ© conservĂ© le premier livret de mise en scène. Dans la foulĂ©e du triomphe de La Vestale, NapolĂ©on plus qu’enthousiaste, commande Fernando Cortez dont le sujet (le Mexique conquis par les Espagnols) sert sa campagne contre l’Espagne. Son final de pacification suscite alors un immense succès qui permet Ă  Spontini de rejoindre Berlin comme Generalmusikdirektor.

Fernando Cortez (présenté en 1809) sera profondément modifié dans sa dernière version de 1817, après la chute de l’Empire et dans un contexte politique différent. De Jouy entend réaliser un grand opéra spectaculaire et historique mais en utilisant le vieux poncif lyrique hérité du Consulat, le finale « à sauvetage » : in extremis, les troupes de Cortez, héros positif, sauve Amazily, condamnée à la torture et à la mort par les prêtres mexicains sanguinaires et barbares… En 1817, l’action s’achève différemment sur la paix signée entre Montezuma et Cortez.

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CATEL ou l’orientalisme impĂ©rial… Avec Les Bayadères de Catel, prĂ©sentĂ© Ă  lâ€OpĂ©ra en 1810, l’institution vit l’un de ses plus grands succès. Son orientalisme Ă  la fois spectaculaire et tendre, marque les esprits, d’autant que la musique demeure dramatiquement très efficace.
La partition éclaire cet orientalisme où l’Orient rêvé et ses bayadères sensuelles voire érotiques, convoquent une Inde fantaisiste – qui proche de l’ouvrage contemporain de Weber (Abu Hassan, 1811), renouvelle en une filiation néomozartienne, la trame sentimentale du cadre théâtral : s’il est question d’orientalisme, la question est plutôt d’émouvoir et de s’alanguir… dans l’esprit des comédies et opéras ballets galants de Campra, Boismortier, Rameau. La danseuse inaccessible, Laméa (créée par la fameuse soprano Caroline Branchu), protagoniste et rôle impressionnant, offre peu à peu un portrait de femme amoureuse admirable, inspirée par des qualités morales au début insoupçonnables (une préfiguration de la sublime Norma à venir grâce à Bellini dans les années 1830). L’opéra reproduit allusivement la fonction de la tragédie lyrique du XVIIIè : le héros Démaly, objet de l’amour victorieux de Lamea, par sa présence lumineuse et les vertus morales qui le font triompher, incarne symboliquement la figure du guide à aimer : Napoléon lui-même. Outre la marche du III (claire assimilation des pauses introspectives de La Flûte mozartienne), on reconnaît le raffinement général d’une partition qui sait être dramatique.

LIRE notre compte rendu critique des Bayadères par Didier Talpain (2012) : http://www.classiquenews.com/cd-catel-les-bayaderes-1810-talpain-2012/

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LE SACRÉ. L’époque est celle où Paris reçoit le choc de l’oratorio de Haydn, La Création (Die Schöpfung / Opéra, le 24 décembre 1800). La décennie absorbe l’impact esthétique des Viennois (Mozart autant que Haydn). L’oratorio romantique viennois de Haydn inspire ainsi deux ouvrages majeurs typiquement français : La mort d’Adam et son apothéose de Le Sueur (Opéra, 1809) puis La mort d’Abel de Kreutzer (Opéra, 1810). A travers l’élévation finale d’Adam (apothéose céleste finale), Le Sueur dédié à la célébration impériale, exprime la divinisation du héros Napoléon identifié comme le libérateur et le Messie. Abel offre un autre visage expressif apprécié alors, l’effroi d’un crime barbare : le meurtre de son frère Caïn dont l’accomplissement sur scène, dans sa violence physique, renvoie aux épisodes meurtriers des champs de batailles et de guerres qui marquent l’Empire.

Joseph de Méhul (Opéra-Comique, 1807) cristallise l’engouement pour l’Egypte après la campagne égyptienne de Bonaparte en 1798-1799. Le choix d’un argument biblique contredit alors l’anticléricalisme révolutionnaire. L’austérité assumée de la partition (sans voix féminines) dont chœurs et airs ressemblent à des hymnes, affirme un style proche de l’oratorio : épuré, sobre, mesuré. Une claire alternative à La Création de Haydn ?

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à suivre….

 

 

 

 

 

 

 

 

 

CD Ă©vĂ©nement critique. ARVO PĂ„RT : STABAT MATER (1 cd GDC – Gloriae Dei Cantores, OrlĂ©ans 2018-2019)

ARVO-PART-Stabat-Mater-cd-naxos-review-critique-classiquenews gloriae dei cantores-opera-cd-review-cd-critiques-classiquenewsCD Ă©vĂ©nement critique. ARVO PĂ„RT : STABAT MATER (1 cd GDC – Gloriae Dei Cantores, OrlĂ©ans 2018-2019). Le Choeur Gloriæ Dei Cantores aborde plusieurs partitions chorales du compositeur estonien Arvo Pärt (nĂ© en 1935). Le cycle des 6 pièces compose une sorte d’anthologie des partitions sacrĂ©es parmi les plus touchantes et accessibles de Pärt. ChantĂ©es par le chĹ“ur amĂ©ricain (basĂ© Ă  OrlĂ©ans, Massachussets) Gloriæ Dei Cantores, les Ĺ“uvres gagnent une sincĂ©ritĂ© immĂ©diate, incarnĂ©es par un collectif qui en exprime Ă©lans, aspirations, sens des textes, passionnants contrastes, voire vertiges spirituels.

En ouverture, Peace upon You, Jerusalem est un chant de grâce pour Jerusalem, entonné avec nuance par le choeur de femmes. On y perçoit nettement cette ferveur rayonnante de Pärt, tissée de larmes et de joie, de compassion surtout.

La rĂ©sonance grave et doloriste de L’AbbĂ© Agathon (2004 – 2008, 15 mn) s’appuie dès son ouverture sur les cordes puissantes, sĂ©pulcrales ; la sĂ©quence Ă©voque la vie et les Ă©preuves endurĂ©es par l’AbbĂ© Agathon, ermite du IVè, sur un rythme de marche oĂą dialoguent le chĹ“ur de femmes et la voix de baryton (texte en français) ; le cheminement, dessinant un parcours spirituel, atteint un niveau mĂ©taphorique supĂ©rieur, tout en agissant de façon dramatique Ă  la façon d’un mini oratorio. La soprano qui sort du chĹ“ur, incarnant le lĂ©preux (l’ange dĂ©guisĂ©) perce le tissu sonore comme une apparition / rĂ©vĂ©lation, – l’agent du drame et de la rĂ©vĂ©lation finale ; il exprime le caractère miraculeux de l’épisode, soulignant ainsi son dĂ©nouement le plus expressif… le choeur de femmes Ă©voque chaque Ă©pisode majeur dans la vie du vieillard ainsi Ă©prouvĂ© : Agathon croise le chemin du lĂ©preux, le porte Ă  la ville, lui achète un gâteau, et autant d’objets qu’il souhaite, puis le reconduit oĂą ils s’étaient rencontrĂ©s. Musique de dĂ©nuement aussi et d’une grande force poĂ©tique proportionnellement allusive Ă  mesure que l’écriture se dĂ©cante (staccato des cordes, pas de vents ni de bois…) ; l’espoir se rĂ©alise dans la rencontre avec l’autre, dans ce que nous lui donnons, dans ce qu’il nous permet de connaĂ®tre dans cet Ă©change sincère. Agathon s’est enrichi en se dĂ©pouillant pour le lĂ©preux. La partition est pensĂ©e comme une miniature essentielle, d’une Ă©conomie formelle particulièrement efficace.

Le Salve Regina (plus de 11 mn) est pour le choeur mixte, recueilli, inscrit très haut dans les sphères (comme l’indique le chant continu de l’orgue en second plan). Le ton de la ferveur qui s’y déploie, est celui d’une sérénité confiante, assumée. La pièce a été écrite pour la Cathédrale d’Essen (1500 ans de la fondation de l’Abbaye d’Essen, 2002) et suit un parcours harmonique d’une rare subtilité entonné par les quatre parties du chœur qui semblent dialoguer entre elles, marquant là aussi les étapes d’un parcours spirituel où l’expérience collective en partage est le don le plus manifeste.

Magnificat (1989) : le chœur recueille l’émotion qui submerge Marie à l’Annonce de sa future maternité ; elle est l’élue de Dieu, la plus admirable entre toutes les femmes. Les voix a cappella sont aux côtés de la Vierge, compassionnelles et attendries, puissantes et conquérantes à la fois. C’est une force qui surgit et submerge, née du mystère, qui s’efface (« Magnificat anima mea Dominus ») comme l’on referme un livre des Merveilles.

La partition du Nunc Dimitis daté de 2001, est la plus planante, expression chorale de la prière de Simeon : « l’espace, le lieu, le silence »… Pärt y concentre tous les éléments d’une conscience aiguë, la vision qu’a Simeon du Temple, en une lente intensification de la ligne vocale soutenue par tout le chœur, des ultra aigus aux graves les plus sépulcraux. Pärt élargit le spectre sonore en géomètre d’une foi inébranlable et croissante; comme inextinguible.

Le Stabat Mater est l’œuvre maĂ®tresse du programme ; elle prend Ă  tĂ©moin l’auditeur en vagues sombre et amères, d’une affliction totale – expression du dĂ©nuement le plus absolu (vagues descendantes par les cordes seules) oĂą la pudeur et l’expression allĂ©gĂ©e pèsent de tout leur poids ; le chĹ“ur, les instrumentistes savent en faire jaillir la puissante prière, vraie dĂ©ploration pour la Mère affligĂ©e face au Fils sacrifiĂ©, suppliciĂ© sur la croix. La partition de 25 mn (plus courte ici que certaines autres versions) concilie Ă  la fois intimisme de la ferveur intĂ©rieure et expressivitĂ© plus dramatique, avec cette couleur de l’affliction non rĂ©ellement acceptĂ©e grâce Ă  la vibration des cordes. Ainsi la musique opère ce qu’elle sait spĂ©cifiquement rĂ©aliser : une extension progressive du spectre temporel et sonore qui dit l’infini de la souffrance ; et dans le mĂŞme temps, une mĂ©tamorphose directe et sincère, de la profonde tristesse Ă  la joie de la RĂ©demption. Des tĂ©nèbres Ă  la Lumière. Arvo Pärt, en passeur Ă©clairĂ©, Ă©crit pas Ă  pas, mesure après mesure, cette transfiguration progressive, inĂ©luctable, qui contient le message christique dans la promesse du Salut. Tout sacrifice n’est pas vain, semble-t-il nous dire. Car il mène toujours plus près vers la Lumière. Ainsi le final qui s’accomplit en un murmure croissant, comme un dernier Ă©blouissement (aigu des cordes), expression d’un sommet immatĂ©riel, de pleine conscience.

Fidèle à ses convictions et sa culture musicale, Pärt synthétise ici musique orthodoxe, chant de la Renaissance, expressionnisme du style « Tintinnabuli » où saisissent l’importance du silence, la clarté, l’équilibre, la consonance. Familier de l’écriture chorale de Pärt, entre autres pour l’avoir chanté et présenté en tournée, entre autres à Orléans au Massachusset, les chanteurs de l’ensemble Gloriae Dei Cantores exposent avec franchise la ferveur qui porte tout l’édifice choral. Le Stabat Mater touche et captive par son expressivité directe, sa grâce qui s’accomplit pas à pas, en particulier dans les dernières mesures. Il semble agir par cercles et spirales… comme une réitération continue. Commandée par The Alban Berg Foundation (centenaire de la naissance de Berg, 2010), la partition oppose comme une confrontation impossible et pourtant structurelle, la peine et la consolation.
CLIC D'OR macaron 200Pärt y fait surgir l’incandescence de l’illumination de l’ombre et du silence avec un netteté tranchante (caractère du style « Tintinnabuli », d’après la clochette de l’orgue portatif médiéval, comme l’attestent aussi ses œuvres emblématiques tels, Cantus, à la mémoire de Benjamin Britten, Fratres, Tabula Rasa, When Bach Bienen gezüchtet hätte, Pari Intervallo, Arbos, … ). Simple, subtile, accessible, pure, la musique jaillit progressivement des profondeurs,… d’où cette densité exceptionnelle qui confère à ce qui pourrait sonner léger et planant, une sincérité souterraine qui est la marque de l’expérience spirituelle intime. Avec le temps, comme plus ancré dans une ferveur assumée et lumineuse, Pärt développe son écriture pour le sacré et les voix, surtout chorales. C’est un questionnement perpétuel, une foi intarissable et toujours tendue qui ne cesse d’interpeler. Les interprètes du programme en offrent une lecture juste, investie, souvent bouleversante.

 

 

 

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CLIC D'OR macaron 200CD Ă©vĂ©nement, critique. ARVO PĂ„RT : Choral works (Stabat Mater, L’AbbĂ© Agathon, Nunc Dimitis…) Gloriæ Dei Cantores / Richard K. Pugsley, direction (1 cd DGC records, 2018 – 2019).

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1 – Peace upon You, Jerusalem
2 – L’abbĂ© Agathon
3 – Salve Regina
4 – Magnificat
5 – Nunc dimitis
6 – Stabat Mater

Durée totale : 1h09mn

HYBRID SACD RELEASE

RECORDING ENGINEERS: Brad Michel, Dan Pfeiffer
RECORDED: September 2018, May & September 2019
at The Church of the Transfiguration, Orleans
MA UPC: 709887006524
USA & Canada: CD65
Naxos Global Logistics: PARCD65
Retail price: $19.99

 

 

 

Visiter le site de l’ensemble Gloriae dei Cantores : https://gdcrecordings.com/

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VIDEO

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CD, critique. ELLE : MARINA REBEKA, soprano (french opera arias, 1 cd PRIMA classic, 2019).

ELLE cd critique review cd classiquenews - rebeka-marina-riga-cd-opera-critique-cd-classiquenewsCD, critique. ELLE : MARINA REBEKA, soprano (french opera arias, 1 cd PRIMA classic, 2019). On l’avait quittĂ©e au disque depuis un prĂ©cĂ©dent rĂ©cital intitulĂ© « Spirito » (dĂ©jĂ  CLIC de CLASSIQUENEWS)… « Elle », diva cĂ©lĂ©brĂ©e de la Baltique, chante les grands airs de l’opĂ©ra romantique français. Un dĂ©fi linguistique pour la chanteurse lettone : Marina Rebeka (“Artist of the Year” ICMA award) dont on salue ici la prise de risque assumĂ©e : chanter le français alors qu’elle est au sommet de ses possibilitĂ©s. Sa Louise est extatique mais charnelle ; son HĂ©rodiade, plus articulĂ©e encore, digne et pleine de langueur amère vis Ă  vis du Prophète Iokaanan (« Prophète bien aimĂ©, puis-je vivre sans toi ? »), un personnage idĂ©al pour la voix de Marina Rebeka, soprano ample, dramatique, qui ne manque pas de puissance. Tout se joue ici selon sa facultĂ© Ă  nuancer, Ă  phraser et Ă  colorer chaque intonation du texte, riche en connotations liĂ©es Ă  la situation dramatique et psychologique de chaque sĂ©quence. Reconnaissons l’autoritĂ© franche avec laquelle la diva sait incarner, sachant aussi canaliser son formidable instrument.

Marina Rebeka : le tempérament romantique et français

Plus douce et tendre encore, l’admirable Chimène de Massenet (Le Cid), « préparée » par le solo de clarinette, impose une héroïne tout aussi meurtrie, à l’âme brisée dont le chant exprime le désespoir lacrymal. Les couleurs de la diva sonnent justes et très affinées (… » et souffrir sans témoins. »). De toute évidence, la soprano née à Riga, cultive ici une couleur fauve et féline, sombre et caverneuse qui rappelle la tragédienne Callas (déjà observée dans son dernier cd « Spirito »), offrant une vision à la fois sincère et exacerbée de Chimène ; Massenet atteint un sommet d’extase tragique et désespérée qui fait de son héroïne cornélienne, la sœur de Werther : une âme ardente et maudite, condamnée à souffrir. Voilà donc un nouveau disque qui couronne la cantatrice révélée en 2009, il y a plus de dix ans, au festival de Salzbourg sous la direction de Muti.

Après les 3 premiers airs, denses et tragiques, l’air de Marguerite de Faust offre une insouciance qui fait contraste où la diva plus légère, réussit ce tour de force entre coquetterie et insouciance. A la différence de nombre de ses consœurs, « La Rebeka » concilie agilité, clarté et… puissance. Sa Carmen, plus fantasque et capricieuse encore, confirme une nette proximité avec Callas : de la chair, du texte, une puissance sans appui, et un style direct qui font ici mouche. La sirène dragone, déesse de l’Amour lascif et libérée, captive.

Autre sirène, mais celle conçue avant par Bizet, enivrĂ©e par la douceur de la nuit, la berceuse de Leila des PĂŞcheurs de perles, – avec cor obligĂ© : voici Carmen, assagie, en extase. La diva de Riga excelle grâce Ă  son attention aux nasales françaises, Ă  sa ligne, au soutien (aigus souverains et dernière note). Le chant berce et captive lĂ  encore par la justesse de son approche.

Parmi les autres héroïnes abordées : Manon, Juliette, avouons que la chair embrasée qui indique le poids de l’expérience passée et les épreuves endurées, gagne un surcroît d’évidence dans le rôle charnel et mystique de Thaïs de Massenet dont Marina Rebeka chante deux airs centraux : « Ah je suis seule », la courtisane seule dans une vie factice et vide ; puis « O messager de Dieu », révélation divine pour la grande pêcheresse d’Alexandrie qui reçoit et accepte l’opération spirituelle qui la terrasse (« ma chair saigne. », symptôme de la fameuse Méditation, précédemment joué au violon solo)… La tension sous-jacente et le travail de la métamorphose qui sont à l’œuvre dans l’esprit éprouvé de la jeune femme, sont idéalement incarnés par le beau chant, expressif et sobre de la soprano. Dommage cependant que sa Thaïs perde l’intelligibilité du français. Ne subsiste que la justesse des couleurs.
CLIC D'OR macaron 200Très pertinente inclusion dans ce condensé d’opéra romantique français où règnent surtout Gounod et l’incontournable Massenet : la cantate pour le Prix de Rome, L’Enfant Prodigue du jeune Debussy: « l’année, en vain chasse l’année » : le tragique harmoniquement rare du jeune Debussy s’inscrit dans la droite ligne du Massenet le plus mordant et âpre, à laquelle la double invocation : « Azaël, Azaël… pourquoi m’as tu quittée? », apporte sa blessure mordorée maternelle que la diva incarne idéalement. Mais là encore, malgré des moyens captivants en couleurs et intonations, malgré l’intelligence de la caractérisation, on regrette en cette fin de récital globalement excellent, la perte de la précision linguistique. Vite un coach en français pour la diva au talent phénoménal : le dernier air de Juliette de Gounod (« Verse toi-même ce breuvage, O Romeo, je bois à toi ! ») saisit par son relief expressif, une couleur elle aussi mordante et même vériste, d’une belle conviction chez Gounod dont l’héroïne tragique, éperdue, revêt ici une incarnation très impliquée et charnelle… Quel chien, quel tempérament : sa Juliette n’a rien de frêle ; tout respire ici la fureur d’une héroïne romantique que l’amour embrase jusqu’à la mort. Ses Carmen, Marguerite, Thaïs promettent ici de prochaines prises de rôles, sans compter ce que l’on propose à la chanteuse manifestement passionnée par le français, un prochain récital de mélodies françaises. A suivre… de très près. Evidemment, comme son précédent « Spirito », le CLIC de CLASSIQUENEWS pour « ELLE ». bravissima Rebeka !

 

 

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ELLE cd critique review cd classiquenews - rebeka-marina-riga-cd-opera-critique-cd-classiquenewsCD, critique. ELLE : MARINA REBEKA, soprano (french opera arias, 1 cd PRIMA classic, 2019) – Sinfonieorchester St.Gallen – Michael Balke, direction/ EnregistrĂ© en Suisse en mai 2019 – 1 cd PRIMA classic - CLIC de CLASSIQUENEWS de mars et avril 2020.

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Approfondir
VISITEZ le site de Marina Rebeka
https://marinarebeka.com/

 

 

REBEKA marina soprano bel canto cd critique review cd par classiquenewsCLIC D'OR macaron 200CD, critique. SPIRITO. MARINA REBEKA, soprano (1 cd Prima classic, juillet 2018)… Extase tragique et mort inéluctable… : toutes les héroïnes incarnées par Marina Rebeka sont des âmes sacrificielles…. vouées à l’amour, à la mort. Le programme est ambitieux, enchaînant quelques unes des héroïnes les plus exigeantes vocalement : Norma évidemment la source bellinienne (lignes claires, harmonies onctueuses de la voix ciselée, enivrante et implorante, et pourtant âpre et mordante) ; Imogène dans Il Pirata, – d’une totale séduction par sa dignité et son intensité, sa sincérité et sa violence rentrée ; surtout les souveraines de Donizetti : Maria Stuarda (belle coloration tragique), Anna Bolena (que la diva chante à Bordeaux en novembre 2018, au moment où sort le présent album). Aucun doute, le cd souligne l’émergence d’une voix solide, au caractère riche qui le naisse pas indifférent. Les aigus sont aussi clairs et tranchants, comme à vif, que le medium et la couleur du timbre, large et singulière.

 

COMPTE RENDU, critique opéra. MONTE CARLO, le 8 mars 2020. Bellini : Le Pirate. Sagripanti, Pirozzi… version de concert

Il Pirata opera monte carlo critique opera classiquenews -thumb-vignette---il-pirata---spectacles-saison-2019-2020---site-opera-de-monte-carloCOMPTE RENDU, critique opéra. MONTE CARLO, le 8 mars 2020. Bellini : Le Pirate. Sagripanti, Pirozzi… version de concert. Prince du bel canto le plus stylé, Bellini fait son entrée au répertoire de l’Opéra monégasque mais en version concert, sous la direction de Giacomo Sagripanti. On avait encore en tête l’incarnation sublime d’Imogène en sa prière ardente par la soprano Anna Kassyan, lors du Concours Bellini à Paris 2016 : une prise de rôle qui valut à la diva le Premier prix.
Depuis à La Scala, Sonya Yoncheva en 2018 s’est appropriée elle aussi le rôle et l’Opéra de Paris a manqué son rv en déc 2019 malgré un cast prometteur (Tézier, Spyres, Radvanovsky) suite aux grèves et mouvements sociaux d’une France en état éruptif. Ainsi cette version concertante à Monaco à l’Auditorium Rainier III prend des airs de rattrapage heureux.

Dirigé par Giacomo Sagripanti, l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo détaille ce qui fait le propre du bel canto orchestral : sa finesse et des changements de tableaux précisément enchaînés. Un flux expressif et souple campe le décor d’une action amoureuse et passionnelle prête à exploser…

Le trio protagoniste relève les défis de la partition même sans décors. Au contraire, la musique exprime tout des enjeux de l’action et sans contraintes de jeu, les solistes peuvent s’impliquer davantage dans le chant. Ainsi l’Ernesto de Vittorio Prato qui remplace George Petean initialement programmé, ne manque pas de noblesse sombre et autoritaire. Il s’oppose au Gualtiero de Celso Albelo, qui est le rôle-titre : la technique peine, les aigus sont tendus mais le caractère du héros prêt au sacrifice total (et final) est bien là, touchant par sa sincérité sans fard, parfois à la limite de ses véritables possibilités ; réserves compensées par une articulation réjouissante.
Imogène ardente elle aussi mais plus flexible, Anna Pirozzi montre qu’elle maîtrise le bel canto, en virtuosité et intonation. Son sens de l’équilibre et de la mesure, évitant la surenchère, incarne une amoureuse déterminée, aussi angélique que sombre et presque folle à la fin : un protype pour la Lucia di Lammermoor de Donizetti (1835) et la fixation de l’héroïne romantique italienne par excellence. Voilà une première à Monte Carlo qui reste une lecture convaincante qui montre combien Le Pirate est un opéra clé de Bellini, évidemment à réestimer sur les scènes internationales. A l’Opéra de Monaco, revient le mérite de confirmer la haute valeur du drame créé à Milan en 1827.

COMPTE-RENDU, critique opéra. PARIS, Bastille, le 5 mars 2020. MASSENET : MANON. Yende / Bernheim

manon massent pretty yen bernheim critique opera classique newsCOMPTE-RENDU, critique opéra. PARIS, Bastille, le 5 mars 2020. MASSENET : MANON. Yende / Bernheim. Après Bordeaux, le ténor Benjamin Bernheim reprend le rôle du Chevalier Des Grieux à Bastille, amoureux transi de la belle Manon ; mais trahi par elle, il devient l’abbé de Saint-Sulpice, avant de retomber dans les bras de celle qui n’a jamais cessé de l’aimer… Récemment auréolé d’une Victoire de la musique (fév 2020), le chanteur incarne efficacement le personnage dont l’abbé Prévost, premier auteur avant Massenet, souligne la candeur, l’innocence voire une certaine naïveté …fatale. Le ténor reviendra, pour la saison prochaine 2020-2021, à Bastille aussi, incarnant FAUST de Gounod.
Saluée à Paris sur la même scène dans Lucia di Lammermoor (oct 2016), La Traviata en sept 2019 avec déjà B.Bernheim comme partenaire, Pretty Yende incarne Manon faisant rayonner son art coloratoure enchanteur au profit d’une nouvelle prise de rôle rafraîchissante qui manque cependant d’implication textuelle : pas assez articulée, parfois inintelligible, la jeune diva sud-africaine manque sa partie à cause d’une mauvaise diction du français et un format qui paraît parfois sous dimensionné pour le rôle (air du Cours la Reine, et graves inaudibles). Pourtant le caractère est présent et la sincérité du chant, toujours intacte. On est quand même loin des Beverly Sills ou Ileana Cotrubas, voire récemment sur cette même scène, Renée Fleming. Tout cela manque et d’épaisseur et d’émotions. Parmi les seconds rôles, Ludovic Tézier (Lescaut) culmine par sa bravoure racée, onctueuse (un rien trop paternel pour le cousin de Des Grieux), comme Rodolphe Briand (fin Guillot de Mortfontaine, vraie incarnation de l’esprit du Paris Louis XV).

 

 

Manon en meneuse de revue

 

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yende bernheim manon massenet bastille critique opera classique newsHĂ©las, le chef Dan Ettinger aborde Massenet comme une rutilante tapisserie nĂ©obaroque, pompe et puissance pompier en prime : les voix sont couvertes, les chĹ“urs saturĂ©s, et la direction privilĂ©gie l’effet sur la respiration. Le ballet nĂ©o Versaillais pĂ©tille et ronfle Ă  souhait façon revue musicale. Quant Ă  la scène oĂą Manon fait la reconquĂŞte de son ex amant devenu abbĂ©, la musique verse des rubans de suavitĂ© sirupeuse. La caricature n’est pas loin. Encore une direction surdimensionnĂ©e qui affecte la perception du Massenet, subtil peintre des sentiments. D’autant qu’à la subtilitĂ© d’un XVIIIè pourtant Ă©lĂ©gant et parisien dans la partition, le metteur en scène de la nouvelle production parisienne, Vincent Huguet, ex collaborateur de Patrice ChĂ©reau, prĂ©fère l’ivresse des AnnĂ©es Folles qui fait de Manon, une meneuse de revue, la vĂ©ritable reine du Paris libĂ©rĂ©. Ce parti pris aux rĂ©alisations Art DĂ©co très esthĂ©tisantes, n’empĂŞche pas confusion et mĂ©li-mĂ©los dans la scĂ©nographie et la lisibilitĂ© de certaines situations (la fin de la courtisane mourante.…). Les inserts de JosĂ©phine Baker (comme si l’on avait pas compris le parallèle Baker / Manon) coupe la continuitĂ© de l’œuvre originelle et finissent par agacer. L’époque est au zapping, au redĂ©coupage, au saucissonage, quitte Ă  dĂ©naturer la partition d’origine. Soit. La production vaut surtout par le duo des chanteurs dans les deux rĂ´les protagonistes. Attention B. Bernheim / P. Yende ne chantent pas sur toutes les dates ; ils sont remplacĂ©s par d’autres solistes. Voir le site de l’OpĂ©ra Bastille afin d’identifier la distribution qui concerne la date requise. Illustrations : photos ONP © J Benhamou

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LIRE aussi notre présentation de MANON de MASSENET
http://www.classiquenews.com/nouvelle-manon-de-massenet-a-bastille/

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VIDEO : voir le teaser MANON de MASSENET / OpĂ©ra Bastille / Yende, Bernheim – mars 2020

https://www.youtube.com/watch?v=1bMXcG8_Nys&feature=emb_logo

 

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CD, réédition événement. BEETHOVEN : Misas Solemnis, KARAJAN, Berliner 1966 (1 cd DG Deutsche Grammophon)

CD, réédition événement. BEETHOVEN : Misas Solemnis, KARAJAN, Berliner 1966 (1 cd DG Deutsche Grammophon). Il existe déjà une version antérieure (1958) avec le Philharmonia Orchestra et déjà Christa Ludwig parmi les solistes (aux côtés de Gedda, Schwarzkopf, Zaccaria et les Wiener Singverein) audible ici :
https://www.youtube.com/watch?v=5bI9-DTloKU
beethoven karajan berliner 1966 classiquenews critique review Missa-Solemnis-Opus-123La version rĂ©alisĂ©e Ă  Berlin en 1966 avec les chers Berliner Philharmoniker affine encore la grande sĂ©duction formelle, les Ă©quilibres entre choeur, orchestre, solistes de cette cathĂ©drale sonore au souffle inimitable. Karajan aussi criticable soit il par son cĂ´tĂ© hĂ©doniste poli solaire reste indiscutable cependant par la ferveur impĂ©rieuse, une attĂ©nuation fraternelle de la prière qu’adresse ici Beethoven Ă  tous les hommes de bonne volontĂ©. Entre appel Ă  la fraternitĂ© gĂ©nĂ©rale – thème ultime et si cher Ă  Ludwig qui inerve son opĂ©ra Fidelio et surtout le final de la 9è Symphonie, et la volontĂ© de construire un monde neuf, Beethoven Ă©difie une arche de rĂ©conciliation et de sublimation active, vĂ©ritable machine de rĂ©demption ; en tĂ©moigne le recueillement du Sanctus, suspendu, vrai cĹ“ur de la prière collective oĂą les solistes agissent comme intercesseurs. Le plateau des chanteurs est superlatif, et la direction d’une Ă©conomie rĂ©elle, laissant respirer le tissu orchestral et choral, sachant surtout dessiner avec clartĂ© chaque ligne tout en prĂ©cisant son enjeu, au sein du cycle entier. Le maĂ®tre mot de Beethoven est la compassion fraternelle : elle se dĂ©ploie ici sans entrave avec propre au Karajan de l’après guerre, et l’esprit de reconstruction après la guerre qui s’y cristallise, une Ă©paisseur parfois tendre qui sous tend toute la basilique symphonique. Le geste est sĂ»r et la vision d’un recueillement profond : Ă©couter ici la sidĂ©ration pacificatrice du Benedictus, appel au dĂ©sarmement total et Ă  l’amour des autres, miraculeuse fontaine salvatrice qui console, rassure, exauce… comme l’adagio de la 9è. RemastĂ©risĂ©e 24 BIT / 192 kHz, la lecture de 1966 rĂ©alisĂ©e Ă  Berlin marque la carrure de l’immense chef salzbourgeois… qui ne cesse alors de conquĂ©rir la planète classique (Ă  58 ans). Un must absolu (avec la version de Klemperer le vĂ©ritable maĂ®tre avant Karajan, lui aussi directeur musical du Philharmonia, mort en 1973). Karajan se livre dans cette archive Ă  connaĂ®tre absolument : intĂ©rioritĂ©, passion, architecture.

 

 

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beethoven 1803 apres Symphonie 1 creation symphonies romantiques classiquenews review compte rendu cd critique 800px-Beethoven_3DOSSIER BEETHOVEN 2020 : 250 ans de la naissance de Beethoven. L’anniversaire du plus grand compositeur romantique (avec Berlioz puis Wagner évidemment) sera célébré tout au long de la saison 2020. Mettant en avant le génie de la forme symphonique, le chercheur et l’expérimentateur dans le cadre du Quatuor à cordes, sans omettre la puissance de son invention, dans le genre concertant : Concerto pour piano, pour violon, lieder et sonates pour piano, seul ou en dialogue avec violon, violoncelle… Le génie de Ludwig van Beethoven né en 1770, mort en 1827) accompagne et éblouit l’essor du premier romantisme, quand à Vienne se disperse l’héritage de Haydn (qui deviendra son maître fin 1792) et de Mozart, quand Schubert aussi s’intéresse mais si différemment aux genres symphonique et chambriste. Venu tard à la musique, génie tardif donc (n’ayant rien composé de très convaincant avant ses cantates écrites en 1790 à 20 ans), Beethoven, avant Wagner, incarne le profil de l’artiste messianique, venu sur terre tel un élu sachant transmettre un message spirituel à l’humanité. Le fait qu’il devienne sourd, accrédite davantage la figure du solitaire maudit, habité et rongé par son imagination créative. Pourtant l’homme sut par la puissance et la sincérité de son génie, par l’intelligence de son caractère pourtant peu facile, à séduire et cultiver les amitiés. Ses rencontres se montrent souvent décisives pour l’évolution de sa carrière et de sa reconnaissance. Pour souligner combien le génie de Beethoven est inclassable, singulier, CLASSIQUENEWS dresse le portrait de la vie de Beethoven (en 4 volets), puis distingue 4 épisodes de sa vie, particulièrement décisifs…

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